Les maires de France en quête d'une clarification de l'Etat

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(Crédits : Charles Platiau)

PARIS (Reuters) - Les maires de France attendent cette semaine une clarification du gouvernement sur ses projets budgétaires après l'annonce cet été d'une série de mesures jugées "brutales" et "unilatérales" par des collectivités au bord de l'"asphyxie".

Plus de 15.000 édiles et plusieurs ministres dont Gérald Darmanin (Budget), Gérard Collomb (Intérieur) et Jacques Mézard (Cohésion des Territoires) sont attendus à partir de mardi Porte de Versailles à Paris pour leur 100e congrès qui s'achèvera par un discours d'Emmanuel Macron jeudi après-midi.

Pour François Baroin, qui préside l'Association des maires de France (AMF), "le président a une occasion unique de remettre tout le monde autour de la table, de fixer un cap général vers plus de décentralisation".

"Un pacte de confiance est possible mais le président de la République doit, d'urgence, reprendre la main sur ce dialogue", ajoute dans une interview au Figaro publiée lundi le maire Les Républicains (LR) de Troyes, qui avait estimé début novembre que le congrès devait "clarifier les intentions de l'Etat".

Dans le collimateur de l'AMF, la suppression progressive de la taxe d'habitation - source de recettes pour les collectivités - et la baisse des contrats aidés auxquels les municipalités ont souvent recours.

Ces deux mesures ont provoqué une bronca chez les édiles, déjà échaudés par l'annonce en juillet par le chef de l'Etat d'un effort de 13 milliards d'euros demandé aux collectivités territoriales sur le quinquennat - soit trois milliards de plus que ce qui avait été annoncé pendant la campagne.

"Passer de 10 à 13 milliards d'économies (...), c'est incompréhensible et menaçant", estime François Baroin. "Lorsqu'on apprend que les emplois aidés ne seront plus financés, il y a aussi non respect de la parole de l'État."

"Nous lançons (à Emmanuel Macron) un cri d'alarme: vous voulez transformer le pays, nous sommes des partenaires loyaux, mais nous ne pouvons plus continuer à mener une telle politique, désormais amplifiée", prévient-il.

UN DIALOGUE "JAMAIS ROMPU"

Les collectivités, qui se disent asphyxiées et dont les efforts financiers ont été salués par un rapport de la Cour des comptes en octobre, rappellent avoir réalisé davantage d'économies que l'Etat pendant le mandat de François Hollande.

Face à ces tensions et au risque de subir un nouvel accueil mouvementé après les sifflets essuyés en mars pendant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron et le gouvernement ont multiplié les gestes d'apaisement et d'appel au dialogue ces dernières semaines tout en maintenant leurs objectifs.

Après avoir reçu l'AMF - qui l'a jugé "à l'écoute" - et des collectifs de maires, le chef de l'Etat a décidé de convier à une réception à l'Elysée mercredi soir plus d'un millier d'édiles afin de marquer "l'importance de ce tissu d'élus de proximité et de confiance pour les Français".

"Le chef de l'Etat ne veut pas être le président des villes, des métropoles, opposé au président des campagnes", notait récemment François Patriat, président du groupe LREM au Sénat (ex-PS), lors d'une rencontre avec des journalistes.

"Il n'y a jamais eu la volonté de mener une politique contre les collectivités locales", a assuré Jacques Mézard jeudi dernier. "Nous travaillons constamment avec les collectivités locales, le dialogue n'a jamais été réellement rompu."

Jeudi, les édiles réserveront au chef de l'Etat "un accueil républicain", mais la réaction de la salle dépendra de son message, a prévenu André Laignel, vice-président de l'AMF et maire PS d'Issoudun (Indre), début novembre.

"Si aucune évolution substantielle ne se faisait jour", la question la participation des maires à la conférence des territoires prévue mi-décembre et d'ores et déjà boycottée par les régions, "est très clairement posée", a-t-il ajouté.

L'AMF, qui estime que les contraintes budgétaires imposées par l'exécutif sont contraires au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, n'exclut pas de déposer une QPC devant le Conseil constitutionnel.

(Marine Pennetier, avec Myriam Rivet et Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse)