Blocages et tensions à l'approche du référendum grec

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Blocages et tensions a l'approche du referendum grec[reuters.com]
(Crédits : © Eurokinissi . / Reuters)

par Lefteris Karagiannopoulos et Toby Sterling

ATHENES/LA HAYE (Reuters) - La confrontation entre Athènes et ses partenaires de la zone euro se poursuivait jeudi, à l'approche du référendum de dimanche pour lequel le Premier ministre grec Alexis Tsipras a réitéré son appel à voter "non" aux propositions des créanciers de la Grèce, son pays faisant, à l'en croire, l'objet d'un "chantage".

La France et le président de l'Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem estimaient jeudi qu'un accord pour sauver la Grèce de la faillite était possible si les électeurs se prononçaient en faveur du "oui" dimanche.

Pour Jeroen Dijsselbloem, une victoire du "non" placerait la Grèce mais aussi l'Europe "dans une position très difficile".

"L'avenir de la Grèce est entre les mains du peuple grec", a-t-il dit à la presse au parlement néerlandais.

"Si l'issue est positive, il y aura évidemment, du côté européen, une volonté d'aider la Grèce à s'en sortir", a-t-il dit. "Si le résultat est négatif, l'avenir sera considérablement plus compliqué".

De son côté, le ministre grec des Finances, Yanis Varoufakis, a lié son propre avenir à l'issue du référendum, assurant qu'il démissionnerait si le "oui" l'emportait. Il s'est dit en outre convaincu qu'Athènes pourrait négocier de meilleures conditions, dont un allégement de sa dette, si les électeurs rejettent les conditions proposées actuellement par les Européens.

Prié par Bloomberg télévision de dire s'il serait encore à la tête de son ministère lundi soir si les Grecs votaient majoritairement "oui", il a répondu par la négative:

"Je n'y serai pas. (...) Je ne serai pas celui qui signera un autre semblant d'accord sur le modèle du précédent."

MARCHÉS FINANCIERS PLUS NERVEUX

"Je préfère me casser une jambe" que d'accepter un accord qui ne prévoirait pas une restructuration de la dette grecque, a-t-il ajouté.

Le seul sondage en bonne et due forme publié depuis l'annonce du référendum le week-end dernier donne le "non" en tête mais montre que le camp du "oui" a progressé sensiblement après l'annonce de la fermeture des banques pour la semaine.

Un autre sondage, publié par le site d'information grec euro2day, donne le "oui" en tête avec 47% contre 43% pour le "non", mais l'institut GPO, qui l'a réalisé, a souligné qu'il ne s'agissait que d'un instantané partiel, sur une journée, et que l'opinion restait très versatile en la matière.

La vue des banques fermées et les longues files d'attente de retraités faisant la queue pour obtenir de l'argent liquide ont choqué profondément nombre de Grecs et rappelé le prix qui pourrait être à payer en cas de sortie de la zone euro.

Les marchés financiers, qui ont été relativement peu affectés par les négociations entre Bruxelles et la Grèce, se sont montrés plus nerveux jeudi, et le coût des emprunts de l'Espagne et de l'Italie ont atteint leurs plus hauts niveaux depuis plusieurs mois.

Pour le président de l'Eurogroupe, il est clair que la Grèce risque de "n'avoir plus aucune place dans la zone euro" si elle vote "non" au référendum.

"Il faut dissiper une illusion: à savoir que si l'issue est négative, tout pourra être renégocié et que vous (les Grecs) obtiendrez des conditions plus attrayantes", a dit Dijsselbloem, par ailleurs ministre néerlandais des Finances.

CONTRACTION DE 20% EN QUATRE ANS?

Michel Sapin, ministre français des Finances, a jugé jeudi matin impossible de conclure un accord avec Athènes avant le référendum, en rupture avec la ligne défendue jusqu'à la veille par Paris dans le dossier de la crise grecque.

"Jusqu'à hier, la France a agi parce que nous étions persuadés qu'il était possible de faire en sorte qu'hier un accord intervienne", a-t-il déclaré sur iTELE.

Cherchant à rassurer les électeurs grecs, Nikos Pappas, ministre d'Etat et l'un des proches conseillers d'Alexis Tsipras, a démenti que le gouvernement grec imposerait un prélèvement sur les dépôts bancaires. Les banques, a-t-il dit d'autre part, rouvriront dès qu'un accord aura été trouvé entre Athènes et ses créanciers internationaux.

Pour l'agence de notation Standard and Poor's, l'économie grecque connaîtra une contraction de l'ordre de 20% dans les quatre ans à venir si le pays quitte la zone euro. Le PIB grec a déjà diminué de 25% depuis 2009, et plus d'un Grec sur quatre est au chômage.

L'agence de notation Moody's a abaissé mercredi d'un cran la note souveraine de la Grèce, de "Caa3" à "Caa2". Une autre agence, Fitch, avait revu en baisse la note de la Grèce dés mardi, la faisant passer, de "CCC" à "CC", à deux crans de la note "SD" ou "défaut sélectif".

La Grèce ne peut plus compter sur les aides liées à son deuxième plan de sauvetage financier, devenu caduc mardi soir. De même, avec le défaut de paiement constaté par le FMI, Athènes n'a plus accès à des financements de cet organisme tant qu'elle n'a pas réglé son arriéré, qui se monte à 1,6 milliard d'euros.

(avec Yvonne Bell, George Georgiopoulos et Renee Maltezou; Eric Faye pour le service français)