Relèvement ou pas des taux US en septembre dicté par les marchés

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Un relevement des taux de la fed se fera en fonction de l'evolution des marches[reuters.com]
(Crédits : © Jonathan Ernst / Reuters)

par Jonathan Spicer et Howard Schneider

JACKSON HOLE, Wyoming (Reuters) - La Réserve fédérale américaine a laissé vendredi la porte ouverte à un relèvement des taux d'intérêt dès septembre, même si plusieurs responsables de la Fed ont reconnu que les turbulences sur les marchés financiers, si elles se prolongeaient, pourraient retarder le resserrement de sa politique monétaire.

Certains membres de la Fed, dont le vice-président Stanley Fischer, ont déclaré, à l'occasion du symposium économique de Jackson Hole (Wyoming) auquel participent de nombreux responsables de banques centrales du monde entier, que la récente volatilité des marchés pourrait rapidement retomber et ouvrir la voie à la première hausse de taux en près de dix ans.

Alors que la prochaine réunion du comité de politique monétaire de la Fed aura lieu les 16 et 17 septembre, au moins cinq de ses membres ont jugé qu'il était trop tôt pour savoir s'il serait trop risqué de relever les taux dans le contexte de ralentissement en Chine, de hausse du dollar et de chute des cours de matières premières qui ont secoué les marchés.

"Il est trop tôt pour se prononcer", a dit le vice-président de la Fed Stanley Fisher à la chaîne de télévision CNBC. "Nous continuons de surveiller l'évolution de la situation. Je ne veux donc pas me précipiter et me décider maintenant sur ce qu'il faut en conclure: plus urgent, moins urgent, etc."

Comme d'autres membres de la banque, son vice-président a reconnu que l'accès de faiblesse des marchés cette semaine influerait sur le calendrier de la hausse des taux qui, jusqu'à tout récemment, paraissait probable pour le mois de septembre.

La forte volatilité des marchés financiers ces derniers jours a semé le doute sur le calendrier possible du resserrement de la politique monétaire de la Fed, notamment après les propos de William Dudley, un proche conseiller de la présidente de l'institution, Janet Yellen, jugeant une hausse de taux en septembre moins urgente qu'auparavant.

"SUSPENDRE" LES TAUX APRÈS UNE OU DEUX HAUSSES

Wall Street a fini sur une note quasiment inchangée vendredi, les investisseurs ayant repris leur souffle avant le week-end au terme d'une semaine erratique sur les marchés dans l'inquiétude sur l'état de l'économie chinoise.

"Je pense qu'ils pourraient se stabiliser assez vite", a dit Stanley Fisher, proche de la présidente de la Fed Janet Yellen.

Sur le marché des taux, les déclarations du président de la Fed d'Atlanta Dennis Lockhart à Bloomberg News, qui a jugé raisonnable d'estimer autour de 50% la probabilité d'une hausse de taux en septembre et évoqué la possibilité d'un relèvement à la réunion des 27-28 octobre, ont modifié les paris des traders.

Le niveau des taux swap suggérait vendredi que les traders estiment à 56% la probabilité d'un relèvement en octobre, contre 43% jeudi. Ils estimaient à 35% les chances d'un relèvement en septembre et à 77% la probabilité d'une hausse en décembre.

James Bullard, le président de la Fed de St. Louis, a affirmé de son côté, lors d'un entretien accordé à Reuters, qu'il restait favorable à un relèvement des taux dès la prochaine réunion de politique monétaire, mi-septembre, ajoutant simplement que la Fed hésiterait sans doute à franchir le pas si les marchés restaient volatils jusqu'à cette date.

Les mouvements erratiques des marchés et le ralentissement de l'économie chinoise ont eu pour l'instant peu d'effets sur l'économie américaine, a-t-il souligné.

"Rien de ce qui s'est passé jusqu'ici n'a radicalement modifié les perspectives des Etats-Unis au point de changer la trajectoire de base de la politique monétaire", a-t-il dit.

Une des idées qui a semblé émerger vendredi est que la Fed relève ses taux une ou deux fois, puis les "suspende" à ces niveaux en attendant que l'inflation remonte vers l'objectif de 2%, un dollar fort et un pétrole faible ayant freiner la hausse des prix, malgré un taux de chômage proche de l'objectif de 5%.

"Ma préférence serait - et c'est notre stratégie - d'agir plus tôt mais d'agir progressivement. Donc allons-y et nous pourrons ajuster le rythme des hausses en fonction des données qui nous arriveront sur l'économie américaine et de l'évolution des prévisions", a ajouté James Bullard, qui a déclaré auparavant juger justifiée une hausse de taux en septembre.

De son côté, Loretta Mester, la présidente de la Fed de Cleveland, a estimé que l'économie américaine pourrait supporter une hausse modeste des taux, mais elle n'est pas allée jusqu'à affirmer qu'elle soutiendrait une telle hausse lors de la réunion de septembre.

"Je veux consacrer le temps dont je dispose d'ici à la réunion de septembre pour évaluer toutes les informations économiques qui nous parviendront, y compris la volatilité récente des marchés et les raisons de celle-ci", a-t-elle expliqué dans un entretien au Wall Street Journal.

"Mais cela n'a pas modifié pour l'instant ma position de fond, à savoir que l'économie américaine est solide et qu'elle peut supporter une hausse des taux d'intérêt", a-t-elle ajouté.

(avec Jason Lange et Krista Hughes; Marc Angrand et Juliette Rouillon pour le service français, édité Simon Carraud)