Premier débat télévisé aux Etats-Unis de la primaire démocrate

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Premier debat televise aux usa de la primaire democrate[reuters.com]
(Crédits : © Yuri Gripas / Reuters)

WASHINGTON (Reuters) - Hillary Clinton sera mardi soir au centre du plateau du premier débat organisé entre les candidats à l'investiture démocrate en vue de l'élection présidentielle de novembre 2016 et retransmis en direct par CNN.

Après les deux débats agités et mouvementés organisés par le Parti républicain, qui ont attiré de très larges audiences notamment du fait de la présence de Donald Trump, les échanges entre les démocrates devraient être plus mesurés.

Mais le débat, programmé à Las Vegas à 20h30 (02h30 mercredi, heure de Paris, intervient à un moment délicat pour Hillary Clinton.

A son entrée en campagne, en avril, l'ex-secrétaire d'Etat, sous le premier mandat de Barack Obama, était la grandissime favorite de la primaire démocrate. Son aura a été depuis largement entamée par l'affaire des courriels - elle s'est servie de sa messagerie personnelle au lieu d'un compte officiel lorsqu'elle dirigeait la diplomatie américaine.

Ses déboires ont favorisé l'émergence dans les sondages du sénateur indépendant du Vermont Bernie Sanders, qui se présente comme un "socialiste démocrate", et alimenté les spéculations autour d'une possible candidature de l'actuel vice-président, Joe Biden, qui n'a toujours pas mis fin à l'ambiguïté.

Trois autres candidats seront sur le plateau de CNN. Mais Martin O'Malley, Lincoln Chafee et Jim Webb n'ont pas su faire décoller leurs campagnes.

HILLARY CLINTON RESTE FAVORITE

Hillary Clinton fait toujours figure de favorite mais sort d'un été mouvementé et le début de l'automne ne lui a pas été plus favorable.

Celle qui entend effacer son échec de 2008, lorsque Barack Obama lui avait barré la route lors de sa première tentative d'investiture démocrate, a été rattrapée par l'affaire des courriels envoyés de sa messagerie privée lorsqu'elle dirigeait la diplomatie américaine (2009-2013).

Résultat, elle est passée en août et pour la première fois sous les 50% d'intentions de vote mesurées auprès d'électeurs inscrits comme démocrates. Et sa cote auprès de l'opinion américaine en général est au plus bas depuis mars 2001.

Le mouvement s'est poursuivi : un sondage Reuters/Ipsos publié mi-septembre ne mesurait plus que huit points d'écart entre Hillary Clinton (à 39%) et Bernie Sanders (31%).

A 67 ans, l'ex-Première dame, qui a également été élue sénatrice de l'Etat de New York en 2000, peut néanmoins compter sur sa puissance financière et sur le professionnalisme de ses équipes de campagne. En trois mois de campagne, elle a levé 45 millions de dollars, un record - en 2011, Obama en avait levé trois de moins sur la même période.

Depuis la rentrée, elle a multiplié les initiatives, détaillant son plan pour un contrôle des armes à feu et proposant de démanteler les banques jugées trop importantes pour faire faillite, de mieux contrôler le système bancaire parallèle et, afin de mettre un frein aux abus de Wall Street, d'augmenter les amendes que les régulateurs peuvent imposer aux sociétés financières et à leurs dirigeants.

Elle a également pris position contre le projet d'oléoduc géant Keystone, qu'elle juge en contradiction avec la lutte contre les dérèglements climatiques.

BERNIE SANDERS, LA SURPRISE

Le sénateur indépendant du Vermont, Bernie Sanders, 74 ans, est la surprise de l'été. Celui qui n'hésite pas à se dire "socialiste démocrate" a profité à plein des problèmes de Hillary Clinton, attirant les foules dans ses meetings de campagne.

Entre juillet et août, il a progressé de dix points dans les intentions de vote, à 29%, tandis que Hillary Clinton en perdait neuf à 47%. Dans le dernier sondage Reuters/Ipsos en date, il est même pour la première fois donné à moins de dix points de l'ex-Première dame et des enquêtes d'opinion le placent en tête dans le New Hampshire et l'Iowa, les deux Etats qui lanceront le processus des élections primaires en début d'année prochaine.

Occupant l'espace à gauche du parti, il veut élargir la couverture maladie, augmenter le salaire minimum, taxer davantage les plus hauts revenus et rendre les universités plus accessibles. Mais sa progression se heurte à ses mauvais scores auprès des minorités, notamment les Afro-Américains.

Guère habitué aux débats nationaux en prime-time, il jouera gros mardi soir. Il a pourtant refusé de répéter avec ses conseillers dans les conditions de l'émission, a confié la semaine dernière à Reuters son porte-parole, Michael Briggs. Sanders n'entend pas interpeller Clinton sur l'affaire des courriels. "Il pense qu'il y a des choses plus importantes", a ajouté Briggs.

Martin O'Malley, 52 ans, ancien gouverneur du Maryland, se positionne lui aussi comme une alternative plus à gauche que Hillary Clinton. Sa pré-campagne s'est focalisée sur les excès de Wall Street et les injustices sociales. Mais il ne décolle pas. Le dernier sondage CBS News le donne à 1%

A 62 ans, Lincoln ChafeeE a d'abord été un élu républicain au Sénat avant de se présenter en candidat indépendant à l'élection du gouverneur de Rhode Island pour finir au Parti démocrate en 2013. Il veut extraire les Etats-Unis de leur implication dans de coûteuses guerres à l'étranger et fait de l'éducation, des infrastructures et de la santé ses priorités. Lui non plus n'a pas réussi à s'immiscer dans la lutte. CBS le mesure aussi à 1%.

Jim Webb, 69 ans, a représenté la Virginie au Sénat américain de 2007 à 2012. Dans son annonce sur son site internet, JimWebb'16, cet ancien secrétaire à la Navy du président républicain Ronald Reagan, qui a fait la guerre du Vietnam, est connu pour ses critiques sans détour de la politique étrangère des Etats-Unis et pour son soutien aux militaires américains en mission à l'étranger. Le dernier sondage CBS News lui accorde 2% des intentions de vote des démocrates.

QUID DE JOE BIDEN

Les intentions de l'actuel vice-président, Joe Biden, au côté de Barack Obama depuis leur "ticket" victorieux de 2008, agitent la classe politique.

L'hypothèse Biden, dont Barack Obama disait il y a un an dans l'hebdomadaire New Yorker qu'il ferait un "superbe président", a pris de l'ampleur à mesure que la campagne de Hillary Clinton patinait.

Fin août, la Maison blanche a salué l'habileté et l'expérience politiques de Joe Biden qui, à 72 ans, a déjà tenté à deux reprises l'aventure des primaires, en 1988 et 2008.

Au début du mois, Barack Obama a souligné l'importance du vice-président dans son dispositif mais a refusé de se prononcer sur son éventuelle entrée en lice. "Il a ses propres décisions à prendre", a-t-il dit.

Mais le temps presse pour Joe Biden, actuellement mesuré autour de 16% dans l'électorat démocrate, s'il entend briguer l'investiture. Pour l'heure, il entretient le doute.

Mi-septembre, invité du Late Show sur CBS, il expliquait avec émotion que la mort récente de son fils, Beau, ne le mettait pas dans une position lui permettant de se dévouer corps et âme à une nouvelle candidature à la présidence américaine. Sans pour autant fermer la porte.

(Rédaction de Washington, Henri-Pierre André pour le service français)