Sarkozy amende la procédure de la primaire, hérisse ses rivaux

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PARIS (Reuters) - Nicolas Sarkozy a braqué ses rivaux pour l'investiture présidentielle à droite en obtenant une modification de la procédure de vote pour les Français de l'étranger, une décision surprise perçue comme une manoeuvre destinée à réduire la participation à un scrutin promis pour l'heure à Alain Juppé.

Jusqu'ici plutôt consensuelle, l'organisation de la première primaire "ouverte" de la droite et du centre s'est brusquement tendue, quatre des candidats -- Alain Juppé, François Fillon, Bruno Le Maire, Hervé Mariton -- ayant décidé de saisir la Haute autorité.

En cause, les suffrages des Français de l'étranger, dont environ 1,2 million sont inscrits sur les listes consulaires, à la consultation des 20 et 27 novembre pour laquelle Alain Juppé, notamment, souhaite le corps électoral le plus large possible afin de conforter ses chances de victoire.

A l'inverse, Nicolas Sarkozy, largement distancé dans les sondages par le maire de Bordeaux, fonde ses espoirs dans le noyau dur des militants qui continuent de le plébisciter malgré une popularité nationale chancelante.

Lors d'un bureau politique réuni mardi soir en l'absence de ses principaux concurrents, le président des Républicains a obtenu que les expatriés ne votent plus par internet, mais par bulletin, comme en métropole.

La modification a été validée par 47 voix contre quatre, en dépit des arguments du député Thierry Solère, qui supervise l'organisation de la primaire.

Nicolas Sarkozy a invoqué le respect du "principe constitutionnel du maintien de l'égalité des citoyens devant le vote."

Or, le guide électoral de la primaire, diffusé le 22 avril, stipule que "pour les Français établis hors de France, le scrutin est organisé par voie électronique". La disposition était toutefois "en attente du vote d'approbation du bureau politique".

"UN DÉNI DE DÉMOCRATIE"

"Je ne vois pas au nom de quoi un mec de la Somme devrait faire 40 kilomètres pour aller voter, alors qu'un golden boy de New York n'aurait qu'à appuyer sur un bouton", a plaidé Nicolas Sarkozy, selon des propos rapportés par L'Opinion.

Dès mardi soir, le conseiller d'Alain Juppé Gilles Boyer a rappelé sur Twitter que l'ancien Premier ministre défendait le vote électronique afin de permettre aux expatriés de "voter dans de bonnes conditions".

François Fillon a marqué mercredi sa détermination à défendre "le droit des Français de l'étranger à s'exprimer" dans "des conditions qui respectent la spécificité de leur territoire de résidence".

"La Charte des primaires, acceptée par les candidats déclarés et la direction des Républicains, s'impose à tous et aucune modification des règles de vote ne saurait être adoptée sans consultation de la Haute autorité de la primaire", souligne-t-il dans un communiqué.

L'instance s'est saisie du litige mercredi.

Sur France Info, Bruno Le Maire s'est élevé contre l'idée qu'il puisse y avoir "des citoyens de premier ordre et de second ordre."

Les équipes mettent notamment en avant la difficulté d'organiser physiquement le vote dans la myriade de pays concernés.

Frédéric Lefebvre, député LR des Français de l'étranger et candidat à la primaire, annonce sur Facebook son intention d'organiser un vote électronique "avec une société habilitée et sous la surveillance d'un huissier".

"On ne peut priver, de fait, de droit de vote les centaines de milliers de Français, sur les 1,3 million d'électeurs dans le monde entier, qui seront trop éloignés d'un bureau de vote. Ce serait un déni de démocratie", écrit-il.

En 2015, avant la création du comité d'organisation de la primaire, Alain Juppé et François Fillon avaient laissé entendre qu'ils iraient seuls au combat si l'organisation de la primaire venait à souffrir d'irrégularités.

(Sophie Louet, édité par Yann Le Guernigou)