Syrie : le bras de fer russo-américain exaspère les Européens

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Le bras de fer entre etats-unis et russie sur la syrie perdure[reuters.com]
(Crédits : © Khalil Ashawi / Reuters)

par Michelle Nichols et John Irish

NATIONS UNIES/VIENNE (Reuters) - L'incapacité des Etats-Unis à convaincre la Russie de "lâcher" le président syrien Bachar al Assad accentue la frustration de puissances européennes reléguées au second plan du processus de paix syrien, dit-on dans les milieux diplomatiques.

Sceptiques à l'égard de cette approche bilatérale qui tarde à porter ses fruits, elles souhaitent désormais être associées plus étroitement au règlement d'un conflit qui a fait 250.000 morts en cinq ans, ajoute-t-on à la veille d'une nouvelle réunion du Groupe international de soutien à la Syrie (GISS), à Vienne.

"Beaucoup (au sein de l'administration américaine) ont longtemps sous-estimé la détermination des Russes à empêcher la chute de ce régime. Ils ont fait savoir assez clairement qu'ils n'étaient pas prêts à l'accepter", reconnaît Philip Gordon, ancien conseiller à la sécurité nationale de Barack Obama.

Selon un haut responsable de l'Onu ayant requis l'anonymat, il faut donc proposer d'autres formes de transition pour convaincre l'opposition de déposer les armes et de négocier. "Mais nous n'avons jamais eu ne serait-ce que le début de cette discussion avec les Syriens eux-mêmes parce que les Etats-Unis et la Russie essayent de combler le fossé et qu'ils n'y parviennent pas. Voilà pourquoi nous devons faire machine arrière et miser sur le multilatéralisme", propose-t-il.

La coopération russe a certes permis d'obtenir la mise en oeuvre de quelques cessez-le-feu partiels et l'adoption de résolutions à l'Onu, mais les divergences concernant le sort d'Assad se sont avérées trop importantes pour être comblées, ce qui maintient les négociations dans l'impasse.

POUTINE PRÊT À LÂCHER ASSAD

"Souvenez-vous comment (le secrétaire d'Etat américain John) Kerry s'est impliqué (...) C'était avec l'espoir et la conviction que les Russes allaient décider rapidement le régime à s'engager dans le processus politique", rappelle un diplomate occidental.

L'un des principaux problèmes, dit-on en coulisse, réside dans l'incapacité - ou la réticence - des Etats-Unis à tenir tête à une Russie de plus en plus sûre d'elle. Pour certains, Barack Obama a perdu sa capacité de persuasion lorsqu'il a renoncé en 2013 à recourir à la force après des bombardements chimiques imputés à l'armée syrienne.

Aux yeux de certains représentants de l'opposition syrienne et des membres du personnel de l'Onu, les Etats-Unis ont souvent exercé davantage de pressions sur les rebelles que sur Moscou ou Damas pour obtenir des concessions.

Vladimir Poutine serait pourtant prêt à lâcher Assad en échange de garanties quant à la stabilité de la Syrie et à la pérennité de la présence militaire russe à Tartous, assure un membre des services de renseignements américain.

"Poutine n'a plus confiance en Assad et cherche une perspective de transition stable, mais ne l'a pas encore trouvée", ajoute-t-il, sous couvert de l'anonymat.

(Avec Michelle Nichols, Jean-Philippe Lefief pour le service français)