Des stations-service sans essence, le gouvernement hausse le ton

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Plusieurs centaines de stations-service sans essence[reuters.com]
(Crédits : Stephane Mahe)

PARIS (Reuters) - Plusieurs centaines de stations-service françaises ont connu lundi des difficultés d'approvisionnement en raison d'un mouvement social persistant, à l'origine de longues files d'attente par endroits et d'une crispation du gouvernement.

Les ministres des Finances et du Travail, Michel Sapin et Myriam El Khomri, ont tous deux parlé de prise d'otage de la part de la CGT, qui s'est engagé à poursuivre ses actions pour obtenir le retrait du projet de loi Travail.

"Cela va durer au moins la semaine", a déclaré sur RMC Emmanuel Lépine, responsable de la branche pétrole de la CGT. "Il n'y a qu'une manière de débloquer la situation, c'est de retirer la loi Travail, c'est très simple", a-t-il ajouté.

Sur huit raffineries en France métropolitaine, six sont affectées par le mouvement, selon la CGT.

Plusieurs centaines de militants CGT ont bloqué dans la nuit de dimanche à lundi le dépôt pétrolier de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), prélude, selon le syndicat, à des actions pour arrêter la production sur l'ensemble du complexe pétrochimique de l'étang de Berre, avec les raffineries de Total à La Mède et Ineos à Lavéra.

Les salariés du site de Grandpuits, en Seine-et-Marne, ont quant à eux voté lundi l'arrêt de la production de cette raffinerie, la plus petite des cinq exploitées par Total en France, mais la plus proche de Paris.

FO, qui est moins présent que la CGT dans le secteur, participe aussi au mouvement.

Un mouvement de grève de 24 heures reconductible a par ailleurs été déclenché lundi chez Fluxel, le gestionnaire des terminaux pétroliers de Fos-sur-Mer et de Lavéra, dans les Bouches-du-Rhône.

"Aucun navire n'est opéré sur ces installations", a dit à Reuters le secrétaire général CGT du port de Marseille, Pascal Galéoté.

DES STATIONS A SEC

Les deux ports pétroliers de Fos-Lavéra desservent directement les raffineries du complexe pétrochimique de l'étang de Berre (Petroinéos à Lavéra, Total à la Mède et Esso à Fos), mais aussi par pipeline celles de Feyzin (France), de Cressier (Suisse) et de Karlsruhe (Allemagne).

Ces grèves et le blocage de dépôts pétroliers ont entraîné des pénuries dans plusieurs centaines de stations-service et poussé de nombreux automobilistes à se ruer aux pompes à essence - accélérant les ruptures d'approvisionnement.

Selon Total, qui exploite 2.200 stations-service, 612 d'entre elles se trouvaient lundi en rupture partielle ou complète d'approvisionnement.

Une application et un site internet lancés par des automobilistes recensent les stations à court de carburant, partiellement ou totalement - beaucoup se trouvent dans un grand quart nord-ouest et dans le sud-est.

Michel Sapin, qui s'exprimait sur iTELE, a qualifié les opérations menées par les syndicats d'"illégitimes".

"Quand quelque chose n'est plus légitime, il n'y a plus de soutien et il n'y aura évidemment pas la moindre indulgence de la part du gouvernement", a-t-il ajouté.

Il a justifié l'intervention des forces de l'ordre pour débloquer lundi les accès au dépôt Total de Cournon-d'Auvergne (Puy-de-Dôme), bloqués depuis six jours. "Ça fait partie des armes dont une démocratie dispose. Lorsqu'une action n'est plus légitime, il faut y mettre fin", a-t-il encore dit.

Sur RTL, le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez a mis en cause en retour la responsabilité du gouvernement pour l'absence de dialogue.

"Face à ce que nous on demande, c'est-à-dire l'écoute de ceux qui ne sont pas contents, on choisit de bomber le torse, de gonfler les muscles. C'est une position qui conforte ce qu'on connaît depuis un petit moment, pas de dialogue. Que le gouvernement écoute et que le président de la République écoute plutôt que de choisir la force", a-t-il dit.

(Yann Le Guernigou, avec Simon Carraud Jean-François Rosnoblet à Marseille, édité par Yves Clarisse)