Primaire de droite : 10% des électeurs de gauche prêts à y voter

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10% des electeurs de gauche prets a voter a la primaire de droite[reuters.com]
(Crédits : Staff)

par Sophie Louet

PARIS (Reuters) - Quelque 10% des électeurs de gauche seraient prêts à participer à la primaire de la droite pour faire barrage à Nicolas Sarkozy, un mouvement difficilement quantifiable qui favoriserait l'ancien Premier ministre Alain Juppé.

Selon une enquête du Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof) réalisée par Ipsos-Sopra Steria, sur plus de 1.000 personnes certaines d'aller voter au scrutin des 20 et 27 novembre, 9% se disent proches d'un parti de gauche et majoritairement enclines à désigner Alain Juppé.

Dans une précédente étude, l'Ifop anticipait la participation de 10% à 15% d'électeurs marqués à gauche.

"Primaire de droite : 2 euros pour se débarrasser définitivement de Sarkozy, c'est pas cher...Allons tous voter!", peut-on lire sur le compte Twitter "La Gauche avec Juppé", créé pour inviter "tous les électeurs de gauche et du centre à aller voter massivement Alain Juppé à la primaire pour éviter un duel Sarkozy/Le Pen" à la présidentielle de 2017.

Le compte, très actif, comptait 4.127 abonnés lundi à la mi-journée.

Face à des sondages qui pronostiquent la qualification systématique de la présidente du Front national, Marine Le Pen, pour le second tour de la présidentielle et face aux scores incertains du candidat de gauche au premier tour, les électeurs de gauche anticiperaient une forme de front républicain dont Alain Juppé serait l'incarnation pour éviter un nouveau 21 avril 2002, lorsque Jean-Marie Le Pen a accédé au second tour.

"On pourrait penser que Nicolas Sarkozy serait un meilleur candidat pour laisser une chance à la gauche. Mais ces électeurs ne sont pas des cyniques, ils affichent une préférence sincère", relève dans Libération le directeur du Cevipof, Martial Foucault.

Jusqu'à signer la Charte de l'alternance ainsi rédigée : "Je partage les valeurs républicaines de la droite et du centre et je m'engage pour l'alternance afin de réussir le redressement de la France.

Alain Juppé, favori de la primaire depuis son entrée en lice en août 2014, est perçu dans les enquêtes d'opinion comme "modéré", "rassembleur", plus "consensuel" que son rival Nicolas Sarkozy, accusé par la gauche d'une dérive droitière à la Donald Trump.

"ON N'A PAS BESOIN DES ÉLECTEURS DE GAUCHE"

"Voter Juppé à la primaire est actuellement la seule solution pour éviter de se retrouver avec deux candidats populistes à la présidentielle", peut-on lire encore sur le compte "La gauche avec Juppé".

Selon l'enquête du Cevipof publiée dans Le Monde daté du 27 septembre, Nicolas Sarkozy se rapproche d'Alain Juppé dans les intentions de vote pour le premier tour de la primaire (33% contre 37% au maire de Bordeaux) mais reste nettement devancé au second (44% contre 56%).

Les états-majors des principaux candidats de la primaire se montrent circonspects sur l'émergence d'un vote de gauche à la primaire et n'envisagent qu'une influence marginale, comme ce fut pour le vote présumé de droite lors de la primaire socialiste de 2011.

"Nicolas Sarkozy est en train de reconstituer une partie de l'électorat que nous lui avons pris (...) mais on n'a pas besoin des électeurs de gauche pour gagner la primaire", commente Gilles Boyer, directeur de campagne d'Alain Juppé.

"La stratégie politique qu'il a choisie fait qu'il y a de plus en plus de gens qui ne veulent pas qu'il revienne. Si la perspective de le voir gagner se précise, ça va mobiliser beaucoup de gens pour éviter ça", ajoute-t-il.

François Baroin, dont Nicolas Sarkozy a réaffirmé lundi sur Europe 1 qu'il en ferait son Premier ministre s'il était élu en 2017, dit ne pas croire à une mobilisation de l'électorat de gauche contre l'ancien président.

"J'ai du mal à imaginer des hordes de socialistes, qui d'ailleurs ne sont plus si nombreuses, à sortir de leur permanence pour aller traficoter un scrutin qui en réalité ne les concerne pas", a déclaré le maire de Troyes dimanche sur BFM TV.

Pour Laurent Bigorgne, directeur de l'Institut Montaigne, ce "phénomène marginal" ne pourra peser sur le vote.

"Les différents sondeurs (...) nous ont tous dit que ces mécanismes de 'squat' d'une primaire par des gens du camp d'en face en réalité n'existaient pas", a-t-il expliqué lundi à Reuters.

(Avec Ingrid Melander et Emmanuel Jarry, édité par Yves Clarisse)