Réunion à Paris sur les scénarios possibles à Mossoul et Rakka

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Reunion a paris sur la reconquete de mossoul[reuters.com]
(Crédits : © Ahmed Jadallah / Reuters)

par Marine Pennetier

PARIS (Reuters) - Une semaine après le début de l'offensive sur Mossoul, treize ministres de la Défense occidentaux sont réunis ce mardi à Paris pour faire le point sur la reconquête de la deuxième ville d'Irak et évoquer les scénarios possibles, y compris à Rakka, la capitale autoproclamée du groupe djihadiste en Syrie.

La reconquête de Mossoul, qui sera longue, "n'est pas une fin en soi car nous devons d'ores et déjà anticiper les conséquences de la chute" de la ville, a dit François Hollande à l'ouverture de la réunion, organisée au ministère de la Défense.

Parmi les colonnes de réfugiés qui quitteront Mossoul "il y aura aussi des terroristes, qui se cacheront et qui se dissimuleront et qui tenteront d'aller plus loin, et notamment vers Rakka", a souligné le chef de l'Etat français.

La question d'un retour des combattants étrangers vers leur pays d'origine doit également être prise en compte, a-t-il dit.

La réunion des ministres de la Défense de treize pays (France, Etats-Unis, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, Royaume-Uni, Espagne, Italie, Belgique, Pays-Bas, Allemagne, Danemark et Norvège), les plus engagés militairement dans la coalition anti-EI, est la cinquième depuis janvier 2016.

Engagée sur le terrain depuis août 2014 à l'invitation de Bagdad, la coalition emmenée par les Etats-Unis apporte un soutien aérien aux forces irakiennes et kurdes, en première ligne sur le terrain contre le groupe djihadiste.

L'offensive lancée par ces dernières le 17 octobre près de Mossoul a permis de reprendre le contrôle de 80 villages autour de la deuxième ville d'Irak, où le chef de l'EI, Abou Bakr al Baghdadi, a proclamé son "califat" il y a deux ans.

"On est dans le calendrier prévu, peut-être même un peu en avance", souligne-t-on à Paris où on observe avec intérêt des "mouvements de résistance" à Mossoul contre l'Etat islamique.

STRATÉGIE DE L'EI PEU CLAIRE

Mais la stratégie de l'organisation djihadiste, qui compterait dans la ville 5.000 combattants, reste pour l'heure une inconnue.

"On ne sait pas à cette heure comment Daesh va exactement réagir à la campagne qui est menée", indique-t-on au ministère de la Défense. "Il y a des hypothèses qui vont d'une tentative de fuite généralisée pour se disperser vers de nouveaux théâtres (...) à une lutte à mort dans Mossoul pour essayer d'infliger aux Irakiens et Peshmergas le plus de pertes (...) et faire sauter l'équilibre politique qui existe entre les Kurdes, les Irakiens et les Turcs".

Quelques centaines de combattants de l'EI en Syrie auraient rejoint Mossoul ces dernières semaines pour protéger la ville de l'offensive des forces locales, un mouvement qui pourrait aller dans le sens d'une "lutte à mort".

Au-delà de l'aspect symbolique, la reconquête de Mossoul constituerait une "perte majeure" pour l'EI, explique-t-on à Paris : perte "de ressources financières considérables" avec la fin du racket de la population, perte de la "capacité de recrutement y compris forcé", et "perte massive" de matériel.

La désorganisation du leadership, jusqu'à présent essentiellement irakien, pourrait par ailleurs entraîner des problèmes de gouvernance au sein de l'organisation.

ISOLEMENT RAPIDE DE RAKKA

Parallèlement à la reconquête de Mossoul, l'isolement de Rakka, autre bastion de l'EI dans la région, est donc indispensable, indique-t-on à Paris, où l'on fait de la reprise de la ville syrienne, d'où les attentats du 13 novembre auraient été fomentés, une priorité.

L'isolement peut "aller assez vite, ça a commencé avec la prise de Manbij (en août-NDLR), il y a un mouvement d'enserrement de la ville", souligne-t-on. La reconquête de la ville prendra elle toutefois plus de temps au vu des forces en présence sur le terrain et de la complexité du conflit syrien.

Face à des combattants de l'EI estimés à 4.000 à Rakka, "il n'y a tout simplement pas aujourd'hui encore la masse de force disponible" pour y faire face, observe-t-on. "L'ASL (l'armée syrienne libre-NDLR) est essentiellement occupée à l'Ouest du fait des bombardements sur Alep et les forces démocratiques syriennes (FDS) montent en puissance mais sont encore limitées".

La question d'un "accroissement" de ces forces sera l'un des enjeux des discussions à Paris où l'on juge vital d'aller vite pour empêcher l'EI de se réorganiser en Syrie une fois Mossoul tombée.

(avec Jean-Baptiste Vey, Edité par Yves Clarisse)