L’antisémitisme nié des profanateurs de Sarre-Union

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L’antisemitisme nie des profanateurs de sarre-union[reuters.com]
(Crédits : Vincent Kessler)

par Gilbert Reilhac

SAVERNE, Bas-Rhin (Reuters) - Les cinq auteurs de la profanation du cimetière juif de Sarre-Union, des adolescents au moment des faits, ont, à l'exception de l'un d'entre eux, nié avoir agi par antisémitisme, au premier jour de leur procès qui s'est ouvert jeudi à huis clos.

Tous aujourd'hui majeurs, ceux étaient âgés de 15 à 17 ans le 12 février 2015, lorsqu'ils ont vandalisé et brisé 250 tombes ainsi que le monument aux victimes de la déportation, sont poursuivis pour profanation de sépultures en raison de la religion des défunts et dégradation de biens publics en réunion.

"Ils reconnaissent que ce qu'ils ont fait n'était pas bien mais qu'à l'époque, c'était de l'humour. Ils disent 'aujourd'hui, on réalise que ça pouvait blesser certaines personnes'", a dit à des journalistes Samuel Thomas, vice-président de Maison des potes, une association antiraciste qui s'est portée partie civile.

Les journalistes ne sont pas autorisés à suivre les débats devant le tribunal pour enfants de Saverne.

Des références à Hitler et au nazisme ainsi que des propos et des blagues racistes ont néanmoins été retrouvés sur les ordinateurs de deux des protagonistes.

Un seul, le plus âgé, également considéré comme le "meneur" dans un saccage qui les a conduits par trois fois en un seul après-midi dans le cimetière, reconnaît son inclinaison de l'époque pour la mouvance skinhead.

"Il dit qu'il était vraiment de cette idéologie mais qu'il ne l'est plus", a indiqué Samuel Thomas, qui demandera au tribunal un supplément d'information pour éclaircir le rôle joué par un sixième jeune, amis de certains prévenus avec lesquels il échangeait des propos négationnistes.

UN CHOC NATIONAL

La profanation avait provoqué un choc national, un mois après les attentats contre Charlie Hebdo et contre une supérette kacher à Paris. François Hollande, s'était rendu sur place pour exprimer sa solidarité avec la communauté juive.

Effrayé par l'ampleur que prenait l'affaire et incité par ses proches, l'un des jeunes s'était dénoncé à la gendarmerie au lendemain de la découverte du saccage.

"C'était une sorte de jeu de rôle où certains jouaient les méchants. Il y a eu une forme d'incitation mutuelle", a dit à Reuters son avocat, Me Olivier Charles.

Pour la mère du présumé "meneur", interrogée par Reuters, le procès est nécessaire pour que son fils, qui "assume", puisse s'exprimer devant les parties civiles et tourner la page.

Me Raphaël Nisand, avocat du consistoire israélite du Bas-Rhin, qui n'a pas pu être présent à l'audience, refuse toute relativisation de la gravité des faits.

"Si vous faites un jeu de rôle, vous pouvez vandaliser une ou deux tombes mais vous ne saccagez pas tout un cimetière. C'est un travail de sape de la société française. C'est le vivre-ensemble qui est attaqué", a-t-il dit à Reuters.

Les cinq jeunes majeurs encourent trois ans et demi de prison si l'excuse de minorité est retenue, le double si elle est écartée.

Le consistoire demande 860.000 euros pour les travaux de remise en état du cimetière dont une vingtaine de tombes seulement, les plus récentes, ont été restaurées. La réparation des dommages devrait incomber aux assurances des familles.

(Edité par Yves Clarisse)