Mélenchon appelle les Français à la "résistance" contre Macron

reuters.com  |   |  858  mots
La france insoumise defile a paris[reuters.com]
(Crédits : Philippe Wojazer)

par Arthur Connan et Cyril Camu

PARIS (Reuters) - Entre 30.000 et 150.000 personnes ont manifesté samedi à Paris à l'appel de Jean-Luc Mélenchon contre le "coup d'Etat social" d'Emmanuel Macron, contre lequel le président de La France insoumise a appelé à une résistance populaire massive.

"La bataille n'est pas finie, elle commence", a-t-il dit sur une estrade place de la République, après un défilé qui, selon la préfecture de police, s'est déroulé sans incident notable.

"On en a déjà connu d'autres qui se disaient droits dans leurs bottes et à qui on a fini par les retirer", a-t-il ajouté avant de marteler trois fois : "Mettez-vous en mouvement".

Jean-Luc Mélenchon a affirmé sur Twitter que les manifestants étaient 150.000 mais, selon une source policière, ils n'étaient que 30.000 dans les rues de la capitale.

Le mouvement espérait une mobilisation "massive", deux jours après une manifestation en demi-teinte à l'initiative de la CGT et d'autres syndicats, afin de relancer la contestation sociale contre la majorité, avant d'autres journées de grève prévues dans les prochaines semaines dans les transports et les raffineries. Fonctionnaires et retraités doivent aussi défiler.

Jean-Luc Mélenchon a appelé les Français à se retrouver une nouvelle fois dans la rue samedi prochain dans tout le pays avec des casseroles pour empêcher le gouvernement de "dormir".

Pour mesurer le succès de la manifestation, les analystes auront à l'esprit le rassemblement du 18 mars dernier qui, en pleine campagne présidentielle, avait vu Paris être envahi par 130.000 sympathisants de LFI selon les organisateurs. Mais la police n'avait à l'époque pas donné de chiffres.

ÉLOGE DE LA RUE

Emmanuel Macron a été la cible quasi unique de la foule, qui criait "Résistance", "Dégagez" et "Macron, t'es foutu, les fainéants sont dans la rue" en référence au terme utilisé par le président français pour critiquer ceux qui refusent ses réformes sociales comme celle du Code du Travail.

"Personne n'avait jamais parlé au peuple français de cette façon. Ni les rois, ni les gouvernements engagés dans la confrontation la plus dure avec le peuple, n'avaient traité les Français de fainéants, de cyniques, de névrosés, d'emmerdeurs, d'abrutis", a-t-il déclaré.

Il a aussi fustigé les propos présidentiels, tenus sur CNN, selon lesquels la démocratie n'était "pas dans les rues".

"M. le Président, il vous reste à consulter l'Histoire de France pour apprendre que c'est la rue qui a abattu les rois. C'est la rue qui a abattu les nazis. C'est la rue qui a protégé la République contre les généraux félons en 1962", a-t-il estimé en faisant la litanie de toutes les conquêtes sociales obtenues grâce à des manifestations populaires.

Les ordonnances, signées vendredi par Emmanuel Macron et publiées samedi au Journal officiel, ont fait l'objet des critiques les plus virulentes.

"C'est un coup d'Etat social par la méthode de la brutalité", a lancé Jean-Luc Mélenchon, selon qui le contrat de travail ne serait qu'"une sorte de chiffon de papier" si la réforme voulue par le président français était mise en oeuvre.

Le candidat socialiste à la présidentielle de 2017, Benoît Hamon, a abondé dans le même sens dans le cortège.

"La mobilisation va se poursuivre. Dans la fonction publique, dans différents secteurs, la mobilisation s'organise. Les syndicats qui n'avaient pas appelé à manifester commencent à le faire par branche", a-t-il estimé.

LA CHIENLIT LIBÉRALE

Mais c'est toute la politique de la majorité qui a subi les attaques du leader de La France insoumise.

"Dans le fond, ce que vous voyez, c'est la chienlit libérale", a-t-il dit.

"Ces gens détruisent tout ce que nous avons construit", a-t-il ajouté en parlant du "saccage" de l'éducation nationale, du logement social, des retraites et des hôpitaux.

Dans le cortège, les participants de tous âges estimaient que la mobilisation pourrait changer la donne.

"Quand ça commence comme ça, c'est déjà gagné", a dit à Reuters Chantal Quillot, retraitée de 64 ans, venue d'Agen (Lot-et-Garonne) dans l'un des 120 bus affrétés par le mouvement pour acheminer ses militants.

Bien que la CGT ait annoncé qu'elle ne participerait pas au défilé, de nombreux drapeaux de la centrale de Montreuil étaient agités dans le cortège.

En plus du soutien de l'ancien candidat socialiste à la présidentielle, La France insoumise a pu compter sur le soutien - non prévu - d'une délégation du Parti communiste.

Cette union "est à construire, elle est à consolider. Il faut lui donner des objectifs de conquête", a ainsi estimé le secrétaire national du PCF, Pierre Laurent.

"On est très inquiets pour l'avenir de l'emploi en France. Le modèle de Macron c'est toujours plus de précarité, ça va devenir comme en Allemagne ou en Angleterre", a déploré Sylvie Plantier, principale de collège de 60 ans qui arbore une pancarte "Sois précaire et tais-toi".

(Avec Johnny Cotton, Ingrid Melander et Dominique Vidalon, édité par Yves Clarisse)