Un eG8 Forum pour séduire le gratin mondial du Web

Croissance, droits d'auteur, innovation sont au menu de cette manifestation, qui s'ouvre mardi à Paris, organisée en amont du G8 de Deauville. Nicolas Sarkozy va tenter de faire oublier ses velléités de régulation de la Toile.
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Eric Schmidt (Google), Mark Zuckerberg (Facebook), Jeff Bezos (Amazon), Andrew Mason (Groupon) ou Yuri Milner (Mail.ru) : Nicolas Sarkozy, désireux de redorer son blason numérique, a tout fait pour qu'un maximum de stars de l'Internet soient présentes à Paris mardi et mercredi à l'eG8 Forum, deux jours de conférences consacrés à l'Internet. Sous une tente montée dans le jardin des Tuileries, 1.100 personnalités et 200 journalistes sont attendus. Croissance, innovation, propriété intellectuelle, éducation : d'emblématiques patrons des géants numériques, des professeurs d'universités, des sociologues et des journalistes débattront des grandes problématiques du Net. L'idée : nourrir les réflexions du G8, qui se réunit les 26 et 27 mai à Deauville, où les chefs d'État consacreront le jeudi après-midi une heure à Internet.

Initiative d'apparence publique - c'est le président de la République qui invite - le forum est une affaire privée. Maurice Lévy, PDG de Publicis, proche du chef de l'État, a été mandaté pour piloter l'organisation de l'événement et trouver les sponsors. Justification officielle de cet attelage inhabituel : selon l'Élysée, il garantit aux intervenants indépendance et liberté de parole vis-à-vis du pouvoir politique. « L'État n'a pas à s'en mêler », expliquait récemment à « La Tribune », Maurice Lévy. En réalité, l'agenda et les thèmes abordés ont été largement décidés par l'Élysée, en vue de la discussion de Deauville. Si Publicis affirme que les intervenants ont été choisis pour leur compétence, le statut de sponsor donne quelque privilège. En qualité de « cochairman » (coprésident) de l'événement, les représentants des entreprises ont la garantie d'avoir une très belle visibilité sur scène et une forte implication dans les discussions. Ainsi, le forum se conclut par une réunion de synthèse animée par le président de l'événement, Maurice Lévy. Sur les 18 « cochairmen », qui définiront le message porté aux chefs d'État à Deauville jeudi après-midi, 12 d'entre eux financent l'eG8, qu'il s'agisse de Stéphane Richard (Orange), Jean-Bernard Lévy (Vivendi), Craig Mundie (Microsoft), Michel de Rosen (Eutelsat), Xavier Niel (Iliad-Free) ou Yafang Sun (Huawei).

L'Élysée a choisi de montrer l'Internet et le numérique sous un jour très favorable. Dans la foulée de l'intervention de Nicolas Sarkozy mardi matin, la première table ronde, où débattront notamment Jean-Bernard Lévy (Vivendi), Eric Schmidt (Google), Ben Verwaayen (Alcatel-Lucent), ou Sunil Mittal (l'indien Bharti Airtel), est consacrée à l'impact d'Internet sur la croissance. L'Élysée a demandé au cabinet de conseil McKinsey d'étendre à 13 pays (le G8, la Chine, l'Inde, le Brésil, la Corée du Sud et la Suède) « Internet et la croissance », étude présentée en mars par le ministre de l'Industrie et de l'Économie numérique, Éric Besson. Cette fois encore, les conclusions des consultants sont évidemment très positives : Internet aurait contribué pour 21 % à la croissance du produit intérieur brut (PIB) dans les pays les plus industrialisés (lire ci-contre). Pour le chef de l'État, il s'agit surtout de faire oublier l'expression d'« Internet civilisé », à la tonalité policière, ou la loi antipiratage Hadopi, autant d'initiatives faisant apparaître Nicolas Sarkozy comme le pourfendeur de l'Internet.

Quelle position de principe adopteront les chefs d'État au G8 ? À l'Élysée, on souhaite qu'un message de soutien à Internet soit formulé. Actualité du monde arabe oblige, l'impact de la Toile sur les libertés individuelles devrait faire partie des thèmes majeurs qui seront abordés. Pourtant, juste avant les révolutions au Moyen-Orient, Nicolas Sarkozy avait refusé à Bernard Kouchner, alors ministre des Affaires étrangères, la tenue d'un colloque sur la liberté d'expression, a rappelé l'hebdomadaire « Marianne ». Si dans les échanges diplomatiques, la thématique de la liberté semblait faire consensus, encore faut-il savoir si le G8 s'accordera sur des propositions fermes. D'autres sujets faisaient divergence, à commencer par la Net neutralité - le débat sur le financement des réseaux face à l'explosion des usages de la vidéo - ou la protection des droits d'auteur ou des données personnelles.

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