"Les plus inventifs sont ceux qui ne possèdent pas de voiture"

Entretien avec Ludovic Bu, auteur de Les transports, la planète et le citoyen - Éditions Rue de l'Échiquier, 2010), fondateur de Voiture & Co
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Quelles nouvelles tendances observez-vous en matière de mobilité??
Je suis frappé par un phénomène générationnel très prononcé?: les jeunes, qu'ils vivent en ville ou à la campagne, passent leur permis de conduire et achètent leur première voiture de plus en plus tard. Ils font la distinction entre posséder une voiture et en avoir l'usage, et veulent pouvoir se déplacer sans voiture. C'est un changement culturel très fort, et le gouvernement, en proposant le permis à un euro pour aider les jeunes à trouver du travail, fait fausse route. Si les jeunes souffrent du chômage, c'est davantage par manque d'information que faute de pouvoir se déplacer.

Pourtant, une étude parue en septembre 2011 indiquait que 67 % des Français n'étaient pas prêts à renoncer à leur voiture. Pourquoi cette résistance à changer de comportement??
Là encore, c'est un manque d'information. La voiture est tellement facile, il suffit d'indiquer au GPS la destination. À côté, tous les autres modes paraissent compliqués. Il faut donc expliquer qu'il existe des alternatives et qu'elles fonctionnent. Et quand on sait qu'en ville, un déplacement sur deux fait moins d'un kilomètre, l'alternative, bien souvent, c'est la marche à pied. En matière de déplacement, les individus les plus inventifs sont ceux qui ne possèdent pas de voiture?: ils savent où chercher l'information, parce qu'ils en ont un besoin vital.

Comment améliorer l'information??
Avec des humains, des hotlines, des accueils physiques, de la transmission orale, des applications pour les téléphones portables. Les nouveaux acteurs de la mobilité comme Google et IBM sont en train de poser les bases pour proposer des outils qui permettent l'usage, et pas la possession. En cartographiant à tout va, Google, par exemple, complète son offre des moyens de transport disponibles afin de gérer l'ensemble de la chaîne du déplacement.

Ces projets, y compris les start-up qui se multiplient autour du covoiturage et de l'autopartage, peuvent-ils devenir rentables??
Je ne pense pas, mais pour les opérateurs, ce qui compte, c'est l'offre globale. Si la SNCF, Total ou Peugeot veulent proposer des voitures en usage partout sur le territoire, le dernier kilomètre en autopartage leur permet d'offrir un service de déplacement totalement intégré. Ils ne feront sans doute pas de marge sur ce dernier service, mais sur l'ensemble de leur offre.

Les alternatives à la voiture sont-elles suffisantes??
Elles sont méconnues, ou victimes de préjugés?: les bus seraient en grève, et le vélo, dangereux. Pour les améliorer, il suffit souvent d'optimiser l'existant?: refaire ou élargir des trottoirs, rendre les lieux d'intermodalité plus fonctionnels, détourner une ligne de bus pour affiner une desserte, développer la signalisation. À Paris, 54 % des déplacements se font à pied, c'est le mode de déplacement dominant?: cela devrait se refléter dans les investissements.

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