Assurance chômage : les vraies raisons du déficit

La négociation sur l'assurance chômage entre le patronat et les syndicats reprend ce 7 mars. Les comptes du régime montrent que c'est l’indemnisation des contrats courts qui plombe le régime.
Jean-Christophe Chanut
L'assurance chômage verse chaque année 10% de la collecte des cotisations, soit environ 3,2 milliards d'euros, à Pôle emploi. Sans ce versement, l'Unedic serait quasi à l'équilibre... C'est l'un des sujets que devraient aborder les organisations patronales et syndicales lors de la nouvelle négociation sur l'assurance chômage.

C'est reparti pour une nouvelle négociation sur l'assurance chômage, neuf mois après l'échec de la précédente. Les organisations patronales et syndicales se retrouvent en effet ce 7 mars pour un premier « vrai » rendez-vous. Leur objectif est de boucler la négociation pour le 28 mars. Un calendrier très serré et qui ne semble pas très réaliste. Mais, aux yeux des gestionnaires de l'assurance chômage, l'important est de montrer qu'ils savent prendre leurs responsabilités alors que certains candidats à la présidentielle évoquent ouvertement une « nationalisation » de l'assurance chômage, laquelle passerait donc sous la tutelle de l'Etat. C'est surtout le cas d'Emmanuel Macron.

On connaît les données du problème. L'Unedic, accuse actuellement un déficit annuel d'environ 4 milliards d'euros et « traîne » une dette cumulée de 30 milliards d'euros. Heureusement que l'organisme bénéficie de la garantie de l'Etat pour pouvoir emprunter sur le marché obligataire à taux bas, sinon les allocations chômage auraient bien du mal à être versées.

L'épineuse question des contrats courts

Les organisations patronales cherchent donc des économies alors que les organisations syndicales sont davantage à la recherche de nouvelles recettes. C'est là que se pose la très épineuse question d'une « surtaxation » des contrats courts qui a provoqué l'échec de la précédente négociation en juin 2016. L'explosion des contrats courts depuis quinze ans -et notamment des CDD très courts, de moins d'un mois- est en effet la principale cause des difficultés financières de l'assurance chômage.

Les organisations syndicales proposent donc toutes, mais sous des formes variées, de davantage faire cotiser à l'assurance chômage les entreprises qui « abusent » de ces contrats courts. Jusqu'ici, le Medef mettait son véto à un tel projet. Puis, dernièrement, à la suite de discussions internes à l'organisation patronale, il a fait une très timide ouverture dans le projet d'accord envoyé aux syndicats. Le Medef propose de renvoyer le sujet de la surtaxation à une autre négociation dans les secteurs les plus concernés par les CDD très courts (hôtellerie-restauration, arts et spectacles, édition et audiovisuel...), évoquant des "incitations d'ordre juridique et économique" permettant d'en modérer l'usage "lorsque cela est possible". Pour les syndicats, bien entendu, cela est nettement insuffisant. Ils demandent tous des engagements précis et chiffrés au niveau interprofessionnel.

Pour les seuls CDI, le solde est positif : de 10 milliards !

A la lecture des données fournies par l'Unedic, on comprend combien la question des contrats courts est centrale. La moitié des chômeurs indemnisés a perdu un emploi à durée limité : les fins de CDD représentant 39% des inscrits et les fins de missions d'intérim 11%. Et preuve qu'il s'agit surtout de contrats très courts, 41% des personnes indemnisées après une fin de CDD ont moins d'un an d'indemnisation. Pour l'intérim, elles sont 57%.

Les données financières sont également très parlantes. En 2015, la différence entre allocations versées et contributions perçues par l'Unedic pour les CDI est... positive : il y a eu 18,892 milliards d'euros versés en allocations pour 29,28 milliards d'euros de cotisations perçues, soit un solde positif de 10,39 milliards. A l'inverse, pour les CDD, 8,88 milliards d'allocations ont été versées, alors que seulement 2,66 milliards ont été perçus, soit un trou de 6,22 milliards d'euros. Ou, dit autrement, un ratio négatif de 3,3... Et le même constat prévaut pour l'intérim qui enregistre un solde négatif de 1,78 milliard d'euros.

L'origine du problème est donc parfaitement diagnostiqué... reste à trouver un consensus sur le remède.

Le financement de Pôle emploi par l'Unedic en question

Un autre point est rarement évoqué, même si certaines voix syndicales (voire aussi patronales) commencent à l'évoquer : le niveau de financement de Pôle emploi par l'assurance chômage. En effet, depuis la création de Pôle emploi en 2008, il a été convenu par convention que l'Unedic devait lui verser chaque année une dotation représentant 10% des cotisations, pour son fonctionnement, sur le fondement de la reprise par Pôle emploi des missions des Assedic. Résultat, l'Unedic verse 3,2 milliards chaque année pour le financement de Pôle emploi soit... 64% de son budget annuel et quasi le déficit annuel de l'Unedic. Neuf ans après, on peut, à juste titre, se poser la question de savoir si un tel montant de participation au financement de Pôle emploi continue de se justifier et s'il ne faudrait pas tenir compte de la situation financière de l'Unedic pour calculer sa quote-part.

Autant de questions primordiales - et nettement moins électoralistes que le débat sur le retour à la dégressivité des allocations - qui méritent d'être abordées par les partenaires sociaux. Mais avec un calendrier aussi serré - s'il est respecté -, il va être difficile d'aller au fond des choses.

Jean-Christophe Chanut
Commentaires 21
à écrit le 08/03/2017 à 14:11
Signaler
Deux raisons : Le contexte économique, auquel il faudra bien s’adapter en termes de disparition progressive des emplois à vie et de 10 % du travail tout court, d’après l’OCDE, en raison de l’automatisation. (http://www.latribune.fr/economie/france/2...

à écrit le 08/03/2017 à 11:46
Signaler
C'est le problème de la gestion des caisses de retraites qui peuvent être grandement comparée à celle de pôle emploi. C'est une habitude chez nous dans toutes les délégations de gestion où beaucoup d'argent ce paire dans les circuits inconnus .

à écrit le 08/03/2017 à 7:14
Signaler
Bon il me semble avoir entendu des individus qui achete des droits à prestations.... Sans cotisations bien entendu.... Donc ils y a bien longtemps que l'on aurait dû regarder ou part nôtre argents, 30 milliards de dettes.... Et tous vas bien a dit no...

le 08/03/2017 à 9:37
Signaler
vous les avez entendu (de vive voix), ou entendu dire qu'il y en avait (?légende?) ? Ils procèdent comment ? Se recréent des cotisations, années de travail et salaire ? Acheter des trimestres, pour le calcul de la retraite, on peut faire, mais c'est ...

à écrit le 07/03/2017 à 22:10
Signaler
la suppression d'emplois, la délocalisation massive, la robotisation a outrance et la fin de la consommation active faute de moyens suffisant qui tuent les créateurs d'entreprise. voilà pour moi les causes a l'origine de ça ! sans parler de l'egoisme...

à écrit le 07/03/2017 à 21:55
Signaler
"dégressivité des allocations" parait que ça existe en Suède, où ils ont 80% de leur salaire avant chômage (nous 57%). Quand ça a été testé en France, le résultat n'a pas été concluant, voire à effet contraire. La formation (ciblée), c'est pas utile ...

à écrit le 07/03/2017 à 18:09
Signaler
Pourquoi vous cachez une des vrais raisons LES INTERMITTANTS DU SPECTACLE !!! fermons ces écoles pour chomeurs pro .LA culture est un loisir ??? ALORS que le tourisme par exemple ne peut se passer de cdd,voir aussi les hôpitaux etc

le 07/03/2017 à 19:24
Signaler
Personne n'a jamais osé le faire...

le 08/03/2017 à 9:04
Signaler
"fermons ces écoles pour chomeurs pro " Il faudra le dire aux employeurs qui les utilisent car apparemment cela leur convient .

à écrit le 07/03/2017 à 17:53
Signaler
evidemment que les cdi ne coutent rien! la france est un modele insiders outsiders, toute la flexibilite est portee par ceux qui ne sont pas dedans.......... demandez a cahuc! pour le reste je crois que les intermittents du travail, qui s'usent a l...

à écrit le 07/03/2017 à 17:34
Signaler
Le système ne marche déjà pas et Macron veut supprimer les 0.40 % que les salariés payent pour être assurés au chômage. Il veut en contrepartie faire payer les retraités en augmentant la CSG de 1.7 %. Retraités qui n'ont pas eu de revalorisation des ...

le 07/03/2017 à 18:04
Signaler
C est sur que les salaries ont eux vu leurs salaires flamber ces dernieres annees. Faire payer un peu les retraites qui ont un niveau de vie superieur aux actifs est quand meme pas demander la lune. Surtout que si on est aujourd hui dans une situati...

à écrit le 07/03/2017 à 17:01
Signaler
Environ 1/3 des allocations chômage concernent les CDD et intérimaires avec un ratio de 3,3 entre cotisations et allocations versées (-6,2 mds € de déficit) ! C'est bien la socialisation des coûts de la flexibilité qui est à l'origine du déficit.

à écrit le 07/03/2017 à 16:05
Signaler
c'est le travail au black qui fait plonger les Assedic soit parce les salariés ne sont pas déclarés et donc pas de cotisations soit parce ce sont les patrons qui ne payent pas , voir les polonais, serbes, roumains ,bulgares et tous les migrants : al...

à écrit le 07/03/2017 à 16:00
Signaler
Bien entendu et c'est ceux là que tous nos candidats veulent développer parce que profitant à la finance. Individualisation des gains, sociabilisation des pertes.

à écrit le 07/03/2017 à 15:59
Signaler
Pardon, j'ai voulu dire: une taxe sur "l'énergie" pour financer le chomage et les retraites.

le 07/03/2017 à 16:42
Signaler
Gépé, Niet et encore Niet ! Pas d'impôt pour financer les retraites qui sont par répartition. On en est déjà à 14% du PIB systèmes publics et privés confondus alloués aux retraites en France, contre un peu plus de 10% pour les allemands qui ont pour...

le 08/03/2017 à 7:40
Signaler
Cher Léo RB, merci pour votre réponse. Si cela vous gêne, appelons les cotisations de retraites "prélèvements" et non "impot". Ensuite, la répartition concerne la répartition de l'ensemble des richesses et non la répartition des prélèvements. C'est u...

à écrit le 07/03/2017 à 15:54
Signaler
Dans le chomage , on compte le temps de travail libéré par les gains de productivité lié à l'usage de l'énergie. Ce temps de travail libéré doit être rémunéré par une participation de l'énergie (une taxe sur le travail pour financer le chomage et le...

à écrit le 07/03/2017 à 15:25
Signaler
"depuis la création de Pôle emploi en 2008" Souvenir de 2008 : Le chômage grimpe, mais le salaire du haut fonctionnaire chargé de le combattre grimpe aussi. Selon le Canard Enchaîné, Christian Charpy, passé du poste de directeur général de l'AN...

le 12/03/2017 à 15:15
Signaler
il y a du nettoyage a faire en haut , dans beaucoup de domaines et en premier au gouvernement .

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.