Climat social : jusqu'où ira la tension française ?

La dernière note de conjoncture sociale réalisée par l'association Entreprise & Personnel ne table pas sur une explosion sociale en France mais pronostique une forte montée des tensions catégorielles et locales.
Jean-Christophe Chanut
A l'image des taxis en 2015, les tensions catégorielles pourraient fortement s'accentuer en 2016

Ça se tend mais ça ne va pas forcément exploser au niveau national. En revanche, les conflits locaux pourraient se multiplier. C'est, en substance, ce qui caractérise le climat social actuel, selon la dernière note de conjoncture sociale réalisée chaque année par Entreprise & Personnel (E&P), une association qui regroupe plus d'une centaine de dirigeants d'entreprises afin d'échanger sur les problématiques liées aux ressources humaines et aux relations du travail.


La montée des tensions au sein de la société

Selon E&P donc, cette fin d'année 2015 est marquée par une montée des « tensions » alors que la situation économique peine à se décanter. Et ces tensions sont partout. Tensions politiques à gauche dans la perspective des élections régionales qui s'annoncent très difficiles... Sans oublier l'élection présidentielle qui apparaît déjà en point de mire. Tensions croissantes également au sein du monde syndical « avec un fossé croissant entre acteurs des réformes et opposants ». A cet égard, le récent accord sur les retraites complémentaires a en effet montré ce clivage. Mais tensions également dans l'opinion, après les évènements d'Air France et le débat qui s'est instauré sur « la violence réelle est la violence symbolique ». Tensions enfin dans le débat intellectuel avec le phénomène des « néo réac ».

E&P constate aussi une certaine radicalisation dans le domaine social, avec des camps "qui ont durci leurs discours". Ainsi, plusieurs thème apparaissent totalement clivants : « pour ou contre le Code du travail, pour ou contre une décentralisation du dialogue social, échec ou réussite du dialogue social à la française, régression sociale ou nouveaux droits, etc. ».

La flexibilité du travail à la française existe déjà

A cet égard, E&P semble s'étonner de la focalisation des débats sur le faux problème du droit du travail dont la complexité jouerait contre l'emploi. Pour ces professionnels des relations sociales, pas vraiment connus pour leur « gauchisme », « la flexibilité à la française existe » déjà : encadrement des licenciements, « barèmisation » des indemnités prud'homales, rupture conventionnelle du contrat de travail, recours amplifiés aux CDD et à l'intérim, etc.

Pour E&P : « Difficile d'aller plus loin sans se rapprocher d'un système à l'américaine (liberté de se libérer à tout moment d'un collaborateur) mais où le contrat social implicite repose sur une croissance priorisée et donc la possibilité elle aussi rapide de retrouver un emploi ».

Vers davantage de conflits locaux et catégoriels

Mais la question centrale que pose la note d'E&P est de savoir s'il y a un risque d'explosion sociale en France ? Les évènements d'Air France seraient-ils précurseurs de cette déflagration ? Les analystes d'E&P, à la lumière de leurs nombreuses interventions en entreprises n'y croient pas trop. Ils continuent de penser que "c'est lors des élections que le mécontentement s'exprimera" et non pas dans la rue. D'ailleurs, la note d'E&P estime qu'il est peu réducteur de parler d'un seul « climat social ». En fait, il y aurait différentes réalités à différents niveaux.

Ainsi, au niveau interprofessionnel, les mouvements sociaux sont quasi anecdotiques. Les journées d'action organisées par les confédérations syndicales ne remportent aucun succès. Toujours au niveau national, en revanche, les mouvements catégoriels se multiplient. Les mobilisations successives  des taxis, des paysans, des avocats, des policiers etc. pont payé. A chaque fois, le gouvernement a, en toute ou partie, reculé, ne voulant prendre aucun risque d'une déflagration sociale.

E&P s'attend aussi à de vives tensions dans le secteur public aux prises avec la nécessité de se restructurer. Il y a eu Radio France, puis Air France. Demain se sera peut-être le tour de la SNCF et de La Poste. Mais les experts d'E&P croient davantage « à des conflits éclatés sur le territoire autour le plus souvent de petites structures ».

Au niveau des entreprises privées, E&P perçoit un certain retour de la conflictualité, notamment sur la question des salaires. Selon la note, le « pilotage de la négociation annuelle obligatoire (NAO) 2016 sur les salaires va être délicat », tant les salariés ont le sentiment d'avoir perdu en pouvoir d'achat. Des conflits locaux sont donc très fortement envisagés.

Pas de déflagration nationale

En résumé, selon E&P, « Il semble que cette année 2015 marque un basculement progressif de la résignation vers des mobilisations, certes indépendantes les unes aux autres, chacune sur ses objectifs, mais nourries en arrière plan par un cran de plus dans le rejet de la politique gouvernementale par une fraction militante du mouvement syndical ».

Et d'ajouter :


"La politique menée aujourd'hui est comprise par une partie du salariat comme excessivement favorable aux entreprises, déséquilibrée, autrement dit « de droite ». Les sorties du ministre de l'Economie, la volonté du Premier ministre d'affirmer une posture d'autorité avec des mots forts sont exploitées et perçues comme autant de provocations".

Mais rien « n'explosera » sur la scène nationale car, selon la note, « ni la CGT, ni l'extrême gauche, ni FO ne sont capables d'organiser des mobilisations massives ».
En revanche, donc, les « colères » catégorielles risquent de se multiplier.

Jean-Christophe Chanut
Commentaires 19
à écrit le 12/11/2015 à 20:35
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Avec les 4 salariés d'Air France licenciés ce jour, 12 novembre 2015, il pourrait bien y avoir une explosion soudaine !! Je ne cache pas que je soutiendrai....... en souvenir de la liquidation de l'usine dans laquelle je travaillais, et qui m'a jeté...

à écrit le 04/11/2015 à 21:16
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Climat social : jusqu'où ira la tension française ? La tension en France va aller jusqu'à une révolution soudaine, massive, cette révolution va devenir un moment de vérité pour les traitres politiciens avec leurs intimes dirigeants cadres des ...

le 05/11/2015 à 8:26
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Le syndicats, comme vous le dénoncez si bien, sont depuis environ 4 décennies les "zélés serviteurs" des "politicards au pouvoir" et, à travers ceux-ci, des "voyous de la finance". Les politicards ont mis en place un "système mafieux" qui a très b...

à écrit le 04/11/2015 à 18:49
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Il va falloir attendre 2017 pour qu'il y ai a nouveau des grèves général de possible. Les syndicats affiliés au Parti Socialiste ne vont pas mordre la main qui les nourris. Il faut juste attendre que le PS perde le pouvoir. D'un autre coté, si la ...

à écrit le 04/11/2015 à 14:33
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Le problème avec la fuite en avant de l'assistanat et de la redistribution clienteliste, c'est qu'il ne produit plus ses effets : les personnes gavées de subvention, d'allocs, d'emplois aidés, exonérés de cotisation subventionnés etc pensent que l...

à écrit le 04/11/2015 à 13:54
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jusqu'au débordement ... il faut une COP21 de la fonction publique , là est le salut !

à écrit le 04/11/2015 à 13:10
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Continuons et vous verrez bien.

à écrit le 04/11/2015 à 12:31
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Les Syndicats représentent 7% des Actifs, et décident avec les gouvernements pour 93%. La C.G.T Communise dirige Les prudhommes, où vont voter 15% des salariés. Normal, qu'un employeur n'emploie pas en C.D.D, il perd toujours aux prudhommes. C'est un...

le 04/11/2015 à 14:39
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"La C.G.T Communise dirige Les prudhommes" Le conseil de prud'hommes est une formation paritaire élue en deux collèges : par les salariés, d'une part, et par les employeurs, d'autre part. Chaque « collège » (employeurs et salariés inscrits sur le...

le 04/11/2015 à 14:53
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"Normal, qu'un employeur n'emploie pas en C.D.D, il perd toujours aux prudhommes". Je comprends mieux pourquoi, le patronat veut faire maigrir le code pour ... gagner .80% des litiges aux prud'hommes sont liés à de non versement de salaire par l'...

à écrit le 04/11/2015 à 12:04
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la repartition des richesses par les reformes du gouvernement commence a se voir; sauf pour ceux qui paye un peux plus et qui rale un peux plus,; mais il arrivent maintenent a rectifier les mauvaisses desitions: c est le signe qu il commence a etre ...

à écrit le 04/11/2015 à 10:19
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Note qui ne sert à rien. Tout comme les prévisions économiques. Se souvenir que le feu aux poudres commence toujours par une étincelle.

à écrit le 04/11/2015 à 10:09
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situation qui me parait normal, après pas loin de 10 ans de crise et d'augmentations d'impôts. Historiquement on râle plus quand la croissance frémit car on veut toucher des augmentations et pas qu'en France, mais partout. A ce sujet, on peut observe...

à écrit le 04/11/2015 à 9:03
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La situation de la France est catastrophique car la paix sociale y repose sur le mensonge et l'argent public. Ce dernier se faisant rare, il ne reste que le mensonge mis subitement au jour. Ce pays socialiste souffrira beaucoup et finira colonisé par...

à écrit le 04/11/2015 à 8:32
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Article pas très sérieux Reprendre une obscure association pour nous dire que la flexisecurite est déjà en place en France c'est ridicule Prenons l exemple d un artisan qui n a pas gagné un sous depuis 5 ans si il veux licencier 3 salariés il faud...

le 04/11/2015 à 10:16
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@Pierre Si votre artisan ne gagne pas un euro depuis 5 ans, il faut qui vire son expert comptable et s'il n'en a pas, ou parce qu'il n'a pas les moyens de le payer, c'est que son entreprise est mal gérée et n'est pas viable. Rester artisan avec des...

le 04/11/2015 à 10:46
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si tu prends pas un sou pendant 5 ans (enfin officiellement hein), la société doit pas être florissante...En ce cas le licenciement économique ça existe depuis longtemps... La rupture conventionnelle aussi mais c'est plus récent et encore plus pratiq...

le 04/11/2015 à 12:58
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Vous ne devez pas être à votre compte mes chers lecteurs Consulter dès spécialistes ils vous diront que pour licencier meme avec des deficits on y laisse un bras et ça dure des mois Pour moi ça roule très bien ..

le 04/11/2015 à 13:43
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entrepreneur depuis 2008, 6 salariés en CDI....pas eu à faire de licenciement économique parfois interrompu des CDI en période d 'essai, employé en CDD régulièrement, pris des intérimaires, parfois des sous traitants, des apprentis, des stagiaires e...

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