Déficit public : la Cour des comptes ne croit pas au miracle

Pour les magistrats de la rue Cambon, la marche est trop haute à gravir : l'objectif de 2,7% de déficit que s'est fixé le gouvernement est "très improbable".
Mathias Thépot
Selon les magistrats de la rue Cambon, l'objectif de réduire le déficit public à 2,7 % du PIB cette année sera difficile à atteindre.

Pour tordre le cou aux idées reçues sur l'incapacité de la gauche à gérer efficacement les dépenses publiques, l'exécutif n'a eu de cesse, au cours du quinquennat, d'afficher sa volonté de redresser les comptes de la Nation. De fait, à l'exception d'une stabilisation entre 2013 et 2014, le déficit a constamment reculé durant le quinquennat : alors qu'il s'élevait à 5.2 % du PIB en 2011, il devrait reculer à 3,3 % du PIB en 2016. Lors de la dernière année du quinquennat, il tomberait même à 2,7 % du PIB, sous la barre des 3% instaurée par le traité de Maastricht, selon le gouvernement. Mais la Cour des comptes en doute fortement. Pour les magistrats de la rue Cambon, la marche semble trop haute à gravir pour les finances publiques. Comme en 2016, notamment, ils doutent de la capacité du gouvernement à tenir ses objectifs.

Prévision de croissance optimiste et... fin des taux d'intérêt bas

Plusieurs explications sont avancées par la Cour dans son rapport annuel présenté ce mercredi à la presse. D'abord, elle réfute l'hypothèse du gouvernement qui repose sur une prévision de croissance économique jugée un peu élevée par le Haut conseil des finances publiques (HCFP). Le gouvernement ayant prévu pour 2017 une croissance de 1,5% du PIB, supérieure de 0,2 point aux prévisions de la Banque de France ou de l'OCDE. Le Premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, a ainsi rappelé que le HCFP, qu'il préside également, estime qu'un déficit public de 2,7% en 2017 est « improbable » et qu'un un déficit de 3% serait même « incertain ».

Aucune économie structurelle dans le PLF 2017

 Ensuite, la Cour avance que les finances publiques ne bénéficieront plus de la baisse des taux d'intérêt, comme cela a été le cas ces dernières années, et à « laquelle est due 40% de la réduction du déficit public intervenue depuis 2011 », rappelle Didier Migaud. « Le potentiel de baisse supplémentaire de la charge d'intérêts est aujourd'hui limité et le risque qu'elle remonte à un horizon de moyen terme n'est, à l'inverse, pas négligeable », ajoute le rapport de la Cour.

Enfin, les magistrats ont noté que « le projet de loi de finances 2017 n'était porteur d'aucune économie structurelle. Au contraire, les seules mesures prises ayant un impact au-delà de 2017 devraient accroître les dépenses ».

Les économies sur le front du chômage restent improbables

L'institution cible notamment les dépenses d'indemnisation du chômage, qui sont attendues en recul de 3,9% cette année, grâce à la baisse du chômage mais aussi à la renégociation de la convention Unedic engagée début 2016 entre les syndicats et le patronat, et sur laquelle Bercy compte afin d'économiser 1,6 milliard d'euros. Mais la Cour des comptes n'y croit pas car les négociations seraient au point mort « et il paraît peu probable qu'elles reprennent avant l'été ou que des mesures unilatérales du gouvernement interviennent avant cette date », prévient la Cour, qui estime aussi que l'amélioration du marché du travail pourrait être moins nette que prévu.

Réponse cinglante du ministère de l'Economie : « S'agissant des mesures d'économies attendues de la prochaine convention sur l'assurance chômage, la Cour se méprend quand elle en conteste la vraisemblance : il est inexact de dire que les discussions entre les partenaires sociaux sont interrompues puisque celles-ci ont repris depuis mi-décembre, ouvrant la possibilité d'aboutir à un accord dans les prochaines semaines. »

Les réfutations de Bercy

Une fois de plus, donc, Bercy goûte peu les constats de la Cour des comptes. Dans leur réponse commune, le ministre de l'Economie et des finances Michel Sapin et le secrétaire d'Etat chargé du Budget Christian Eckert ont ainsi fustigé les arguments des magistrats sur le déficit : « S'agissant de 2017, le Gouvernement s'est attaché à construire le budget sur des hypothèses solides, comme l'a reconnu la Commission européenne, ce qui permettra à la France de sortir enfin de la procédure pour déficit public excessif dans laquelle elle se trouve depuis 2009. La loi de finances pour 2017 ne présente aucune sous-estimation manifeste, comme l'a d'ailleurs souligné le Conseil constitutionnel ».

La Cour joue les pères fouettards et lance un avertissement

La Cour des comptes aime, il faut dire, jouer les pères fouettards avec le gouvernement. Garante des deniers publics, elle n'hésite pas à tempérer l'ardeur des dirigeants politiques qui se félicitent de leur action. Par exemple, Didier Migaud n'a pas hésité a rappelé lors de la présentation du rapport que « la France est avec l'Espagne, le Portugal et la Grèce, l'un des quatre pays de la zone euro à être encore placés en procédure de déficit excessif », ou qu'en matière de dépenses publiques, « il apparaît que les efforts de modération de la dépense effectués depuis 2010 dans notre pays ont été moins importants que dans le reste de la zone Euro ».

Ainsi, à quelques mois de l'élection présidentielle, la Cour prévient : « Le niveau particulièrement élevé des dépenses publiques en France est loin de conduire à des résultats à la hauteur des moyens engagés ». Et d'ajouter que « les pouvoirs publics devront donc s'attacher résolument dans les années à venir à améliorer l'efficience de la dépense publique et, pour ce faire, effectuer des choix explicites », avec « un meilleur ciblage des politiques d'intervention ». Une manière de prévenir les futurs gouvernants qu'ils seront, comme leurs prédécesseurs, dans le viseur des magistrats de la rue Cambon.

Mathias Thépot
Commentaires 28
à écrit le 09/02/2017 à 18:21
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Mais , Sapin non plus ...! le seul miracle c'a va etre son ejection , inneluctable , et là , ce en quoi, il doit croire , c'est sa confortable retraite à l'Ile d'Yeu ...!

à écrit le 09/02/2017 à 16:28
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Les pinocchios du gouvernement ont vu autre chose ?

à écrit le 09/02/2017 à 9:40
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Si la France était une entreprise, elle aurait été mise en liquidation judiciaire depuis 15ans. Cette situation n'empêche pas les candidats à la Présidentielle de faire des promesses, utopiques, démagogiques, populistes. Malheureusement le seul qui a...

le 09/02/2017 à 11:34
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C'est l'Euro qui nous détruit. La France n'a plus la possibilité de dévaluer sa monnaie pour qu'elle corresponde à son activité économique réelle. La réunification allemande a créé ce déséquilibre qui nous coule. Et comme Fyon n'a pas l'intention de ...

le 10/02/2017 à 23:09
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Vous n'avez manifestement pas compris, et Mr Sapin non plus, qu'il est tout bonnement impossible de rétablir les finances publiques au moyen de politiques d'austérité : lorsque les dévaluations internes ne suffisent pas à relancer nos exportations, q...

à écrit le 09/02/2017 à 6:07
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Je ne crois pas aux miracles, ni au père Noël. Le taux d'emprunt à 10 ans pour la France monte dangereusement ces derniers jours. L'écart entre la France et l'Allemagne devient impressionnant. Les matières premières dont le pétrole remontent égaleme...

à écrit le 08/02/2017 à 20:24
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"Aucune économie structurelle dans le PLF 2017"... ni dans les précédents d'ailleurs, au mieux un coup de rabot à droite et à gauche. De toutes façons Hollande avait d'entrée de jeu brûlé les vaisseaux en annonçant la réouverture de 60000 emplois à l...

le 08/02/2017 à 23:11
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"raison de la guerre que nous a déclaré le terrorisme islamiste" Donc, l'otan, ça vous dit rien. Et l'Irak, ça vous parle..?? La propagande marche tout de même sacrément bien...

le 09/02/2017 à 9:00
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@yvan : la France n'est pour rien dans l'invasion de l'Irak, bien au contraire, elle a tout fait pour l'éviter. Et même cette invasion de l'Irak était une réponse, certes totalement inappropriée car ne visant pas les vrais coupables, à une série d'at...

le 09/02/2017 à 13:11
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Vous ne savez donc pas que "nous" faisons partie de l'otan. Lamentable.

le 10/02/2017 à 21:47
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@yvan : il y a beaucoup de pays dans l'OTAN. Beaucoup ne subissent pas le terrorisme islamiste.

à écrit le 08/02/2017 à 19:00
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Conclusion de la Cour des Contes : "Il faut privatiser l'état."

à écrit le 08/02/2017 à 17:57
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Encore un livre blanc dans les étagères de Bercy et cie !

à écrit le 08/02/2017 à 17:39
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Et toujours du blabla de la monarchie de la cour des comptes. Comme les années précédentes cela restera sans effet simplement des rustines... Monsieur le monarque Migot les 35 retraites spécifiques dont vous même bénéficiez c'est 20 millards d'euros ...

le 08/02/2017 à 20:26
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"Monsieur le monarque Migot les 35 retraites spécifiques dont vous même bénéficiez c'est 20 millards d'euros par an soit 30% de la collecte des impôts sur le revenus." C'est quoi ce délire ?

à écrit le 08/02/2017 à 17:20
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Sans oublier le total des 15,5 milliards d'€uros du Crédit Lyonnais dont on n'entend plus parler... Ce sont les Français qui ont banqué !

le 08/02/2017 à 18:01
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.... et faire brûler des piles de papiers c'est loin d’être simple !

le 08/02/2017 à 19:07
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tout ça a été très bien orchestré ( plusieurs départ de feu !).....les preuves sont parties en fumée...pas de commission d'enquête...fin.

à écrit le 08/02/2017 à 17:12
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Suite. Et en plus, cela permet de protéger le climat en augmentant le prix de l'énergie, cela permet de créer des emplois et de réduire les prix de la production des entreprises.

à écrit le 08/02/2017 à 17:11
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C'est POURTANT important pour la France mais , les medias ne le mettent pas en avant c'est comme la grande valse des ambassadeurs jamais faite sous la Ve comment croire en la presse ?

à écrit le 08/02/2017 à 17:01
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Il y a deux effets qui nous caractérisent, la démographie avec l'effet du baby boom sur les retraites, et le prix de l'énergie trop faible comparé aux autres pays européens, en particulier l'Allemagne et la Suède. Que doit on faire? Augmenter le prix...

le 08/02/2017 à 18:19
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On va commencer par le haut ... réduire le nombre de députés/sénateurs par 2,5 .... supprimer les administrations qui ne servent à rien ... taxer les politiques qui ne racontent que des mensonges ainsi que les indemnit...

à écrit le 08/02/2017 à 16:31
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"la Cour des Comptes ne croit pas au miracle". J'aurai mis "miracle" au pluriel, surtout si on considère que la Cour des Comptes c'est aussi la Cour des Miracles. Les Comptes...Quelle est la réalité des Comptes présentés par un Etat. La compilation ...

à écrit le 08/02/2017 à 15:29
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la Cour dit chaque année qu'elle ne croit pas à la baisse. et puis finalement, le déficit a baissé. comme la France est un pays qui tire la demande en Europe (avec le UK), elle doit y aller progressivement dans la rigueur. résultats de la dépense : ...

le 08/02/2017 à 16:41
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@gfx Ce que vous dites est certainement vrai et honnêtement décrit, les informations ne manquent pas...et la fin est bien.

le 08/02/2017 à 20:39
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"et puis la dette publique a pour contrepartie une dette des ménages limitée et considérée comme la plus solide en Europe." Il n'y a pas de vases communicants. La solidité de la dette des ménages en France tient à une législation protectrice et à la ...

à écrit le 08/02/2017 à 15:18
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Et l ecotaxe , c est quoi, une belle connerie qui va nous coûter combien .. Bravo a nos dirigeants , d avant et du moment...!!!!!!

le 08/02/2017 à 20:30
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L'abandon de l'écotaxe, ça fait 1 milliard (1100 pénélopes) d'indemnisation pour Ecomouv et 11000 pénélopes en manque à gagner de taxes.

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