Impôts, choc pétrolier, Europe : les temps forts économiques de Giscard

Dans les pas du général de Gaulle, le centriste "VGE" commence sa carrière politique en 1956 en tant que député, un poste qu'il retrouvera d'ailleurs dans les années 2000. Ce polytechnicien et énarque a rempli de nombreuses fonctions de l'appareil politique : inspecteur des finances, maire, ministre, président de région, membre du Conseil constitutionnel, académicien et Président de la République. La Tribune a extrait quelques uns de ses temps forts économiques. Une vision et des pratiques politiques héritées d'une époque, pour mieux comprendre celles d'aujourd'hui ?

L'ancien président de la République s'est éteint le mercredi 2 décembre à l'âge de 94 ans, emportant avec lui des morceaux de l'histoire politique et économique française. Il est d'abord, en 1959, le plus jeune ministre du gouvernement de Michel Debré (secrétaire d'Etat aux Finances), avant de devenir en 1974, à 48 ans, le plus jeune président de la République - avant Emmanuel Macron. Valéry Giscard d'Estaing débute sa carrière professionnelle en tant qu'inspecteur des impôts, d'abord en tant qu'adjoint en 1952 puis titulaire en 1954. Une expérience qui sera finalement à l'origine de nombreux paradoxes dans son approche de l'économie française, entre libéralisation et inflation technocratique et fiscale. A son arrivée à l'Elysée en 1976, la dette publique représente 15% du PIB, note le Sénat. Lorsqu'il quitte la rue du Faubourg Saint Honoré en 1981, celle-ci atteint 22% du PIB national, selon l'Insee.

« Dévoué à l'administration de son pays. Ministre pendant 12 ans, sous les présidences de Charles de Gaulle et de Georges Pompidou, il contribua à assainir les finances publiques et à développer l'économie de la France durant les Trente Glorieuses », a salué l'Elysée dans un communiqué ce jeudi.

Porté à ses débuts par le vent de la croissance

Après sa sortie de l'École Polytechnique puis de l'École nationale d'administration (ENA) (1949-1951), le jeune Valéry Giscard d'Estaing se lance dans une carrière de haut-fonctionnaire. Il entre en politique au milieu des années 1950 dans le sillage d'Edgar Faure (président du Conseil en 1954) dont il devient le directeur adjoint de son cabinet. En 1956, il est élu député du Puy-de-Dôme. Devenu homme politique, il occupe alors plusieurs postes gouvernementaux : trois ans comme secrétaire d'État aux Finances (du 8 janvier 1959 au 18 janvier 1962), puis ensuite ministre des Finances et des Affaires économiques du général de Gaulle (18 janvier 1962 au 8 janvier 1966).

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[Dans cette archive vidéo du 1er juin 1961, Valéry Giscard d'Estaing, encore secrétaire d'État, délivre un cours d'économie aux Françaises et Français: il explique notamment comment il va gérer les excédents agricoles, source de dépenses, non pas par l'impôt mais par le développement de l'activité économique qui générera suffisamment de recettes pour faire face aux dépenses en 1961... Source: INA]

Chantre de la modération fiscale... et détenteur du record absolu des hausses d'impôts

Tout au long de sa carrière politique, Valéry Giscard d'Estaing entendait dénoncer la frénésie fiscale. Mais cela ne l'a pas empêché de décrocher haut la main le titre de recordman des hausses d'impôts, toutes tendances confondues. Sous son septennat, de 1974 à 1981, les prélèvements obligatoires sont passés de 33,5% du PIB à 39,4%, une hausse de six points qu'aucun de ses prédécesseurs n'avait approchée, et que ses successeurs n'ont jamais atteinte.

Créée en 1954 et touchant initialement d'abord les grandes entreprises, c'est Valéry Giscard d'Estaing, ministre de l'Économie et des Finances, qui décide en 1966 d'étendre la TVA au commerce de détail.

Il retrouvera d'ailleurs l'administration des finances en 1969. Le site de Bercy rappelle ses principaux faits d'armes : « Il procède à l'installation du Conseil des impôts (1971) et institue une commission d'étude de la patente (1970), dont les travaux sont à l'origine de l'instauration de la taxe professionnelle.»

C'est sous son mandat que s'opère également la construction des hôtels des finances et des centres des impôts partout en France.

En matière de dette publique, rappelle le site du Ministère, il est à l'origine de l'émission de l'emprunt national d'équipement lancé en 1965 et surtout à celle de l'emprunt 7% en 1973.

Son projet politique devait pourtant se résumer à la « libéralisation » de l'économie française. Une vision que l'on retrouve dans ses "petites phrases" montées en vidéo par l'INA :

« Pour que la France rayonne, elle doit offrir un visage humain, libéral, mondialiste et moderne »

> REVOIR : Giscard ou la hausse d'impôt en catimini

Choc pétrolier : le prix du pétrole quadruple, le chômage bondit

En 1973, quand survient le choc pétrolier (à la suite de la guerre du Kippour entre Israël et ses voisins arabes, et des mesures de rétorsion décrétées par les pays du Golfe qui vont faire quadrupler le prix du pétrole), le gouvernement Messmer, sous Pompidou, a pris des mesures de freinage de l'activité, destinées à modérer l'inflation. En 1974, à peine élu, VGE renforce cette politique anti-inflationniste par sa loi de finances rectificative. Pour freiner les prix, il choisit de ralentir la demande, et donc en diminuant le revenu disponible, aussi bien des particuliers que des entreprises.

[« Les difficultés françaises font partie d'un problème mondial, dû au désordre des grandes monnaies, et dû à l'augmentation massive des prix de l'énergie et notamment du pétrole, dont les prix ont quadruplé en un an. » C'est par cette introduction dramatique sur la dégradation de l'environnement économique mondial après le premier choc pétrolier que le tout nouveau président de la République entame son explication, le 26 novembre 1974, sur la montée du chômage en France. Crédit : Archives INA]

Une Europe décadente, malgré l'intégration

Valéry Giscard d'Estaing fut aussi député européen de 1989 à1993.

La thèse de l'ancien président s'appuie sur l'idée d'une décadence. L'âge d'or de la construction européenne remonte aux années 1970 lorsque, étrange hasard, il était aux manettes de la France et s'entendait à merveille avec son « ami Helmut » Schmidt, le chancelier allemand (1974-1982). Cet âge d'or s'appuyait sur l'esprit des deux « grands fondateurs », Robert Schuman et Jean Monnet, cités dans l'ouvrage à tout propos : construire une Europe de plus en plus intégrée, mais par la méthode des « petits pas », brique par brique.

Selon VGE, la fin de l'Union soviétique, la mauvaise application du traité de Maastricht et ce qu'il appelle, non sans une certaine élégance, le « dévergondage financier et bancaire » ont conduit l'Europe sur la mauvaise voie. Celle d'un élargissement trop rapide et d'une dérive des comptes publics.

Sa présidence sera aussi marquée par la naissance du système monétaire européen (SME).

> REVOIR : L'avenir de l'Europe selon Giscard d'Estaing

Commentaires 2
à écrit le 04/12/2020 à 17:02
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Il a aussi organiser, pour le regretter apres,le regroupement familiale qui nous conduit rapidement vers une guerre de religion ,,,,,,appliquons là loi en expulsant les 90% de déboutés

à écrit le 04/12/2020 à 8:43
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Il est même mort au mauvais moment, tandis que les médias de masse essayent de nous faire nous interesser à lui, pour nous faire penser à autre chose qu'aux conséquences dramatiques de notre déclin oligarchique, tout le monde s'en fout vu l'époque et...

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