Cela fait partie des promesses centrales du programme de Jean-Luc Mélenchon : le retour de la retraite à 60 ans. Or, un tel mouvement a un coût, car l'âge de départ a été reculé à 62 ans, de même que les annuités de 40 à 41,5 depuis 2010 sous Nicolas Sarkozy, pour pérenniser la situation financière des caisses de retraite.
Cet obstacle, Jean-Luc Mélenchon prétend savoir comment le franchir. "J'ai trouvé comment le financer", a-t-il assuré vendredi matin au micro de Bourdin Direct sur RMC-BFMTV. Sa solution ? Le respect de la parité salariale :
"Si vous mettez le salaire des femmes au niveau du salaire des hommes, le surcroît de cotisations sociales que ça rapporte permet de payer la retraite à 60 ans pour 40 annuités."
(A partir de 29'25'' sur la vidéo)
Une étude menée par la Caisse nationale d'assurance vieillesse
Jean-Luc Mélenchon avait déjà avancé cet argument en janvier dernier dans la même émission. En clair, les cotisations supplémentaires prélevées grâce à la hausse du salaire des femmes suffiraient à financer la retraite à 60 ans.
Cette question n'a presque jamais était abordée par les spécialistes. Seule une étude menée par la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) en 2011, à la demande de la CGT, s'en est saisie. En se basant sur l'hypothèse d'un alignement des salaires des femmes sur ceux des hommes à partir de 2023, la CNAV devrait dépenser 13 milliards d'euros supplémentaires sur la période 2012-2050 mais recevrait 18,5 milliards d'euros de recettes supplémentaires, soit un solde positif de 5,5 milliards d'euros. En revanche, "il est probable qu'au delà de l'horizon 2050, la mesure générerait plus de dépenses que de ressources (vers 2060)", conclut l'étude.
Cependant, cette estimation a été faite sur la base de la réforme des retraites de 2010. Rien n'indique que cela suffirait à financer le retour de l'âge de départ à la retraite à 60 ans. La simulation de l'iFRAP, un think tank libéral, chiffre entre 20,3 et 40,7 milliards d'euros par an le coût d'une telle mesure.
>> Lire aussi : Sauver les retraites complémentaires : les syndicats avancent leurs solutions
De la création de richesses dépend la santé des caisses de retraite
En soi, la question ne dépend pas principalement de l'écart salarial, mais du revenu total distribué. Par exemple, entre 2009 et 2011, le revenu salarial (revenu net des cotisations, CSG et CRDS inclus) des femmes a augmenté alors que celui des hommes n'a cessé de chuter (voir tableau ci-dessous) selon les chiffres de l'Insee. Résultat, l'écart entre les deux sexes s'est réduit de 1 point, passant de 26% à 25%*.
Parallèlement, le revenu salarial moyen est passé de 20.436 à 20.291 euros annuels sur la même période, soit une baisse de 0,7%. Pour rappel, à cette époque la crise de 2008 a lourdement frappé l'économie française, d'où cette baisse du revenu moyen. Dans ces conditions, on peut considérer que les caisses de retraite n'ont pas été avantagées, alors que l'écart salarial entre les sexes s'est réduit. La formule de Jean-Luc Mélenchon ne se vérifie pas.
Cet exemple démontre qu'au-delà de la question de la parité salariale, c'est bel et bien celle de la création du richesses qui importe pour le financement de l'assurance vieillesse. Plus la croissance est forte, plus les revenus augmentent et le montant des cotisations collectées avec. À niveau de création de richesses constant, la parité salariale a beau être instaurée, le financement des caisses retraite ne s'en portera pas mieux.
Un plan de relance de 100 milliards d'euros
Au micro de RMC, Jean-Luc Mélenchon a poursuivi en rappelant son plan de relance de 100 milliards d'euros. Que l'on soit d'accord ou non avec cette proposition, celle-ci est un argument bien plus pertinent concernant le financement de la retraite. Dans son programme, il table sur une croissance de 2% et un chômage de 6%, de quoi en effet augmenter le montant des cotisations collectées.
Enfin, le candidat de la France insoumise a également exposé d'autres propositions dans son programme :
>> Lire aussi : Mélenchon : son programme de relance économique en cinq chiffres
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>> Pour en savoir plus Insee, Femmes et hommes, l'égalité en question, mars 2017