« L'empathie est un formidable levier de croissance »

Christophe Rebours, le fondateur d'InProcess, un cabinet de conseil dont la philosophie repose sur la valorisation de l'expérience publie un ouvrage-manifeste pour faire avancer ces idées qui replacent l'humain au centre des mécanismes décisionnels et des processus productifs.
Fabien Piliu
" De très grandes marques qui brillent au CAC 40 ont compris que l'ère de la production de masse était en partie révolue. Pour connaître le succès, ou pour le prolonger, les entreprises sont dans l'obligation, nous en sommes convaincus, de changer de méthode, de réfléchir différemment pour produire différemment ", explique Christophe Rebours.

La Tribune - Coécrit avec Inès Pauly, votre ouvrage intitulé « L'expérience : le nouveau moteur de l'entreprise » sera bientôt publié. Quelles sont ses idées fortes ?

Christophe Rebours - L'idée principale de cet ouvrage est de replacer l'humain au centre des mécanismes de décision dans les entreprises. Plus précisément, il s'agit de mettre en lumière ce qui nous semble être l'actif le plus précieux de l'entreprise et son moteur : l'expérience. Cette dernière représente les moments de vie qu'une organisation offre à ses utilisateurs, collaborateurs et parties prenantes ; les expériences de demain qu'elle construit aujourd'hui.

De qui parle-t-on ? Des salariés ? Des consommateurs ?

Il s'agit des utilisateurs d'une entreprise au sens large : clients, collaborateurs, actionnaires, partenaires et la société toute entière. En prenant le temps d'observer tout ce monde, les entrepreneurs peuvent repenser les processus productifs et la création de valeur. Que ce soit pour les biens ou pour les services.

Etre une marque, et a fortiori une grande marque, ne suffit plus ?

De très grandes marques qui brillent au CAC 40 ont compris que l'ère de la production de masse était en partie révolue. Pour connaître le succès, ou pour le prolonger, les entreprises sont dans l'obligation, nous en sommes convaincus, de changer de méthode, de réfléchir différemment pour produire différemment.

Faut-il repenser la gouvernance des entreprises ?

Ce n'est pas forcément nécessaire, même si des retouches peuvent être utiles pour mieux prendre en compte les expériences que vivent les hommes. Il ne s'agit pas de casser les structures mais de les amener à penser différemment pour que ce partage d'expériences permette la mise sur le marché de services innovants.

Comment partage-t-on et valorise-t-on cette expérience pour en faire un bien commun ?

Nous avons définis trois étapes. La première consiste à avoir de l'empathie pour l'autre. Ce n'est pas une question de catéchisme ! Il ne s'agit pas de tendre la joue. Il s'agit, pour que l'entreprise survive et tire réellement parti de ses atouts, d'observer, d'être à l'écoute du marché, des consommateurs, des salariés. Il faut un peu d'empathie pour écouter l'autre, non ? Certains de nos clients avouent connaître leur marché mais pas leurs clients. Ils trouvent donc nécessaire de corriger le tir car le succès n'est pas éternel.

Concrètement, comment se déroule cette phase d'observation ?

Nous nous reposons sur les sciences humaines ! L'ethnologie, l'anthropologie nous sont de précieux soutiens pour comprendre et décrypter les comportements humains, et il est urgent de les introduire dans les entreprises.

La deuxième étape consiste à rassembler cette connaissance de l'expérience que vivent les hommes pour définir l'objectif à atteindre pour l'entreprise. Ce travail de collecte et de valorisation est une étape très importante car elle doit faire émerger de nouvelles énergies. Elle peut permettre d'élargir le champ des possibles au sein de l'entreprise. Ce n'est pas rien. Travailler dans une entreprise qui respecte les valeurs personnelles, les valeurs collectives et qui œuvre en quelque sorte pour le bien-être commun est une richesse que trop peu de gens partagent !

Et ensuite ?

L'entreprise peut commencer à réfléchir à son produit, à ses usages, son design. Le produit n'est que le résultat final de toutes ces étapes de conception. Sinon, le risque est grand qu'il soit mal conçu, qu'il ne respecte pas certains critères sociaux et environnementaux, que le sort des salariés qui le produisent ne soit pas pris en compte. Ce sont des éléments qui comptent et qui doivent être pris en compte par les entreprises. Avec cette démarche, il s'agit en fait de redonner ses lettres de noblesses à la raison sociale de l'entreprise.

Cette méthode, cette philosophie séduisent-elle les entreprises ?

Nos résultats le prouvent. Nous sommes actuellement une trentaine chez InProcess. Notre plan de développement prévoit le recrutement d'une dizaine de personnes par an au cours des prochaines années. Nous avons une filiale à Shanghai et nous nous apprêtons à en lancer une autre à Boston.

Il est peut-être plus facile de se poser toutes ces questions lorsque l'on est un grand compte, que l'on est une marque forte ou simplement quand on est une entreprise bénéficiaire, non ?

Je ne crois pas. Compter sur l'expérience peut aussi permettre à des entreprises qui ont autrefois connu le succès de rebondir. Nous le constatons quotidiennement.

Cette méthode basée sur l'expérience signifie que des gisements de croissance sont encore possible, contrairement à ce que pensent les partisans de la croissance nulle et de la décroissance ?

Nous le pensons en effet. Il ne s'agit pas de produire moins mais de produire différemment et a priori mieux, au bénéfice des consommateurs, des salariés et de la société.

Fabien Piliu
Commentaire 1
à écrit le 17/10/2016 à 16:14
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Oui en fait votre taf c'est d'essayer de réintroduire de l'humain dans le gestion des ressources humaines, c'est pour dire dans quel état de délabrement actuel le néolibéralisme l'a plongé. Je suis entièrement d'accord avec vous cependant quel bi...

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