La France reste attractive mais…

Selon le baromètre de l’attractivité d’EY, la France reste la première destination en Europe des investissements étrangers dans le domaine industriel. Mais ces projets sont plus pauvres en emplois qu’au cours des années précédentes.
Fabien Piliu
La France est la première destination européenne des investissements industriels étrangers

Il y a deux ans, le baromètre de l'attractivité d'EY tirait la sonnette d'alarme. La France était alors menacée de décrochage face à ses concurrents britanniques et allemands. Ce décrochage a-t-il eu lieu ? " La concurrence est toujours exacerbée, la Frances est toujours sur le fil du rasoir dans mais elle France résiste ", constate Marc Lhermitte, associé chez EY.

Concrètement, la France a enregistré 608 projets d'implantation en 2014, un chiffre en hausse de 18% par rapport à 2013, distancée seulement par le Royaume-Uni qui a su attirer 887 projets et l'Allemagne, qui comptabilise 763 projets. Sur plus longue période, entre 2009 et 2014, le nombre de projets a augmenté de 15%. Point très positif, la France est la première destination des investissements étrangers en Europe, même si, comme le relève EY, 80% des projets sont des extensions de sites peu créatrices d'emplois. De fait, les emplois créés dans le cadre de ces projets ont chuté de 11% pour s'élever à 12.577 entre 2013 et 2014. Depuis 2009, ils se sont repliés de 6%.

Les créations d'emplois chutent

Dans le domaine de l'emploi, la France fait donc exception puisque les créations de postes ont accéléré dans la plupart des pays européens. C'est le cas au Royaume-Uni (+12%, à 31.198 emplois), en Russie (+34%, à 18.248 emplois), en Pologne +12%, à 15.485 emplois), en Allemagne (+9%, à 11.327 emplois) ou encore en Roumanie (+6%, à 10.892 emplois). Depuis 2009, ils ont bondi de 48% en Europe, de 56% au Royaume-Uni et de... 130% en Allemagne !

En cause ? Selon EY, 44% des dirigeants interrogés, contre 35% en 2014, regrettent le niveau toujours trop élevé du coût du travail et le manque de flexibilité apparente du marché du travail. Quelle injustice, pourrait-on penser ! En effet, depuis 2013, toutes les entreprises installées en France bénéficient du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), dont le taux est passé de 4% à 6 % de la masse salariale en 2014.

Depuis le 1er janvier, les entreprises profitent également d'un allégement des cotisations sociales patronales dont le montant total s'élèvera à 40 milliards d'euros d'ici 2017. Ces mesures permettent notamment à la France d'afficher un coût du travail dans le secteur manufacturier inférieur à celui de l'Allemagne. Quant à la flexibilité du marché de l'emploi, elle est encore un vœu pieux pour les investisseurs étrangers, malgré la signature de l'Accord sur la compétitivité et la sécurisation de l'emploi du 11 janvier 2013 qui confère aux entreprises des outils de flexibilité rénovés. C'est notamment le cas des accords compétitivité-emploi, des licenciements économiques collectifs et des plans sociaux. Une flexibilité qui se traduit par le fait que les contrats à durée déterminée aient représentés 83,6% des recrutements en 2014, contrats dont la durée moyenne était de 10 jours.

Il faut croire que ces efforts sont encore insuffisants aux yeux des investisseurs étrangers, ce qui explique la pauvreté en emplois des projets.

La fiscalité est montrée du doigt

Le poids de la fiscalité est également remis en cause, provoquant le déménagement relativement passif des sièges mondiaux ou européens, principalement vers le Royaume-Uni qui en compte actuellement 57, contre 20 pour l'Allemagne et 11 pour la France. " Après avoir longtemps rivalisé avec Londres, Paris a clairement décroché depuis cinq ans dans ce domaine ", observe Marc Lhermitte. Le taux de l'impôt sur les sociétés est-il trop élevé ? Grâce aux outils d'optimisation fiscale qu'offre le législatif, la France n'a pas vraiment à rougir de la comparaison, même si elle ne peut lutter à armes égales avec les paradis fiscaux. Citons notamment l'Irlande ou le Luxembourg. " C'est la fiscalité des personnes qui est remise en cause, le montant de l'impôt sur le revenu et la fiscalité des stocks options ", poursuit Marc Lhermitte.

La taxe à 75% sur les revenus supérieurs à un million d'euros - supprimée depuis le 1er janvier 2015 - et les aller-retour du gouvernement sur la fiscalité des plus-values de cession de valeurs mobilières ont-ils porté préjudice à l'attractivité de la France ? Le baromètre ne le précise pas.

Fabien Piliu
Commentaires 9
à écrit le 27/05/2015 à 11:35
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"C'est la fiscalité des personnes qui est remise en cause, le montant de l'impôt sur le revenu " L'impôt sur le revenu est ridicule en France, il faut arrêter d'être branché 24h/24 sur TFI et BFMTV pour le comprendre. Etonnant que des gens aussi b...

le 27/05/2015 à 12:01
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Plus que d'accord avec vous. Du temps où je travaillais, j'avais comparé avec mes collègues belges et anglais, et on était beaucoup moins pressuré pour au moins une raison qui s'appelle quotient familial qui n'existe pas chez les Rosbifs. Les belges...

à écrit le 27/05/2015 à 11:15
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A part permettre aux politiciens de fanfarroner ? On est donc bien d'accord, la France n'attire QUE parce qu'elle permet un avantage fiscal, CIR, CICE et allégement de charges ... ce constat est dramatique! En réalité tout est faussé dans l'économie ...

à écrit le 27/05/2015 à 8:38
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En filigrane, ce que certains ne voient ou ne veulent pas voir c'est l'instabilité législative, le manque de transparence, de perspectives, de clarté. La Suisse coûte à peu près aussi cher, mais sa stabilité législative offre des perspectives rass...

le 27/05/2015 à 12:16
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Votre analyse est brillante, vous avez tout résumé, bravo !!!

à écrit le 27/05/2015 à 7:40
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La France a une tare rédhibitoire: sa dépense publique de 57,5 % du pib. Ça implique des impôts outrageants et confiscatoires levés par un système qui colonise la nation. Tant que la France ne sera pas libérée elle restera dans sa phase de fin de dév...

le 27/05/2015 à 9:08
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@Titina ce ne sont pas les dépenses generales qui pèsent le plus, et partant les impôts eux-mêmes, mais les dépenses sociales !!! Vos depenses sociales, santé ( carte vitale), éducation (quasi gratuite), retraites (insuffisamment financées)... Pour l...

le 27/05/2015 à 9:44
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Le problème c'est que les entreprises ne font pas assez de bénéfices. Il faut pressurer un peu plus les salariés. Diminuer les salaires, baisser les prestations sociales, ne plus investir en infrastructures et favoriser la privatisation de la police,...

le 27/05/2015 à 10:39
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Jolie ironie, privatiser les fonctions régaliennes de l’État... même les États-Unis ne le feraient pas.

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