Les services déconcentrés de l’État s’adaptent à la nouvelle carte des régions

[ #Regionales 2015 ] Le gouvernement a désigné les nouveaux "chefs-lieux" provisoires des nouvelles régions. Il n’y a pas de surprise. En revanche, la nouvelle organisation conduit l’État à supprimer des postes de préfets régionaux et de directeurs d’agences régionales de santé. Des mesures compensatoires sont prévues pour les villes perdant leur statut de préfecture régionale.
Jean-Christophe Chanut
Si la région Languedoc-Roussillon est ratachée à Midi-Pyrénées (et que Toulouse prend la main), que va devenir l'Hôtel de région Montpellier ?

Le gouvernement ne s'est pas pris la tête. Lors du Conseil des ministres du 31 juillet, pour désigner les chefs-lieux des 7 nouvelles régions qui, le 1er janvier 2016, se substitueront par regroupement aux 16 régions actuelles (6 autres restant inchangées), il a choisi les villes les plus peuplées des nouvelles régions.

Sont donc élues : Bordeaux, Dijon, Lille, Lyon, Rouen et Toulouse. Le chef-lieu de la région Alsace/Champagne-Ardennes/Lorraine, c'est-à-dire le lieu d'implantation de la future préfecture de région, avait déjà été fixé par la loi du 16 janvier 2015. Et, bien entendu, il s'agit de Strasbourg.

Mais attention, comme le prévoyait la loi de janvier 2015 instituant 13 régions métropolitaines au lieu des 22 actuelles, ce choix des « capitales » n'est pas définitif. Les chefs-lieux définitifs seront fixés avant le 1er octobre 2016, après avis des conseils régionaux issus du renouvellement des assemblées qui interviendra lors des élections des 6 et 13 décembre prochains.

Les maires craignent des pertes d'emplois publics

Alors, bien sûr, il n'y a pas réellement de suspens. A priori, dans la quasi-majorité des cas, le siège du conseil régional (pouvoir décentralisé) coïncidera avec le siège de la préfecture - ou, autrement appelé, chef-lieu - (du pouvoir déconcentré de l'État).

Mais il pourrait y avoir une ou deux exceptions, avec un partage des rôles. Ainsi, en Normandie, Hervé Morin, le chef de file de l'alliance « Les Républicains »/UDI a ouvertement plaidé pour que Rouen et Caen aient chacune des responsabilités.

Les sièges de la préfecture et du Conseil régional pourraient alors être potentiellement répartis entre les deux villes. Il en va de même en Bourgogne/Franche-Comté, entre Dijon et Besançon. Mais rien n'est moins sûr. En revanche, il est très peu probable que dans la nouvelle Région Midi-Pyrénées/Languedoc-Roussillon, Montpellier puisse rivaliser avec Toulouse pour obtenir l'un des deux sièges. Il est vrai que la fusion des régions va avoir un certain nombre de conséquences sur les actions déconcentrées de l'État, d'où la crainte des maires des anciennes préfectures de perdre des emplois publics et, par ricochet, que l'activité économique soit affectée.

Compenser les effets du « déclassement »

De fait, le Premier ministre Manuel Valls a été très clair. Dans chaque région fusionnée, il n'y aura, à partir de 2016, qu'un seul préfet de région, un seul recteur de région académique, un seul directeur d'agence régionale de santé (ARS) et un seul directeur régional pour chaque réseau ministériel. Ce qui va conduire à faire disparaître neuf postes de préfets de région et de directeurs généraux d'ARS, ainsi que 63 postes de directeurs régionaux des administrations de l'État ainsi que leurs états-majors. Une phase transitoire est cependant prévue jusqu'en 2018.

Alors, les syndicats s'inquiètent des conséquences sur l'emploi public. Certes, depuis des mois, Manuel Valls a annoncé que la nouvelle carte régionale en place à compter du 1er janvier 2016 serait l'occasion de se livrer à une revue générale des missions déconcentrées de l'État afin d'harmoniser et de simplifier l'organisation.

Pour le Premier ministre, in fine, en tenant compte des mesures compensatoires qui vont être mises en place pour éviter de « vider » les anciennes préfectures, seuls environ 1 000 agents sur trois ans (sur un total de 27. 000 fonctionnaires d'État dans les régions) seront concernés par d'éventuelles mobilités géographiques. Le syndicat Force Ouvrière, lui, estime que 40. 000 fonctionnaires au total (y compris les fonctionnaires régionaux, départementaux et communaux) seront concernés par les conséquences de la nouvelle organisation territoriale.

Mais Manuel Valls a cherché à calmer les esprits et a donc annoncé des mesures compensatoires pour « conforter l'équilibre des territoires ». Ainsi, depuis plusieurs mois, les sept « préfets configurateurs », chargés de l'application de la réforme, ont mené un dialogue avec les élus locaux et les organisations syndicales pour élaborer un « projet d'organisation régionale ». Ce projet implique que la ville chef-lieu ne sera pas forcément le siège de toutes les directions déconcentrées en région de l'État. In fine, l'idée est que le tiers des sièges des directions régionales sera implanté hors chefs-lieux.

Une vaste réorganisation qui ne va pas sans heurts

Par exemple, en Aquitaine/Limousin/ Poitou-Charentes, le siège de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement sera localisé à Poitiers, tout comme la direction régionale de l'Insee, et non à Bordeaux.

En Auvergne/Rhône-Alpes, le siège de la direction régionale de l'agriculture et de la forêt sera à Clermont-Ferrand et non pas à Lyon.

Ou encore, en Languedoc-Roussillon/Midi-Pyrénées, le siège de la direction régionale des affaires culturelles, celui de la direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociales ainsi que celui de la chambre régionale de la Cour des comptes seront à Montpellier. Pas certain que cela suffise pour calmer Philippe Saurel (divers gauche, dissident du PS) le très actif maire de cette métropole, qui menace de constituer sa propre liste lors du scrutin régional de décembre.

En Normandie, Caen devrait accueillir les directions régionales de l'Insee, de l'alimentation-agriculture-forêt et des affaires culturelles. D'autres mesures sont également prévues pour Amiens et Metz.

Enfin, l'instauration des 13 nouvelles régions va obliger d'autres services et opérateurs de l'État à s'organiser sur une base régionale... Ce qui n'était pas le cas jusqu'ici. Il s'agit notamment de Pôle Emploi, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Adem), l'Agence de service et de paiement (ASP), mais aussi d'institutions comme la Caisse des dépôts et consignations ou la Banque publique d'investissement (BPI).

Le tout, dans le but si souvent annoncé de parvenir à « une meilleure cohérence et harmonisation des politiques publiques » et pour qu'il y ait « plus d'efficacité, plus d'unité, plus de simplicité et plus de dialogue ».

Si ces objectifs sont remplis, l'avenir le dira, une part importante du fameux « mal français » serait alors éradiqué.

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>>> Retrouvez notre série "Régionales 2015" dans le Grand Soir/3 
présenté par Patricia Loison chaque jeudi vers 22h30

Extrait du Soir 3 du jeudi 3 septembre 2015

Jean-Christophe Chanut
Commentaire 1
à écrit le 05/09/2015 à 11:43
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On publie dans la presse, qu’il faudrait dégraisser les administrations, est-ce parce qu’on fait de la croissance molle ? Mais où sont les ETI et les emplois ? Alors qu’on fait des fonctionnaires et qu’on parle d’un revenu uni vers elle, qui est elle...

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