Pillage industriel : la justice déboute Engie

Jean-Michel Germa, le fondateur et actionnaire minoritaire de La Compagnie du Vent (LCV), a été à nouveau relaxé par la Cour d’appel de Montpellier dans les procédures en diffamation initiées à son encontre par Engie, actionnaire majoritaire de LCV depuis 2007.
Fabien Piliu
Par un arrêt du 14 décembre, la Cour d'appel de Montpellier a confirmé le jugement de première instance relaxant Jean Michel Germa, le fondateur et actionnaire minoritaire de La Compagnie du Vent (LCV) pour les propos considérés par Engie comme diffamatoires.

Jean-Michel Germa 2 - Engie 0 !  Par un arrêt du 14 décembre dernier, la Cour d'appel de Montpellier a confirmé en tout point le jugement de première instance relaxant Jean Michel Germa, le fondateur et actionnaire minoritaire de La Compagnie du Vent (LCV) pour tous les propos considérés par Engie comme diffamatoires. Engie, ex GDF-Suez est l'actionnaire majoritaire de LCV depuis 2007. Poursuivi en diffamation par Engie, Jean Michel Germa avait déjà bénéficié d'un premier jugement de relaxe le 30 septembre 2015 du Tribunal correctionnel de Montpellier.

Les mauvaises nouvelles s'accumulent pour Engie. Dans la foulée des révélations issues du scandale LuxLeaks en 2014 et des Panama Papers en 2016, la commission européenne se penche sur les montages financiers des grands groupes dans les paradis fiscaux, parmi lesquels Engie. Selon des documents publiés jeudi par Bruxelles, qui enquête sur deux montages financiers du groupe énergétique au sein du Grand-Duché, celui-ci pourrait avoir bénéficié d'environ 300 millions d'euros d'avantages fiscaux au Luxembourg.

Mais revenons à l'affaire qui oppose Jean-Michel Germa et Engie. Les juges d'appel estiment que les propos tenus par Jean-Michel Germa dans un "contexte commercial très conflictuel", même "s'ils sont parfois durs dans leur expression " [...], ne comportent aucune allégation dont il n'a pu se défendre au travers des pièces communiquées" précise la défense dans un communiqué de presse.

La relaxe confirmée

En 2011, Jean-Michel Germa avait dénoncé avec force et détermination les agissements de l'actionnaire majoritaire à l'égard de LCV , reprochant notamment à celui-ci "de s'être approprié le chantier des Eoliennes en mer au large du Tréport", précise le communiqué de presse. Le Tribunal retient en outre que ces propos sont "l'expression de points de vue et de sentiments d'autant plus exacerbés, que Jean-Michel Germa s'est totalement investi affectivement et financièrement, avec une réussite remarquable" dans La Compagnie du Vent qu'il a lui-même fondée.

La Cour constate que Jean-Michel Germa "apporte à l'appui de ses propos de très nombreux éléments sur le bien-fondé desquels la cour n'a pas à se prononcer mais qui démontrent sa bonne foi". Elle balaie également "le procès d'intention permanent fait par GDFS (devenu Engie) à son encontre, qui soutient que le prévenu ne serait animé dans son action que par une basse volonté d'enrichissement personnel, [qui] ne convainc pas la cour". Enfin elle souligne que  "cette prise à partie publique d'un grand groupe a paru nécessaire [à Jean-Michel Germa] pour tenter de préserver le travail de toute une vie face à des impératifs de stratégie de groupe qui le dépassaient largement et sur lesquels il savait n'avoir aucune prise", et que - les termes employés par Jean-Michel Germa représentent "la libre opinion d'un actionnaire minoritaire qui apporte des éléments objectifs pour considérer que le groupe à qui il a vendu une partie de ses actions a privilégié à son détriment ses propres intérêts, ce qui 'dans le monde des affaires' relève plutôt de la bonne gestion".

Lutter contre la stratégie de groupe

"Je me félicite de cette décision. Elle devrait rassurer journalistes et rédacteurs en chef intéressés par ce dossier, mais qui, depuis des mois, hésitaient à écrire, inquiets du risque judiciaire qui pesait sur ceux qui acceptaient de me donner la parole", a déclaré Jean-Michel Germa qui veut rebondir sur cette décision judiciaire pour faire avancer l'idée de lutter contre la stratégie de groupe qui peut se traduire par le pillage des TPE-PME par des grands groupes indélicats.

Une proposition de loi a été déposée en février 2013 par des députés socialistes et de l'opposition de l'Hérault. C'est assez rare pour être souligné. Ce texte a été approuvé par le groupe socialiste mais n'a jamais pu être débattu en commission puis dans l'hémicycle. En cause : un agenda très chargé et l'absence du véhicule législatif idoine ! Apparemment, la loi Macron ne convenait pas...

Que proposait ce texte ? "La différence entre la France et l'Allemagne réside dans le fait qu'outre-Rhin, les PME sont protégées de toute décision prédatrice prise par les grands groupes industriels avec lesquels elles sont amenées à engager des relations capitalistiques", indiquait un chef d'entreprise. De fait, le code allemand des sociétés prévoit en effet que si un groupe prend, dans son seul intérêt, des décisions préjudiciables aux intérêts d'une société qu'il contrôle, il doit alors compenser directement les actionnaires minoritaires lésés par cette décision. En outre, ce 'dédommagement' doit être réalisé avant que le grand groupe ne « pille » son petit partenaire ", expliquaient les auteurs du texte devenu ensuite proposition de loi.

Fabien Piliu
Commentaire 1
à écrit le 06/01/2017 à 11:51
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C'est une excellente nouvelle car comme il est dit, ces grands groupes sont tellement puissants que les politiciens n'osent jamais les défier même si pourtant ils font ouvertement des malversations. Mais bon faut voir le parcours du combattant qu...

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