Présidentielle 2017 : Fillon veut mettre l'Etat à la diète

François Fillon a présenté le cadrage financier de "son projet pour la France". Il prévoit une hausse de deux points du taux de TVA, 100 milliards d'euros de baisses des dépenses publiques et 40 milliards d'euros d'allègements nouveaux pour les entreprises.
Jean-Christophe Chanut
Avec son programme économique, François Fillon se donne pour objectif de ramener le taux de chômage de 10% actuellement à 7% en 2022.

En retard dans les sondages pour la primaire de la droite, François Fillon continue cependant de tracer son chemin et de tenter de faire entendre sa différence. Refusant de tomber dans le piège du « tout sécuritaire et du tout identitaire », le député de Paris déroule son programme économique et financier pour faire « renouer la France avec la croissance et le plein emploi ».

Incontestablement, que l'on soit ou non d'accord avec ses idées, François Fillon est celui des huit candidats à la primaire de la droite qui a le plus détaillé ses propositions fiscales et sociales. Ce mercredi 14 septembre, il a ainsi présenté son cadrage financier. Et, manifestement, il veut mettre l'Etat à la diète, lui qui avait lancé quand il était Premier ministre « je suis à la tête d'un Etat en faillite ».

La baisse des dépenses publiques va d'autant plus s'imposer, selon lui, que  le gouvernement actuel aggraverait la situation en annonçant de nouvelles mesures « non financées » et « à visées électoralistes » qui vont entraîner « 15 à 20 milliards d'euros supplémentaires ».

100 milliards d'euros d'économies sur cinq ans

Alors, selon François Fillon, que faut-il faire ? Première chose, il promet qu'il parviendra à faire réaliser 100 milliards d'euros d'économies sur les dépenses publiques sur cinq ans, soit grosso modo un effort de 8% par rapport à l'ensemble de la dépense publique ou bien encore de 5 % du PIB. Pour lui, c'est jouable, puisque d'autres pays comme le Royaume-Uni, le Canada ou la Suède y sont parvenus. L'ancien Premier ministre compte atteindre cet objectif « en revoyant l'ensemble des postes de dépenses sur la totalité du périmètre de l'action publique ».

L'Etat et les établissements publics devront assumer environ 30% de l'effort, les collectivités locales 20%, et la Sécurité sociale... 50%. Selon François Fillon, la « Sécu » pourra trouver 20 milliard d'euros d'économies via le passage de l'âge légal de la retraite à 65 ans. Et 20 autres milliards d'euros seront trouvés en limitant la progression des dépenses de santé à moins de 2%. Enfin, 10 autres milliards d'euros seront économisés dans les comptes sociaux en abaissant le plafond des allocations chômage et en instaurant la dégressivité de ces allocations. Et François Fillon prévient : « si les organisations syndicales et patronales, responsables de l'Unedic qui gère l'assurance chômage refusent ces réformes, alors l'Etat arrêtera d'apporter sa caution à l'Unedic et elle sera nationalisée ». La menace est claire...

Un programme réaliste ?

Mais ce programme de 100 milliards d'euros d'économies posent des questions. On voit avec quelles difficultés les gouvernements Ayrault et Valls ont eu du mal à remplir leur objectif de 50 milliards d'euros de baisses des dépenses ; il n'y sont d'ailleurs pas parvenu. C'est la marge de progression des dépenses qui a été freinée. Alors, que penser d'un objectif de 100 milliards quand l'on connaît la structure de l'économie française? Un tel objectif ne va-t-il pas avoir un effet récessif, en raison de ce que l'on appelle les « effets multiplicateurs » ?

François Fillon réfute cette argumentation, « puisque d'autres pays l'on fait, sans récession »...C'est juste oublier ce qui s'est passé au Royaume-Uni ou en Espagne où il y a eu des récessions. Au Royaume-Uni, la croissance a certes repris depuis, mais le rythme de la croissance par habitant est demeuré plus faible qu'avant la cure d'austérité. En Espagne, le rattrapage des effets de l'austérité, économiquement, socialement et politiquement, est encore loin d'être achevé. Dans les deux cas, du reste, les déficits publics de ces pays demeurent très élevés, supérieurs à ceux de la France, et la réduction de la consolidation budgétaire n'est pas sans rapport avec le retour de la croissance. Concernant la Suède et le Canada, ces mouvements ont eu lieu dans des pays disposant de leurs propres monnaies et ont bénéficié dans les deux cas d'un contexte mondial très favorable. Les cas sont donc peu comparables.

L'effort des collectivités locales

Quant aux collectivités locales qui vont connaître entre 2014 et 2017 une baisse des dotations de l'Etat de 12,5 milliards d'euros et qui ont déjà considérablement réduit leur investissement, elles vont être ravies d'apprendre qu'elles devront encore faire de nouvelles économies. Même si François Fillon prend soin de préciser que les collectivités locales seront davantage autonomes dans la gestion de leurs personnels. A cet égard, le candidat prévient les fonctionnaires - dont le nombre baisserait de 500.000 - que leur durée hebdomadaire de travail sera remontée à 39 heures.

In fine, selon le cadrage de François Fillon, la dépense publique passerait de 56% du PIB en 2017 à 49% en 2022. Quant à la croissance en volume, il retient une hypothèse de 1,3% en 2017, là où le gouvernement table sur 1,5%.

Une hausse du taux de TVA de deux points

Contrôler les dépenses certes donc... mais augmenter les recettes aussi. François Fillon propose donc d'augmenter de deux points le taux de base de la TVA pour le faire passer à 22%. "Ce serait indolore",  pour l'ex-premier ministre en raison de l'absence d'inflation. Une opération qui rapporterait environ 15 milliards d'euros.

L'autre grand axe de la politique économique du candidat Fillon est constitué par un accroissement des allègements fiscaux et sociaux accordés aux entreprises, à hauteur de 40 milliards d'euros, soit sensiblement le même montant que les mesures actuelles inscrites dans le pacte de responsabilité (41 milliards d'euros sur trois ans). Pour les ménages ils ne prévoit « que » 10 milliards d'euros de baisses des prélèvements, via une baisse de la cotisation maladie, un retour à l'universalité des allocations familiales et une hausse du quotient familial. En revanche, à la différence d'un Nicolas Sarkozy, François Fillon refuse d'évoquer une baisse de l'impôt sur le revenu dans un premier temps, car il s'agirait « d'une promesse intenable, sauf à laisser totalement dériver les déficits ».

40 milliards d'euros de nouveaux allègements pour les entreprises

Priorité à l'entreprise, donc. Son objectif est de ramener sur cinq ans le taux de chômage de 10% à 7%. Pour ce faire, dès la fin 2017, 25 milliards d'euros seront consacrés à de nouveaux allègements de charges employeurs. Par ailleurs, l'actuel Crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) sera transformé en allègements de charges sociales définitifs. Par ailleurs, une première tranche de 10 milliards d'euros sera consacrée à la baisse progressive du taux de l'impôt sur les sociétés à 25%. Une mesure en partie engagée par l'actuel gouvernement Valls et qui trouvera sa traduction dans les faits dans l'adoption de la loi de finances 2017. Bien entendu, François Fillon confirme qu'il supprimera l'ISF.

Enfin, face à la menace terroriste, François Fillon dotera de 12 milliards d'euros supplémentaires les budgets des fonctions régaliennes de l'Etat.

François Fillon ne le cache donc pas. Il veut mettre la France à la diète pour réduire ses dépenses. Mais la potion n'est-elle pas trop forte ? Même le FMI a entamé son mea culpa. Une institution qui, après avoir longtemps prôné des politiques drastiques de baisse de la dépense publique, a enfin compris que le remède pouvait être pire que le mal sur le long terme. Par ailleurs, plusieurs études d'économistes ont souligné le caractère négatif sur la croissance à long terme d'une consolidation budgétaire accélérée. C'était le cas en juin dernier d'Antonio Fatas et Lawrence Summers qui soulignaient les effets permanents négatifs de cette politique. Enfin, les limites de la politique monétaire amènent beaucoup de responsables mondiaux aujourd'hui, notamment au Royaume-Uni mais aussi l'OCDE et la banque mondiale, à réfléchir à des politiques de relance plus qu'à des politiques d'austérité. Ce n'est pas le cas des candidats à la primaire de la droite française.

Jean-Christophe Chanut
Commentaires 29
à écrit le 15/09/2016 à 18:41
Signaler
Fillon est comme Sarkozy il a déjà eu les responsabilités et ben...on a rien vu. Du vent. Du socialisme version UMP.

à écrit le 15/09/2016 à 10:44
Signaler
Fillon n'y comprend vraiment rien en matière de fiscalité. Il devrait lire le document de Coe-Rexecode sur une réforme de la fiscalité.

à écrit le 15/09/2016 à 10:36
Signaler
C'est une chanson que l'on a entendu maintes fois, y comrpis avec "moi, president" qui a voyage deux ou trois fois en train pour amuser la galerie, mais qui est vite revenu au faste de la présidence. On constatera aussi que les presidents successifs ...

à écrit le 15/09/2016 à 10:33
Signaler
@Theophile : exact. Il y a aussi une chose peu dite : la dépense publique est très élevée en France... parce que les dépenses sociales sont prises en charge par l'Etat ,et ceci beaucoup plus qu'ailleurs !!! les pensions, l'éducation, la santé, le c...

à écrit le 15/09/2016 à 10:18
Signaler
Hum,hum, faire du dérapage budgétaire (il prévoit 4,7% en 2017 !!!) et compter sur des économies mal documentées et des prévisions de croissance toujours démenties ,pour le résorber par la suite, cela ne m'inspire pas confiance du tout, d'autant que ...

à écrit le 15/09/2016 à 9:56
Signaler
Remarquez que M Fillon qui est pour les économies concernant l'Etat, bénéficie à vie d'une voiture avec chauffeur avantage lié à son poste d'ancien 1er ministre!!

à écrit le 15/09/2016 à 9:09
Signaler
Augmentation 2 points la TVA cela sera indolore il se fout du monde . Exemple mes factures d'électricité et d'eau vont augmenter de 2 % mécaniquement sans parler du reste. Par contre je n'ai pas vu d'augmentation de salaire. Donc la droite va augmen...

à écrit le 15/09/2016 à 8:41
Signaler
L'élu de la commission de Bruxelles a n'en pas douter, la carpette idéale!

le 15/09/2016 à 10:25
Signaler
La Commission n'a aucune préférence. Elle défend simplement l'intérêt de l'Union européenne ,et donc...le votre. Lorsque elle demande aux Etats de ne pas dépasser un certain niveau de déficit budgétaire, c'est pour leur éviter une dette intenable et ...

à écrit le 15/09/2016 à 8:39
Signaler
Il faut arrêter de penser que le fameux coefficient multiplicateur est le même quelque soit la dépense publique. Les gâchis, dépense de fonctionnement inutiles, sureffectifs patents, bureaucratie coûteuse n'ont pas du tout le meme coefficient multip...

à écrit le 15/09/2016 à 8:21
Signaler
Personnellement, je n'ai toujours pas compris si l'on parlait de 100 milliards en cumulé sur cinq ans, ou 100 milliards par an à l'issue du quinquennat..mais remettons les choses en perspectives. Sous Mitterand, les dépenses publiques représentaient ...

le 15/09/2016 à 9:13
Signaler
70 milliards c'est l'idée qu'on pourrait exécuter le budget 2016 en maintenant les prestations et services fournis aux français avec 70 milliards de moins soit 5% de gain de productivité administrative. Bien évidemment ces gains de productivité se ré...

à écrit le 15/09/2016 à 8:20
Signaler
Forte récession et 1 millions de chomeurs en plus avec son programme, voter Fillon celui qui a, avec Sarkozy, déja ruiné la France en 5 ans !

le 15/09/2016 à 9:17
Signaler
Ce que propose Fillon est à peu près l'exact opposé de ce qui a été fait de 2002 à 2012...

à écrit le 15/09/2016 à 8:12
Signaler
Sacre Fillion. Il a dit que l etat etait en faillite mais il a tout fait pour rester premier ministre de Sarkozy et creuser encore plus le deficit ! Et aujourd hui il pretend avoir changé ? (certes il est pas le seul, son ex patron semble avoir oubli...

à écrit le 15/09/2016 à 7:11
Signaler
la representation du parasite de la France pas encore elus et deja il ruine le pays avec sa proposition d'augmenter la tva de 2 points lui qui a participe a la faillitte de moulinex ainsi que ses proche collaborateur lui qui voulait vendre les ro...

le 15/09/2016 à 9:21
Signaler
En vérité il faudrait augmenter davantage la TVA (les scandinaves ont une TVA à 25%) mais baisser d'autant les charges pesant sur les salaires. Il faudrait par contre surveiller la bascule pour que les prix HT de la production française sur le marché...

à écrit le 14/09/2016 à 19:54
Signaler
Première économie que M. Fillon aurait pu prendre lorsqu'il était au poste de premier ministre: ne plus faire à chaque weekend l'aller-retour Paris - Sablé sur Sarthe en hélicoptère aux frais du contribuable ! Je me rappelle qu'en 2011, il annonça...

à écrit le 14/09/2016 à 19:29
Signaler
M Fillon a déjà montré de quoi il était capable. Maintenant ce n'est pas un état en faillite, qu'il a trouvé ainsi et livré encore plus endetté à son successeur, ce qu'il vise, clairement c'est une liquidation. Il viendra peut être encore ensuite, c...

à écrit le 14/09/2016 à 19:09
Signaler
Donc en gros augmentation des taxes et impots pour les français sauf pour eux meme puisqu'ils supprimeront leur ISF !

le 15/09/2016 à 9:26
Signaler
Il faudrait compenser la suppression de l'ISF par une hausse des droits de succession. Après il faut réfléchir au traitement des actions. On ne peut pas traiter de la même façon les actions et les autres éléments du patrimoine. Tant qu'une action n'e...

à écrit le 14/09/2016 à 18:04
Signaler
Mettre la France à la diète c'est aussi revoir les statuts de l'armée - police - fonction territoriale - enseignement dont les salaires, grilles d'avancement, retraites nous coûterons la peau du c.. dans quelques années. Trop avantageux en comparaiso...

le 15/09/2016 à 9:30
Signaler
Ce que vous dites reste à prouver (comparez donc avec les coûts salariaux chargés des agents publics des autres pays ou avec le privé quand le privé opère). Ce n'est pas sur le coût salarial horaire qu'on peut économiser dans l'administration mais su...

à écrit le 14/09/2016 à 17:48
Signaler
"Même le FMI fait son mea culpa" concernant l'objectif du respect des 3 % de déficit du budget par rapport au PIB. C'est un 1er et petit pas, mais quand même symbolique ! Il leur reste, à Fillon aussi, comme à tous les candidats, d'en faire un bien ...

le 15/09/2016 à 9:34
Signaler
Il ne s'agit pas de s'aligner sur l'Asie mais simplement sur la plupart des pays de la zone euro ayant un niveau de vie comparable au nôtre

à écrit le 14/09/2016 à 17:45
Signaler
il faut plus de details sur les 30% d'économie à realiser par l état tout en augmentant de 12 milliards le régalien...quand c'est flou...

à écrit le 14/09/2016 à 17:18
Signaler
ce que Fillon et Juppé ne vous disent pas:une partie du PIB vient de la richesse produite par les services publics qui est donc comptabilisée positivement dans le PIB.si ces gens repassent au pouvoir,ils baisseront la dépense publique et nous nous ...

le 15/09/2016 à 6:57
Signaler
@ Elu ps, La richesse produite par les services publics est negligeable si elle se rapportent aux impots et charges sur les entreprises pour payer les salaires des fonctionnaires. Les entreprises sont le moteur de l'economie elle paient les impot, le...

le 15/09/2016 à 9:39
Signaler
En réalité il faudrait vendre tous les services publics, et compenser cela par des transferts (l'impôt serait uniquement dédié aux transferts, il y aurait des redevances par ailleurs). Là les chiffres auraient en effet plus de signification.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.