Crise du Golfe : la médiation américaine piétine

Alors que des personnalités de premier plan de la Maison-Blanche s'envolent à tour de rôle vers le Moyen-Orient pour tenter de réconcilier les parties, le conflit s'enlise encore et toujours entre le Qatar d'un côté et le quartet emmené par l'Arabie saoudite de l'autre.
Jean-Christophe Catalon
En septembre lorsqu'il a proposé ses services de médiateur, Donald Trump avait fait état de son "très fort pressentiment" quant à une résolution "assez rapide" du conflit.

Malgré les efforts américains, les relations entre le Qatar et ses voisins du Golfe ne montrent aucun signe de réchauffement. Au contraire. Depuis que le président Donald Trump a décidé de jouer les médiateurs en septembre, des personnalités de premier plan de la Maison-Blanche enchaînent les visites dans la région : d'abord le secrétaire d'Etat Rex Tillerson, il y a dix jours, et maintenant le secrétaire du Trésor Steven Mnuchin.

Mais rien y fait. Le chef de la diplomatie de Bahreïn - l'un des quatre pays avec l'Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et l'Egypte à l'origine du blocus - a proposé lundi de geler l'adhésion du Qatar au Conseil de coopération du Golfe (CCG), selon RFI. Manama exige de Doha qu'il se plie aux demandes formulées par le quartet cet été. En réaction, l'émir du Qatar a accusé ses voisins de vouloir renverser son régime. Difficile dans ces conditions d'envisager une sortie de crise, alors que le conflit s'apprête à entrer dans son sixième mois.

L'Iran : la bête noire de Washington

Durant sa visite à Riyad le 22 octobre, Rex Tillerson a participé à la séance inaugurale du Conseil de coopération irako-saoudien, organe créé avec l'appui de Washington pour contenir l'influence grandissante de l'Iran. Avant d'entamer sa tournée au Moyen-Orient le week-end dernier, Steven Mnuchin a fait part mercredi dernier de sa volonté d'augmenter la pression financière sur Téhéran et d'anéantir le financement du terrorisme dans la région.

L'administration Trump a la République islamique en ligne de mire, l'accusant de déstabiliser la région par son appui à des groupes armés. Le président américain lui-même avait défini un axe du "Mal" composé de l'Etat islamique... et de l'Iran, lors de sa tournée dans les pays du Golfe en mai. La remise en cause par Washington de l'accord sur le nucléaire iranien mi-octobre reflète aussi l'état des relations entre les deux puissances.

Trump pressentait une résolution "assez rapide"

Or, le 5 juin, lorsque le quartet du Golfe a décidé le blocus, il accusait Doha de soutenir le terrorisme, notamment les activités de groupes armés appuyés par l'Iran dans l'Est saoudien (où se concentre la minorité chiite du royaume), ainsi qu'à Bahreïn, secoué depuis plusieurs années par des troubles animés par sa majorité chiite.

Pour faire preuve de bonne foi devant Washington, le Qatar a signé début juillet un accord de lutte contre le terrorisme avec les Etats-Unis lors de la première venue de Rex Tillerson. Le quartet a dû revoir en conséquence ses exigences envers Doha, mais les discussions n'ont jamais repris entre les parties. L'émirat a alors décidé d'avancer de son côté en se tournant... vers l'Iran. Fin août, Doha et Téhéran ont rétabli leurs relations diplomatiques.

Dans un entretien à Bloomberg le 19 octobre, Rex Tillerson a regretté que l'Arabie saoudite et ses alliés n'aient pas déployé davantage d'efforts pour désamorcer la crise. Sorte d'aveu d'impuissance de la part du secrétaire d'Etat américain. Et dire qu'en septembre lorsqu'il a proposé ses services, Donald Trump avait fait état de son "très fort pressentiment" quant à une résolution "assez rapide" du conflit.

Jean-Christophe Catalon
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