Face à Trump, l'Allemagne et la France veulent se rapprocher

Lors d'un débat organisé ce jeudi 12 juillet à Paris, le ministre allemand de l'Économie Peter Altmaier a exprimé sa volonté de renforcer la coopération sur le plan économique et climatique entre l'Allemagne et la France, dans un contexte de tensions commerciales et diplomatiques exacerbées.
Grégoire Normand
Le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, et son homologue allemand, Peter Altmaier, ont exprimé le 11 juillet au soir leur volonté d'avancer main dans la main en pleine montée des tensions commerciales mondiales.
Le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, et son homologue allemand, Peter Altmaier, ont exprimé le 11 juillet au soir leur volonté d'avancer "main dans la main" en pleine montée des tensions commerciales mondiales. (Crédits : Reuters)

Alors que les tensions commerciales et diplomatiques ne cessent de s'accroître, le ministre allemand de l'Économie et de l'Énergie Peter Altmaier a insisté sur la nécessité de renforcer les liens entre la France et l'Allemagne lors d'un débat organisé par l'institut Montaigne, à la Maison de la Chimie, ce jeudi 12 juillet.

À l'heure où le multilatéralisme est remis en cause par les États-Unis, les deux puissances européennes veulent affirmer leur unité. Au sommet de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (Otan) qui vient de s'achever à Bruxelles, le président américain Donald Trump a déclaré qu'il était "très inapproprié" que les États-Unis payent pour la défense des Européens contre la Russie alors que le pays le plus riche d'Europe, l'Allemagne, négocie des contrats gaziers avec Moscou.

Lire aussi : Au sommet de l'OTAN, Trump accuse l'Allemagne d'être "totalement contrôlée" par la Russie

Une coopération "nécessaire"

Le multilatéralisme et la coopération sont devenus des axes prioritaires pour le ministre allemand. Lors de son intervention devant un public nombreux, il a rappelé qu'il était « extrêmement nécessaire de se mettre d'accord avec la France [...] La valeur économique des sanctions entre les États-Unis et la Chine est supérieure à celle des sanctions entre l'Europe et les États-Unis [...] Le défi pour l'Allemagne et la France est d'expliquer le monde. »

Pour le responsable allemand chrétien-démocrate, « le climat reste le plus grand défi actuellement. L'accord de Paris est une loi fondamentale de notre époque. » Sur le sommet de l'Otan, il a assuré qu'il voulait « tout faire pour renforcer l'organisation au lieu de la démanteler. » En revanche, il est resté très prudent sur le président américain rappelant que « à la différence de la Russie, Donald Trump a été élu de manière démocratique. »

Après une réunion avec le ministre allemand qui s'est tenue la veille, Bruno Le Maire a également exprimé la volonté de renforcer ce rapprochement. « L'Allemagne et la France ont toujours avancé main dans la main. Sur la question du commerce mondial, je peux vous garantir qu'elles continueront d'avancer main dans la main dans les semaines et dans les mois qui viennent. »

« Nous sommes préoccupés par les décisions américaines en matière de commerce. Nous considérons que l'augmentation des tarifs décidée par l'administration américaine est à la fois injustifiée et injustifiable », avait déclaré en préambule Bruno Le Maire, estimant que « l'Union européenne a eu la bonne réponse : une réponse ferme, une réponse mesurée et une réponse unie ».

Avant de poursuivre, dans des propos rapportés par l'AFP :

« Quelles que soient les décisions que prendra le président américain dans les mois à venir, nous estimons, avec Peter Altmaier, que la réponse européenne doit rester une réponse unie et une réponse ferme. Personne ne divisera la France et l'Allemagne, et personne ne divisera les nations européennes ».

Coopération économique

Pour concrétiser cette coopération, Bruno Le Maire et Peter Altamaier ont supervisé la signature d'un accord entre la Banque publique d'investissement et son équivalent allemand, la KFW, qui « va permettre la réalisation de co-investissements dans des fonds franco-allemands de capital-risque des deux côtés du Rhin. » « Cela veut dire la mobilisation de jusqu'à un milliard d'euros d'investissements publics et privés qui vont donner les moyens aux meilleurs acteurs nationaux du capital-risque de devenir européens au bénéfice des startups en croissance dans tous les secteurs, le digital, les biotechnologies, les écotechnologies », a énuméré le ministre français.

Outre cet accord, le locataire de Bercy a rappelé la volonté de la France de créer un fonds pour l'innovation industrielle de 10 milliards d'euros qui sera financé par des cessions d'actifs dans ADP, la Française des jeux et Engie.

« Nous souhaitons que ce fonds soit le préalable à un fonds européen de l'innovation et sans doute que cela se fera d'abord avec l'Allemagne, pour financer des projets très concrets dans le domaines des nouvelles technologies », a déclaré Bruno Le Maire, appuyant la proposition faite par son homologue "d'un Airbus de l'intelligence artificielle". « Nous nous sommes donné avec Peter jusqu'à la fin de l'année pour finaliser ce projet commun dans les grandes lignes et commencer à définir un calendrier », a t-il conclu.

Baisse des prévisions économiques

Cette volonté de rapprochement intervient alors que la Commission européenne vient d'abaisser ce 12 juillet ses prévisions de croissance pour la zone euro en 2018, en raison des tensions commerciales entre les États-Unis et l'Europe. Le commissaire européen Pierre Moscovici a expliqué que « la légère révision à la baisse par rapport au printemps traduit l'impact des tensions commerciales et de l'incertitude politique sur la confiance et la hausse des prix de l'énergie. »

Par rapport aux prévisions du printemps dernier, les fonctionnaires de la commission prévoient un tassement de 0,2 point avec une croissance qui devrait atteindre 2,1% cette année et 2,1% l'année prochaine tant dans l'UE que dans la zone euro. Dans leurs dernières projections, ils estimaient que la croissance pourraient atteindre 2,3% en 2018.

« Le scénario de référence présume qu'il n'y aura pas de nouvelle escalade des tensions commerciales. Si la situation devait toutefois se tendre davantage, les échanges commerciaux et l'investissement, mais aussi le niveau de richesse de tous les pays concernés, s'en ressentiraient. Parmi les autres risques figure celui d'une volatilité des marchés financiers liée notamment à des risques géopolitiques », précise la Commission dans un communiqué.

Lire aussi : Le monde de demain, entre risques et promesses

Grégoire Normand
Commentaires 15
à écrit le 15/07/2018 à 11:59
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rapprochement franco-allemand ? Mme Merkel a unilatéralement proposé à Mr Trump de supprimer tous droits de douane sur le secteur automobile dans le cadre des règles OMC ; mais la France n'est bien sûr pas d'accord car cela ouvrirait la porte à une ...

à écrit le 14/07/2018 à 17:04
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Les effets d'annonce sont déjà une chose, mais ils restent des mots. Rapprochement de quoi, et qu'est-ce que ça implique ? Si seul le capital-risque est concerné, ça n'a pas d'importance mais ça ne coûte rien. Ce qui importe coûte, et je n'ai pas...

à écrit le 13/07/2018 à 16:55
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"On veut se rapprocher !" Voilà ça y est ça c'est fait. Prochain dossier le chômage: "On veut l'éradiquer !" Ok parfait continuons... Vite un frexit.

à écrit le 13/07/2018 à 9:19
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Une action entraîne une réaction que le provocateur ne pouvait ignorer, mais qui surprenne encore les soit disant victimes!

à écrit le 13/07/2018 à 8:26
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La France a changé avec le Président MACRON, mais l'Allemagne doit aussi évoluer, en abandonnant sa politique mercantile avec la défense des seuls intérêts commerciaux de l'Allemagne. L'Allemagne doit s'engager dans une Politique responsable de coopé...

à écrit le 13/07/2018 à 7:44
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Bonne question; bonne réponse. Cela dépend de l'imputation des charges sociales, sur la production en France à la charge des entreprises, sur la consommation en Allemagne à la charge des ménages.

à écrit le 13/07/2018 à 7:31
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Pourquoi ? , ils étaient éloignés ? Belle réussite l'UE ......

à écrit le 12/07/2018 à 23:28
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"plan économique et climatique" climatique ! " ils ont prévu d'acheter des parapluies ou des clim ? Marrant mais la mère Kel je lui achèterais pas une voiture d'occaze

à écrit le 12/07/2018 à 23:13
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Nous y voilà. Quinze ans que l'Allemagne joue la carte de son hinterland est-européen en tournant le dos à la France et en faisant financer ses retraites par "sa" politique monétaire... Quinze ans que nous faisons de vains appels du pied à plus de so...

le 15/07/2018 à 21:11
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Et il n’est pas trop difficile de prevoir ce que fera l’allemagne si Trump n’est pas reellu...

à écrit le 12/07/2018 à 20:27
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Si l'empire carolingien se relève. Ça va faire très mal.

à écrit le 12/07/2018 à 18:56
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Pour 3 ans et 10 mois, Amis Allemands ! Songez avant ! que les Pires Ennemis de l'Allemagne, et du Peuple Allemand : Mélanchons ( dictature communiste) OU Le Pen, peuvent " succéder " à Emmanuel Macron. Les français sont imprévisibles et inconstants...

à écrit le 12/07/2018 à 17:57
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Merci à Trump de montrer à la France ce qu'elle doit faire : relocaliser la production en Europe.Cela fait longtemps que les allemands le font. Comment est-il possible qu'un euro ait un pouvoir d'achat plus élevé en Allemagne qu'en France?

le 12/07/2018 à 18:19
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@boule : le pouvoir d'achat de l'euro dans les différents pays dépend des prix ,lesquels ne dépendent pas uniquement de la monnaie.

le 12/07/2018 à 21:39
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Les allemands, tant critiqués pour leurs excédents commerciaux, ne relocalise pas, simplement ils n'ont pas délocalisé.

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