La France peut-elle conquérir le juteux marché chinois de la "silver économie" ?

Avec sa population vieillissante et ses nouveaux investissements dans la santé, la Chine représente un marché prometteur pour les sociétés françaises spécialisées dans l'économie au service des personnes âgées ("silver économie"). Pour ne pas perdre des opportunités, la clé est de faire en sorte que les normes des entreprises françaises soient celles du pays, jugent certains acteurs.
Jean-Yves Paillé
18% de la population chinoise aura plus de 60 ans en 2030.

Mercredi, lors des 3e journées internationales des Rencontres internationales de la silver économie, ayant pour thème les marchés porteurs de l'économie au service des personnes âgées, la Chine était sur toutes les lèvres.

Rui Ren, membre de Business France, estime que le pays représente une vraie opportunité pour les entreprises françaises en raison du vieillissement accéléré de sa population: "Les plus de 60 ans sont plus de 200 millions, soit 14% de la population, en 2030 ils représenteront 18% des habitants du pays. [...]. Une série de mesures politiques a été mise en place par le gouvernement pour améliorer les services destinés aux personnes âgées."

"L'accompagnement médicalisé des personnes dépendantes, secteur le plus porteur en Chine"

"La politique de l'enfant unique est l'un des facteur du vieillissement de la population et a poussé les collectivités chinoises à la prise en charge en institution", ajoute Ludovic Guillaume, directeur du développement du groupe Orpea. Cette société française, qui détient 715 établissements dédiés aux personnes dépendantes (maisons de retraite, cliniques de moyen séjour et de psychiatrie) dans le monde, a ouvert son premier Ehpad dans le pays, à Nankin, cette année. Avec une particularité: la filiale d'Orpea n'a pas eu besoin de passer un partenariat avec un acteur local. D'autres français ont pénétré le marché chinois des établissements dédiés aux personnes dépendantes, comme Colisée qui s'est allié fin 2014 au chinois Merchant.

Ces derniers ont ainsi pris le train de "l'accompagnement médicalisé des personnes dépendantes, secteur le plus porteur en Chine et priorité politique pour les dirigeants du pays", note Benoit Colinot, membre de Business France basé en Chine. Ce dernier ajoute que le pays a d'autres gros besoins, avec 10 millions de Chinois atteints d'Alzheimer, pour lesquels les solutions adaptées manquent.

Autre constat de Rui Ren: la Chine "est très influencée par le confucianisme, et donc très attachée à la famille", ce qui accentue le désir de maintenir les personnes âgées au domicile. Cela pourrait ouvrir des portes à des sociétés françaises proposant des solutions de télémédecine, services à la personne, ou encore domotique...

Prendre le train de la mise aux normes

Mais la France n'est pas la seule à s'intéresser au marché chinois de la silver économie, et se retrouve en concurrence avec d'autres pays, comme le Japon, note Valérie Bernat, responsable développement santé et action sociale de l'association française de normalisation (Afnor). Outre l'entente avec les acteurs locaux, l'adaptation aux besoins de la Chine, la France devra miser sur la normalisation, pour mieux pénétrer le marché, serine-t-elle. C'est-à-dire rentrer un cadre de référence fournissant lignes directrices, prescriptions techniques ou qualitatives, pour leurs produits ou services.

Car Pékin s'intéresse particulièrement au "savoir-faire" français. "La Chine veut savoir si les acteurs français veulent interagir avec elle pour construire les normes de demain", explique-t-elle. Dans ce sens, Benoit Colinot explique que Business France essaie de montrer ce que la filière française peut apporter de plus que les autres filières étrangères.

En 2014, François Hollande et Xi Jinping avaient signé un accord de coopération sur la normalisation dans plusieurs domaines clés, dont celui de la Silver économie. Mais la mise en application tarde. Et face aux enjeux du vieillissement de sa population, "la Chine va devenir impatiente", risquant de se tourner vers d'autres pays. Et, "une norme en Chine devient obligatoire", prévient Valérie Bernat. Nous avons fait un programme de normalisation en France, mais nous n'arrivons pas à le porter à l'étranger", insiste-t-elle.

Selon une étude de l'Afnor, si une entreprise participe à la normalisation, cela lui permet de rationaliser ses coût, de gagner du temps, et de gagner 20% de croissance du chiffre d'affaires global supplémentaire, et un revenu gonflé de 19% de plus à l'export.

Jean-Yves Paillé
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.