En novembre 2016, lorsqu'il était candidat à la présidentielle, le futur président américain avait déclaré que l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (Otan) coûtait trop cher aux Etats-Unis (ils paient plus des deux tiers des dépenses militaires) et avait proposé de faire contribuer davantage les alliés européens au financement de leur défense... faute de quoi ils devraient se débrouiller seuls! Cette menace totalement inédite avait surpris et indigné ses alliés européens.
Le président américain avait même déclaré que l'Otan était "obsolète". En mars 2017, au lendemain d'une rencontre avec Angela Merkel, le président américain avait poussé le bouchon plus loin, fustigeant l'Allemagne qui "doit d'énormes sommes d'argent" à l'Otan et aux Etats-Unis lesquels lui "fournissent une défense très puissante et très coûteuse".
Mais en avril 2017, il revenait en partie sur ses déclarations - à propos de l'obsolescence de l'Otan - devant le secrétaire général de l'organisation, Jens Stoltenberg, lors d'une conférence de presse à la Maison-Blanche : "
"J'ai dit que c'était obsolète. Ce n'est plus obsolète."
L'homme, spécialiste des revirements qui déstabilisent ses adversaires, a relancé hier ses attaques contre ses alliés, y allant d'un tweet depuis son avion présidentiel qui l'emmenait à Bruxelles, message qui a tout d'une volonté d'humiliation publique puisqu'il y traite les Européens de mauvais payeurs.
En français :
"L'Union européenne empêche nos agriculteurs, nos travailleurs et nos entreprises de faire des affaires en Europe (déficit commercial de 151 milliards de dollars américains), et ils veulent ensuite que nous les défendions avec joie par l'intermédiaire de l'OTAN et que nous payions gentiment pour cela. Ça ne marche pas comme ça !"
Trump veut obliger les Européens à respecter leurs engagements
L'objectif du président américain est de mettre à profit ce sommet pour faire une nouvelle fois pression sur les alliés afin qu'ils augmentent leurs dépenses militaires, selon l'explication mardi d'un représentant de l'administration américaine.
Lequel représentant a ajouté que Donald Trump devrait cependant affirmer lors du sommet de l'Otan le soutien des Etats-Unis à l'article 5 du traité de l'Alliance atlantique, selon lequel une attaque menée contre un de ses membres est considérée comme une attaque dirigée contre tous les alliés. Le conditionnel souligné ici indique bien qu'il s'agira donc d'une négociation sous haute tension.
Après le torpillage du G7 par Donald Trump, tout est possible
De fait, un mois après la volte-face américaine au G7, encore dans toutes les mémoires, le sommet annuel de l'Otan s'ouvre mercredi à Bruxelles dans un climat de nervosité et d'incertitudes alimenté par les critiques répétées de Donald Trump contre ses alliés de l'Alliance atlantique, alors que Washington réclame un meilleur "partage du fardeau" de la sécurité.
Budget militaire à 2% du PIB : les bons et les mauvais élèves
Pour autant, les 29 membres de l'Otan se sont engagés en 2014 à porter leurs dépenses militaires à 2% du PIB d'ici 2024. Or, selon des chiffres publiés mardi par l'Otan, en 2017 seuls 4 pays respectent leurs engagements : les Etats-Unis (qui ont versé 3,57% de leur PIB), le Royaume-Uni, l'Estonie, la Grèce et la Pologne ont atteint les 2% du PIB en matière d'effort de défense. Quatre autres - Lituanie, Lettonie, Pologne et Roumanie -les respecteront pour la fin de l'année, a assuré mardi Jens Stoltenberg, secrétaire général de l'Alliance.
Mais ce déséquilibre mécontente grandement Donald Trump, qui considère notamment anormal que les dépenses de défense de l'Allemagne, première économie européenne, ne représentent que 1,24% de son PIB.
Hier mardi, peu avant son arrivée à Bruxelles, Donald Trump, depuis son avion Air Force One, avait ainsi tweeté :
"De nombreux pays de l'Otan, que nous sommes censés défendre, sont non seulement loin de leur engagement actuel de 2% (ce qui est faible), mais ont aussi failli depuis de nombreuses années à effectuer leurs paiements. Vont-ils rembourser les Etats-Unis ?", a dit .
Selon le représentant de l'administration américaine, l'attitude de Trump lors du sommet dépendra de la manière "dont se déroulera la matinée" de mercredi avec les premières rencontres entre le président américain et les autres dirigeants de l'Otan.
"Des pays devraient évoquer leur volonté de faire davantage", a-t-il estimé.
Aux Etats-Unis, les républicains un peu inquiets pour la suite
A Washington, de nombreux membres du Congrès, dont des sénateurs républicains, ont cherché à rassurer sur l'engagement des Etats-Unis auprès de leurs alliés historiques.
"J'espère que les bons signaux sont envoyés à l'Otan. J'espère que rien de similaire à ce qu'il s'est passé au G7 ne va se produire", a dit le républicain Bob Corker, qui siège à la commission sénatoriale des relations internationales.
(avec Reuters et AFP)