Attentats : les Européens unis dans les mots, mais pas dans l'action

A présent, l'Europe a une nouvelle devise qui pourrait être : « La compassion, la tristesse et la peur ». Les attentats terroristes perpétrés à Paris mettent sous une lumière crue l'incapacité de l'Union européenne à parler et, surtout, à agir. Un pas de plus vers la désintégration?
Le moment serait-il venu de sacrifier la liberté de plusieurs centaines de millions d'Européens, même s'ils ne savent quoi en faire, à quelques milliers d'intégristes ? Quelqu'un est-il en mesure d'expliquer cela au nombre, à ceux qui jouissent dans l'indifférence ? L'Union ne serait-elle plus qu'une union de rentiers et de misérables qui peinent faute de travail ?

Encore un. Et les communiqués pleuvent. Tous les partis, toutes les institutions ont exprimé leurs condoléances.

« Il faut résister ensemble à la terreur qui tente de s'installer. Ne pas, ne jamais céder, aimer et défendre la France et ce qui fait sa richesse, sa diversité. »

Ce sont les mots du groupe socialiste.

Quant à eux, les Verts, coprésidés par un Belge et une Allemande, plaident que :

« La meilleure réponse au terrorisme est plus de démocratie et d'ouverture.... Nous n'abandonnerons pas nos valeurs communes ; liberté, égalité, fraternité. »

"Nous avons les moyens de nous défendre"

Dans une version plus "realpolitik", la démocratie-chrétienne, inquiète de la montée du populisme, avertit :

« Nous ne laisserons pas les fanatiques et extrémistes diviser l'Europe et nos sociétés. Nous avons les moyens de nous défendre et nous le démontrerons de toute notre force... A tous les idéologues et extrémistes qui cherchent d'ores et déjà à instrumentaliser ces attentats à des fins politiciennes, nous disons clairement: les démocrates rejetteront catégoriquement toute tentative cynique d'exploiter ces événements tragiques », selon les mots de Manfred Weber, leur chef de file au Parlement.

« La sécurité intérieure et extérieure... La sécurité des Européens est notre première priorité », a déclaré le président du Parti populaire européen Joseph Daul.

Le président du Conseil, l'ex-Premier ministre Donald Tusk, également de centre-droit, avait réagi en pleine nuit :

« Nous demanderons aux dirigeants du G20 à Antalya de répondre à l'extrémisme terroriste. Nous nous assurerons que tout sera fait au niveau européen pour que la France soit un pays sur. Et nous nous assurerons que la stratégie anti-terroriste européenne soit à la hauteur des défis dans les mois à venir. »

Des mots usés jusqu'à la corde

Nous en sommes là. Il y a les mots de la République : liberté, égalité, fraternité, usés jusqu'à la corde. Mais, à présent, l'Europe a une nouvelle devise qui pourrait être : « La compassion, la tristesse et la peur. »

Et les Européens se demandent : où étaient-ils, nos dirigeants quand, il y a plus d'un an, la chancelière Merkel demandait le soutien de l'Europe centrale, Pologne, République tchèque, face à l'afflux de réfugiés ? Et où était Mme Merkel quand il s'est agi de décider de faire pression sur Bachar el Assad ? Où était le « service d'action extérieure européen » pour décider ou pas de mâter ce régime, dont les équipements ont engraissé l'industrie française et allemande, et qui bombardait sa propre population, désormais massée dans des camps au Liban et en Jordanie ?

L'Etat islamique marque un point

Tous ces dirigeants étaient en tête de cortège après l'attentat contre Charlie Hebdo en début d'année. A présent, les manifestations sont interdites... jusqu'au 19 novembre en France. L'Etat islamique marque un point. La compassion n'est plus faite que de mots. Le courage physique, son prolongement naturel, lui est interdit. Et nous voilà revenus au dur labeur de l'action politique.

Laurent Fabius sera à Antalya, à la réunion des chefs d'Etat du G20. A la place de François Hollande qui ne veut pas aller en Turquie. Moyennant quoi, Laurent Fabius ne sera pas au Conseil affaires générales qui se tient lundi à Bruxelles. Autant dire que celui-ci ne servira à rien. Deuxième point.

Vitrine très compétente

Gilles de Kerchove, le chef de lutte anti-terroriste pour l'Union européenne, se tait. Il est une vitrine. Vitrine très compétente, mais vitrine tout de même. Il n'a pas le droit de parler maintenant, mais il sait. Il sait le nombre des jeunes radicaux de l'Etat islamiste revenus en Europe. Le pouvoir, la parole sont ailleurs, hélas.

Selon Claude Moniquet, un ancien de la DGSE, ancien correspondant de La Tribune en Europe centrale avant la chute du Mur, une quinzaine d'attentats ont été déjoué depuis le 15 janvier, date de l'attentat contre Charlie Hebdo. « 20.000 volontaires étrangers », pour l'Etat islamique, selon l'Onu, dit-il. Plusieurs milliards de dollars en réserve. 45.000 à 60.000 combattants en Syrie et en Irak. Al Qaïda était une blague.

De quel côté penche la balance ? « Elle penchait de notre côté, jusqu'à hier. A présent, c'est du leur », explique le fondateur de la société de renseignemets EFISC (Europe Stretagic Intelligence and Security Center), qui conseille une demi-douzaine de sociétés du CAC 40.

Un pas de plus vers la fragmentation européenne

François Hollande a fermé les frontières. Après les migrants, le terrorisme. Un pas de plus vers la fragmentation européenne. La route est toute tracée. Les élections régionales en 2016 en France, nationales en 2017 en Allemagne et en France. La liberté a perdu. La peur, plutôt que la compassion et l'intelligence, plutôt que la faculté de décider et de convaincre. Voilà nos dirigeants otages d'une majorité inquiète ou simplement indifférente, enkystée dans le travail ou le plaisir des vacances, indifférente à l'avenir.

Le moment serait-il venu de sacrifier la liberté de plusieurs centaines de millions d'Européens, même s'ils ne savent quoi en faire, à quelques milliers d'intégristes ? Quelqu'un est-il en mesure d'expliquer cela au nombre, à ceux qui jouissent dans l'indifférence ? L'Union ne serait-elle plus qu'une union de rentiers et de misérables qui peinent faute de travail ? Pouvons-nous laisser à quelques jeunes gens exaltés le pouvoir de décider de notre destin ? Qui mettra les chiffres sur la table ? Combien pour une vraie politique de migration ? Combien pour une politique de défense ? Et comment ?

Voilà les questions posées par les attentats d'hier soir. Il y a urgence à inventer. Il y a beaucoup en jeu. Soixante-dix ans d'histoire. Et le destin d'une ou deux générations. Rien que cela, contre un peu de confort. Quelqu'un aura-t-il le courage de dire que la richesse est ailleurs ? Lundi, François Hollande ne sera pas à Antalya. Hélas.

Commentaires 21
à écrit le 15/11/2015 à 15:04
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Notre EU ressemble de plus en plus à une coquille vide car hormis le marché, l'EU n'existe pas... Nos passeports "européens" ne sont européen que de nom, nous avons des ambassades dans les pays de l'union mais pourquoi? Nous sommes incapables après p...

le 20/11/2015 à 11:26
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Un triste bilan certes mais réaliste. Toutes les mesures d´intégration n ont fonctionné que par beau temps : Schengen, l Euro ... En réalité l EU c est uniquement une grosse cagnote où chacun veut en retirer le maximum de fric et rien d autr...

à écrit le 15/11/2015 à 14:42
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Désintégration? C'est simplement une auto-désintégration de quelque chose qui ne fonctionne pas! Sinon... la question ne se poserai pas! Seul des intérêts privés s'y opposent!

à écrit le 15/11/2015 à 14:02
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Très bel article, des faits juste des faits. Les conséquences des erreurs innombrables liées aux délires de l'Europe sont clairement décrites ..Le contenu éditorial de la Tribune est vraiment le plus proche des réalités quotidiennes . Un peu de fraîc...

à écrit le 15/11/2015 à 12:08
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Tant qu'il n'y aura pas un véritable pouvoir exécutif européen issu d'un vrai Parlement élu sur des listes européennes l'Europe ne pourra que stagner à ce niveau ou régresser.

à écrit le 15/11/2015 à 10:26
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Un article qui manie l'amalgame par excellence, avec des conclusions à l'emporte-pièce qui n'ont rien à voir avec l'argumentation. C'est du vrai n'importe quoi.

à écrit le 15/11/2015 à 10:14
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« L'obligation des sujets envers le souverain ne dure qu'aussi longtemps que celui-ci à la force de les protéger. Car le droit naturel qu'ont les hommes de se protéger, lorsque personne d'autre n'est en mesure de le faire, ne saurait être aboli par a...

à écrit le 15/11/2015 à 8:55
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C'est pas une défense qu'il faut c'est un vrai contrôle aux frontières ...Orban a raison d'avoir érigé une frontière en barbelé tout autour de son pays ... Rappelez-vous la réaction de Valls ... Il me qualifiait de dictateur et bla-bla-bla ... Je sui...

à écrit le 15/11/2015 à 8:54
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Exactement le genre d'article qu'attendent les terroristes. Bravo, encore Florence Autret et sa frustration anti-europeenne, vous allez recevoir le prix Daesh... !!! Il ne vous manque qu'une pincée de bonne haine lourde de troll FN, pour faire complè...

à écrit le 15/11/2015 à 6:26
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La France et la Grande Bretagne sont les seuls à payer pour La Défense de l'Europe (encore que la GB ne veut plus être sur le terrain). Pendant ce temps les autres tels que le Luxembourg et l'Irlande aident les multinationales à ne pas payer d'impôts...

à écrit le 14/11/2015 à 23:28
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L'article est terriblement juste. Les deux guerres mondiales d'origine européenne ont suffisamment démontré sur le moyen terme et plus, sur le long terme qu'il ne restait plus qu'une Vielle Europe vassalisée pour le Nouveau Monde, vainqueur devenu hé...

le 15/11/2015 à 8:56
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Et on fait quoi, d'après vous ? Une nouvelle guerre europeenne ? Il faut vous reposer, Monsieur, ou prendre un peu de Prozac !!!!

à écrit le 14/11/2015 à 21:55
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Le titre de la Tribune est parfait : Attentats : les Européens unis dans les mots mais pas dans la réalité Examinons les dernières explications données par le Procureur de Paris : Les assassins terroristes qui tuent les Français sont arrivés de...

à écrit le 14/11/2015 à 21:27
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A quand une véritable défense Européenne ? Pourquoi les Français sont-ils si seuls aux avant-postes de la lutte contre le terrorisme ? La plupart des pays Européens sont bien contents de nous savoir en première ligne mais ils ne risquent pas de s'y e...

à écrit le 14/11/2015 à 20:44
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Tant que la charia existera sur terre, le fanatisme religieux s'étendera. Les "défenseurs" des droits de l'homme s'attaquent à des hommes de mains incultes dans le désert, mais ne touchent pas aux "cadres" et inspirateurs des mouvements djihadistes, ...

à écrit le 14/11/2015 à 20:18
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Monsieur le Président Jusqu'à quand allons nous subir la crainte de sortir la crainte de vivre. On veux nous tuer. On veux tuer nos valeurs au nom de Allah. . Il y a eu un janvier sanglant, maintenant un novembre mortuaire. Il faut changer un couple...

à écrit le 14/11/2015 à 19:41
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Quand Daesh promet la mort aux citoyens normaux, surtout les Français, il ne faut pas renforcer les contrôles aux frontières. Quand quelques centaines de phraseurs bien-pensants viennent à Paris pour se taper la cloche aux frais des contribuables, so...

à écrit le 14/11/2015 à 18:50
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Pour l'Europe, la politique des petits pas ne tient plus. Il en faut un gros, de pas.

le 14/11/2015 à 20:29
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Il fallait que l'Europe et les pays occidentaux mettent en demeure les pays de la charria de retirer la fatwa contre saldam rushdi sous paine de rupture diplomatique C'est à ce moment là qu'il fallait agir plutôt que de collaborer avec des pays qui...

le 14/11/2015 à 22:05
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alors toujours pas de commentaires des ambassades de l'Arabie Saoudite , du Quatar ou de l'Iran ?- trop occcupés à célébrer sans doute Si ces pays accordaient la moindre valeur au mot 'Umma' ils accueilleraient tous les réfugiés et pauvres de l'Is...

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