L'économie de la zone euro va-t-elle s'engager dans un cercle vertueux ?

La baisse de la monnaie unique rend la zone euro optimiste pour son économie. Mais cette baisse est-elle capable de pouvoir dynamiser l'ensemble de l'économie par le biais de l'investissement ?
La baisse de l'euro peut-elle entraîner le reste de l'économie ?

Depuis quelques semaines, un vent d'optimisme inédit depuis 2010 souffle sur l'économie de la zone euro. La plupart des conjoncturistes révisent leurs prévisions pour 2015 et l'indice Markit PMI des directeurs d'achats de la zone euro a atteint en début de mois un plus-haut de sept mois. Le scénario qui est actuellement dans toutes les têtes est celui du fameux cercle vertueux dont rêvent les dirigeants européens depuis plusieurs années : des exportations qui tirent la croissance en stimulant l'investissement, puis l'emploi.

Il est vrai que, jamais, la possibilité d'un tel scénario n'a semblé aussi possible. La spectaculaire baisse de l'euro qui, en un an, a perdu près d'un quart de sa valeur, conjuguée à celle des matières premières et singulièrement du pétrole, offre une belle opportunité à la compétitivité européenne. Mais cette conjonction sera-t-elle suffisante pour sortir la zone euro de l'apathie dans laquelle elle végète depuis qu'au deuxième trimestre 2013, elle est sortie de la plus longue récession de son histoire (sept trimestres) ?

Faible impact pour le moment

Le moteur principal de la reprise en zone euro au troisième trimestre a été la consommation. Clairement, l'effet de la baisse de l'euro sur les exportations se fait attendre. En janvier 2015, selon Eurostat, les exportations de la zone euro vers le reste du monde étaient même en légère baisse (600 millions d'euros sur un total de 148,2 milliards d'euros) par rapport à janvier 2014, date à laquelle l'euro était 25 % plus cher. Autrement dit, l'effet de la chute de la monnaie unique est, pour le moment, surtout psychologique.

Temps d'adaptation

Reste qu'il y a toujours un temps d'adaptation aux nouvelles conditions de change. « Les entreprises peinent à s'ajuster à cette nouvelle donne des changes », explique Christopher Dembik, économiste chez Saxo Bank, pour qui ce qui manquent aux exportateurs, c'est « de la stabilité. » Une fois l'adaptation effectuée, l'effet ne devrait pas manquer d'être positif. Mais en n'oubliant pas que la baisse de l'euro compense en partie l'effet de la baisse du prix du pétrole en dollar. Reste à connaître l'ampleur de la baisse de l'euro in fine et de ses effets.

L'euro vers les 80 cents ?

La baisse de l'euro a un moteur principal : la différence immense de politique monétaire entre la BCE qui ouvre les vannes monétaires et la Fed qui les resserre. Si tout se passe comme le pensent les économistes, l'euro peut encore reculer beaucoup. Goldman Sachs prévoit même un euro à 80 cents de dollar, au-delà du plus bas historique de 82 cents. Dans ce cas, l'euro sera à un niveau favorable pour l'ensemble des pays de la zone et le renchérissement des importations ne manquera pas d'agir sur l'inflation.

La guerre des monnaies

Mais il convient de rester prudent : la BCE est en réalité engagée dans une guerre des monnaies de grande ampleur. La Fed a, mercredi 18 mars, montré qu'elle se préoccupait du renchérissement du dollar qui pénalise les exportations, devenues importante pour la croissance américaine, et qui pèse sur l'inflation. Il n'est pas sûr que Janet Yellen accepte la stratégie européenne qui consiste à exporter sa déflation vers les Etats-Unis. Sans compter que Washington et Francfort ne sont pas les seuls en lutte. Les autres pays européens, Suisse, Danemark et Suède, ainsi que les pays d'Europe de l'est et les pays émergents se défendent contre cette tentation. Au final, la baisse de l'euro face à l'ensemble des monnaies pourraient être freinée. « La guerre des monnaies est souvent un jeu à somme nulle et je ne suis pas certain que la BCE pourra la gagner », estime Christopher Dembik.

Une demande mondiale faible

Autre élément clé de la réussite de cette stratégie : la demande mondiale. Déjà mise sous pression par cette guerre des monnaies, elle souffre profondément du ralentissement de plusieurs marchés émergents, comme la Russie, le Brésil ou la Chine. Sans compter que la hausse du dollar pose de grands défis aux émergents qui voient les investissements rejoindre les Etats-Unis et leur dettes en dollars se renchérir. Du coup, si les entreprises de la zone euro peuvent profiter d'une meilleure compétitivité, le gâteau du commerce mondial pourrait être plus réduit à se partager. Au final, l'effet pourrait donc ne pas être si important.

Qui profitera de la baisse de l'euro ?

Sans compter que tous les pays de la zone euro ne profiteront pas également de la baisse de l'euro. L'Allemagne est clairement en position favorable pour tirer son épingle du jeu. Les produits allemands sont déjà fort demandés lorsqu'ils sont chers, ils deviennent incontournables lorsque la baisse de l'euro les rend plus abordables. Leurs concurrents hors zone euro ou dans la zone euro en pâtissent. D'autant que des pays comme l'Italie ou la France ont vu leur potentiel de production en partie dégradé par la crise. C'est notamment vrai de l'Italie qui, en théorie, est le pays qui devrait le plus profiter de la baisse de l'euro, mais qui a subi une forte désindustrialisation lors de la phase d'austérité du pays. Aujourd'hui, l'Italie devrait profiter dans une moindre mesure de la baisse de l'euro.

L'investissement va-t-il en profiter ?

Reste ensuite à savoir si cette baisse de l'euro sera capable de transmettre à l'économie une impulsion capable de développer l'investissement, la clé de la vraie croissance européenne. Sur ce point, il existe beaucoup d'incertitude. La longue période d'inflation faible et la faible utilisation des capacités de production n'inciteront pas à investir dans l'immédiat, il faudra redresser les marges d'abord, sauf peut-être en Allemagne. Il est donc très risqué de miser sur le seul levier monétaire pour redresser la demande.

La pièce manquante du puzzle

L'assouplissement quantitatif de la BCE peut-il apporter la clé manquante ? Il devrait aider à favoriser les projets qui verront le jour, mais la BCE n'est pas capable de stimuler à elle seule la demande. Et l'on voit là encore, qu'il manque une pièce au puzzle de la reprise européenne. Certes, en levant le poids de l'austérité et en accordant des délais à certains pays comme la France, on a permis un redressement de la consommation, mais pas suffisamment pour entraîner l'ensemble de l'économie. La zone euro reste dans une logique de lent rattrapage. L'épée de Damoclès de l'austérité n'est pas encore levée, par exemple en France, où il faudra faire encore des économies l'an prochain, ou en Italie, où l'économie reste dans une phase de stagnation. Compte tenu de la faiblesse de la demande mondiale, les agents économiques vont sans doute se montrer prudents avant de se lancer dans de grands projets.

D'autant que le QE alimentera, comme l'a souligné l'OCDE, une bulle financière qui pourrait vite inquiéter l'économie réelle, encore traumatisée par les exemples de 2008 et de 2010-12. Sans support direct à l'investissement, plus vigoureux que le plan Juncker ou que les 10 milliards d'euros de dépenses supplémentaires en Allemagne, la reprise de la zone euro restera fragile et faible. Trop faible pour faire baisser le premier mal de l'union monétaire, celui du chômage.

Commentaires 27
à écrit le 24/03/2015 à 14:52
Signaler
L'euro a baissé de plus de 21%, passant de 1.38 à 1.09 en moins d'un an. N'oublions pas que par ailleurs notre monnaie est en baisse par rapport à toutes les autres grandes devises...de $A1.80 à 1.30 en quelques années, de NZ$2.2 à 1.40 ( moins 40%!!...

à écrit le 24/03/2015 à 13:44
Signaler
les exportations de l'Allemagne sont peu élastiques au taux de change. L'Allemagne ne sera pas la grande gagnante, car aussi du fait du postionnement haut de gamme les exportateurs allemands ne baissent pas leurs prix en devises sur les marchés extér...

à écrit le 24/03/2015 à 11:21
Signaler
il est vain d'attendre une reprise venue de l'extérieur.l'état doit lacher les brides aux collectivités locales qui sont les seules a pouvoir booster l'investissement

le 24/03/2015 à 15:49
Signaler
En s'endettant encore plus... avec une monnaie qui n'appartient même pas aux français?

à écrit le 24/03/2015 à 10:49
Signaler
LA BOURSE BAS TOUS LES RECCORD DE HAUSE DEPUIS DES ANNEES DONC. CELA PROUVE UNE BONNE SANTE DE L ECONOMIE FRANCAISE? ALORS POURQUOI LA CROISANCE NE REPART PAS EN FRANCE?QUE FAIS LE GOUVERNEMENT SOCIALISTE???

à écrit le 24/03/2015 à 10:29
Signaler
"cette baisse est-elle capable de pouvoir "!!!!! Monsieur le journaliste!!! vous etes responsable pour une grande part de la langue française..alors évitez ce genre de doublon, qui n'apporte rien!!!!!!!!!!!! "cette baisse est-elle capable " suffit....

à écrit le 24/03/2015 à 10:23
Signaler
au temps dinosaures , cad du Franc, notre pays sortait sa baguette magique pour régler tous problèmes et hop... pas d'effort a faire une petite devaluation. 17 au total sans jamais régler les problèmes de fond de compétitive. Et a chaque fois on perd...

à écrit le 24/03/2015 à 9:59
Signaler
La baisse de l'euro va certainement être bénéfique mais pas beaucoup puisque la gande partie de nos usines de production ont été délocalisées hors de l'Europe.

à écrit le 23/03/2015 à 22:26
Signaler
Comment peut-on se réjouir de voir l'euro tombé à 80 cents? Déjà @ 1.10 notre monnaie est sous évaluée alors à 80 cents.....n'oublions pas que cela veut dire pour nous européens un appauvrissement considérable ...mais bon, personne ne semble avoir co...

le 24/03/2015 à 8:02
Signaler
Ce n'est pas parce que mon voisin décrète qu'un objet coûte tant d'argent que je m'appauvrit! La monnaie n'est qu'un "moyen" d'échange et non pas un "but"!

à écrit le 23/03/2015 à 21:55
Signaler
L’Europe dynamique ? C’est une oxymort : si la France et l’Italie faisaient partie du G3 entre 1960 et 1980, la croissance italienne depuis 2010 est négative en 7ème de l’ancien G7. La France perd 3 places en 80 et devient 6ème sur la décennie, puis ...

à écrit le 23/03/2015 à 21:19
Signaler
C'est juste un effet à court terme. L'euro a baissé et nous n'avons plus de pouvoir d'achat, nous. Par contre les investisseurs possédant d'autres devises rachètent tous nos bijoux de famille. Cela donne un effet temporaire....c'est tout. Si vo...

à écrit le 23/03/2015 à 18:12
Signaler
De toutes façons on commerce pour 70 % avec la zone euro donc !!!!! Allez faire un tour a la pompe le litre de gazole est revenu pratiquement au prix d'avant la baisse du pétrole, cherchez l'erreur !!!!!!! Donc ses baisses profitent à qui !!!!!!!!

le 24/03/2015 à 6:47
Signaler
Le pétrole est acheté en dollar et le dollar s'est apprécié de 30% par rapport à l'euro. Il n'y a donc pas d'erreur c'est mathématique. Et comme on importe plus en France qu'on exporte ça ne va pas s'arranger.

à écrit le 23/03/2015 à 17:16
Signaler
si le gouvernement continue les efforts, on devrait pouvoir baisser les impôts avant trop longtemps et soutenir la consommation et l'investissement. Il faut croiser les doigts et espérer que la reprise se confirme. On sait que les sujets autour de la...

le 24/03/2015 à 6:12
Signaler
renovation de l'habita : encore fallut-il des artisans compétent !!!!

à écrit le 23/03/2015 à 15:55
Signaler
La vraie question, qui déterminera la croissance à moyen terme est celle de l'investissement. C'est là que l'intelligence des dirigeants est attendue. Profiter d'une augmentation des marges c'est bien, mais l'utiliser au paiement des actionnaires c'e...

le 23/03/2015 à 20:48
Signaler
100 % d'accord avec cette analyse. Et le rôle de nos gouvernements sera de favoriser l'investissement au détriment du versement des dividendes.

à écrit le 23/03/2015 à 15:42
Signaler
Otez moi d'un doute, c'est bien d'une dévaluation de l'euro dont il s'agit ? Cette catastrophe qui doit arriver si nous sortions de l'euro pour revenir au franc et nous entrainerez vers une dévaluation de 30%, c'est bien ce qui vient de se passer a...

le 23/03/2015 à 17:10
Signaler
pour rappel notre dette est libellée en euro, donc si nous repassons au franc, qui sera immanquablement dévalué, notre dette en euro sera beaucoup plus cher. Ca n a donc rien à voir avec la situation présente. La démocratie c'est super, mais le nivea...

le 24/03/2015 à 8:07
Signaler
Si nous repassions au franc, notre dette serai libellé en monnaie nationale dans la majorité des cas et de plus, l'euro n'existerai plus!

le 24/03/2015 à 8:07
Signaler
@17:10 : arrêtez de répéter la propagande europeiste sans en vérifier la véracité! Une grande partie de la dette est contractée en droit français qui indique que la dette est libellée en monnaie en cours dans le pays, et donc si c'est le franc, la de...

à écrit le 23/03/2015 à 14:13
Signaler
ca boostera certainement l'espagne voire un peu l'italie, la premiere car elle a fait des efforts structurels enormes, la deuxieme a cause de son tissu de pme exportatrices.... pour la france ca ne va rien faire du tout car tt le monde a compris la ...

le 23/03/2015 à 22:14
Signaler
Les fruits du gouvernement ayrault ? C'est une blague, c'est à cause de ce gouvernement obtu des 2 premières années qu'on est dans une telle mouise !

à écrit le 23/03/2015 à 12:32
Signaler
Pas besoin de gloser sur la reprise en Europe : si c'est dans le journal, c'est que c'est déjà fait. Et pas besoin d'attendre l'Insee et ses inspecteurs des travaux finis : la bourse le dit haut et fort depuis quelques mois.

le 23/03/2015 à 13:45
Signaler
La bourse dit haut et fort qu'il y a beaucoup de liquidités a placer... sans plus, mais la reprise n'est pas là!

à écrit le 23/03/2015 à 11:15
Signaler
Investir pourquoi faire? C'est la question que l'on se pose! Et chacun des investisseurs attend l'autre car ce ne sera pas le premier qui y gagnera! C'est le principe de la déflation, surtout quand on est capable de placer des capitaux a taux négatif...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.