Travailleurs détachés, investissements étrangers : Juncker veut une Europe plus forte

Le président de la Commission européenne a dressé un programme de l'année à venir pour l'UE, soulignant la nécessité d'avoir des institutions européennes fortes et dédiées à des problématiques ciblées.
S'il est loin d'avoir soutenu toutes les propositions d'Emmanuel Macron pour une Europe plus forte, Jean-Claude Juncker a toutefois appuyé le président français sur la nécessité de renforcer les institutions de l'Union européenne.

| Article publié à 12h31, mis à jour à 14h34.

Laissant derrière elle "l'incertitude" à laquelle elle était confrontée l'an passé quelques mois après les résultats du référendum sur le Brexit - une surprise pour beaucoup -, l'Europe a désormais "à nouveau le vent en poupe", connaissant une reprise économique. Désireux de saisir cette "fenêtre d'opportunité", le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a délivré son discours-programme annuel sur l'État de l'Union européenne ce mercredi devant le Parlement européen à Strasbourg. Revue de détail des points évoqués.

■ Un meilleur contrôle des travailleurs détachés

Cheval de bataille d'Emmanuel Macron, qui s'était lancé fin août dans une "tournée" des pays de l'Est pour les convaincre de rallier sa cause, la situation travailleurs détachés en Europe interpelle également Jean-Claude Juncker.

"Dans une Union entre égaux, il ne peut y avoir [...] de travailleurs de deuxième classe. Ceux qui effectuent le même travail au même endroit doivent pouvoir obtenir le même salaire. [...] Nous devons veiller à ce que les dispositions de l'Union concernant la mobilité des travailleurs soient justes, efficaces et imposées partout, avec le soutien d'une nouvelle autorité européenne de contrôle et d'exécution de ces mesures"

"Il est absurde qu'il y ait une autorité bancaire qui veille à ce que les normes bancaires soient respectées [dans l'UE], mais qu'il n'y ait pas d'autorité commune du marché de l'emploi assurant la justice sur le marché intérieur. Nous la créerons", s'est-il exclamé.

La France a rejeté en juin le projet de révision de la directive car il n'allait, selon elle, pas assez loin. Paris souhaite limiter la durée du travail détaché à 12 mois, contre deux ans aujourd'hui, et prendre toute les périodes de travail détaché en compte dans ce calcul.

| Lire Travailleurs détachés : Macron sur une ligne encore plus dure que lorsqu'il était ministre

■ Un super ministre européen des Finances et de l'Economie

S'il est loin d'avoir soutenu toutes les propositions d'Emmanuel Macron pour une Europe plus forte, Jean-Claude Juncker a toutefois appuyé le président français sur la nécessité de renforcer les institutions de l'Union européenne.

"Il nous faut un ministre européen de l'Economie et des finances, qui encourage et accompagne les réformes structurelles dans nos États membres. [...] Je ne voudrais pas que l'on crée un nouveau poste, je demande pour des raisons d'efficacité que le commissaire [européen] chargé de l'Economie et des Finances devienne ce ministre -- idéalement vice-président de la Commission européenne - et soit également le président de l'Eurogroupe", qui regroupe les ministres des Finances des 19 pays ayant adopté la monnaie unique.

"Ce ministre européen de l'Economie et des Finances devrait coordonner l'ensemble des instruments financiers de l'UE lorsqu'un État membre entre en récession ou est frappé par une crise menaçant son économie", a-t-il continué.

■ Pas de budget et de parlement spécifique à la zone euro

À la différence du chef d'État français et de Berlin qui n'est désormais plus hostile à l'idée, le Luxembourgeois ne souhaite toutefois pas voir la création d'un parlement spécifique à la zone euro. "Ce ministre européen de l'Economie et des Finances sera bien évidemment responsable devant ce Parlement européen", a-t-il ainsi souligné.

"L'efficacité requiert que les instruments de gestion de la zone euro soient intégrés. Nous n'avons pas besoin de structure parallèle. Nous n'avons pas besoin d'un budget à part de la zone euro. Il nous faut une ligne budgétaire forte de l'Eurozone dans le cadre de notre budget de l'Union."

Le président français a répété jeudi dernier à Athènes qu'il souhaitait la création d'"un vrai budget de la zone euro", avec un ministre des Finances permanent et un contrôle démocratique.

■ Un contrôle des investissements étrangers au niveau européen

Alors que les fleurons industriels européens sont la cible de rachat par des entreprises étrangères, notamment chinoises, Jean-Claude Juncker a expliqué que l'Union européenne allait accroître les contrôles des investissements étrangers, martelant que l'acquisition d'une entreprise stratégique (port, énergie ou défense) "ne peut se faire que dans la transparence à travers un examen approfondi et un débat".

"Nous ne sommes pas des partisans naïfs du libre-échange. L'Europe doit toujours défendre ses intérêts stratégiques. C'est la raison pour laquelle nous proposons aujourd'hui un nouveau cadre européen sur l'examen des investissements."

"Il est de notre responsabilité politique de savoir ce qui se passe chez nous afin d'être en mesure, si besoin, de protéger notre sécurité collective." Il a ajouté que l'UE entendait concevoir une nouvelle stratégie industrielle afin que les entreprises du bloc soient plus compétitives.

Dans un communiqué conjoint publié suite à ce discours, Paris, Berlin et Rome ont souligné que "la proposition de règlement de la Commission en matière de contrôle des investissements stratégiques est une étape majeure pour assurer une concurrence loyale et équitable en Europe et une meilleure protection lors d'opérations d'acquisitions".

■ L'industrie automobile doit "faire amende honorable"

Jean-Claude Juncker s'est par ailleurs dit "choqué" des tromperies délibérément perpétrées par certains constructeurs automobiles et a réclamé pour l'avenir des voitures propres.

"J'invite l'industrie automobile à faire amende honorable et à corriger le tir. Au lieu de chercher à induire en erreur, les constructeurs devraient investir dans les voitures propres qui sont celles de demain".

(avec AFP et Reuters)

Commentaires 6
à écrit le 14/09/2017 à 8:47
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On verra dans le temps ce qu'il adviendra de ce beau discours. Ce n'est pas comme si tous les Etats partargent les visées de Mr. Juncker, dont on semble avoir mis aux oubliettes son rôle au Luxembourg des dispositifs d'optimisation fiscale proposée a...

à écrit le 13/09/2017 à 23:11
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Très bien : on va faire semblant d'y croire...

à écrit le 13/09/2017 à 15:27
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"L'industrie automobile doit "faire amende honorable"" Mais pas par contre l'industrie agro-alimentaire hein, pas de problème, vous pouvez continuer de nous empoisonner sans souci. A part la clause sur le travail détaché qui est en train de r...

à écrit le 13/09/2017 à 15:01
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le questionnement est vaguement louable ...dans une Europe en phase de décomposition avancée ....

à écrit le 13/09/2017 à 14:24
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Encore plus d' Europe comme depuis 40 ans et alors que tout a foiré face aux antagonistes des uns et des autres ...? Il n' y a pas d' identité européenne M Juncker, il n' y a que des intérêts divergents et vous aurez b...

à écrit le 13/09/2017 à 13:46
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Parler d'institution alors que cela n'est qu'une administration extra territoriale qui impose ses vues, ses recommandations, ses directives et son dogme par le biais de réformes et non pas d'adaptations, qui est le propre du genre humain!

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