La (bonne) titrisation amorce son retour en France

Cinq banques françaises viennent de créer un véhicule de titrisation des créances aux PME et aux ETI. L’objectif : faciliter l’accès des banques aux liquidités et, par ricochet, favoriser le crédit aux entreprises.
Christine Lejoux
Le véhicule de titrisation de créances de PME créé par cinq banques françaises a émis pour 2,65 milliards d'euros le 11 avril. REUTERS.

La titrisation, c'est un peu comme le cholestérol, il y a la bonne et la mauvaise. Si la mauvaise, avec ses amalgames d'actifs sains et de crédits toxiques, a été à l'origine de la crise des "subprimes" (crédits hypothécaires américains à risque), en 2007, la bonne peut au contraire représenter un outil très intéressant de financement de l'économie.

En effet, la titrisation consiste, pour les banques, à transformer des créances en titres cédés à des investisseurs sur les marchés. Ce qui permet aux banques de récupérer des fonds susceptibles d'être utilisés sous la forme de nouveaux prêts, lesquels viendront financer l'investissement et, partant, la croissance économique. C'est d'ailleurs pourquoi, du commissaire européen Michel Barnier au président de la BCE Mario Draghi, un nombre croissant de voix s'élèvent en faveur d'un retour de la titrisation, de bonne qualité s'entend.

 Une première émission de 2,650 milliards d'euros

A cet égard, la création par cinq banques françaises d'une société de titrisation de créances aux PME, annoncée vendredi 11 avril par la Fédération bancaire française (FBF), pourrait être regardée avec intérêt à l'étranger. Vendredi, ce véhicule ad hoc créé par BNP Paribas, la Société générale, BPCE (Banque Populaire Caisse d'Epargne), le Crédit agricole et HSBC France a procédé à une première émission, pour 2,650 milliards d'euros, de Euro Secured Notes (ESN). Il s'agit là de titres d'un genre nouveau, qui présentent la particularité d'être adossés à des prêts consentis par les cinq banques en question à des PME et à des ETI (entreprises de taille intermédiaire).

Ces titres ne sont pas notés par des agences de notation mais les créances auxquelles ils sont adossés "présentent une note élevée dans l'échelle de cotation de la Banque de France", souligne la FBF. Au passage, la Banque de France est l'une des rares banques centrales européennes à effectuer ce type de notation, si bien que ce système de titrisation des créances sur les PME ne devrait pas être aisé à répliquer dans d'autres pays.

Une ressemblance avec les "covered bonds"

Non seulement les ESN sont adossés à des créances bien notées par la Banque de France, mais le véhicule qui les émet est de plus compartimenté par banque. Autrement dit, le détenteur d'ESN d'une banque A ne risquera pas d'être "contaminé" par les difficultés éventuelles d'une banque B. En outre, les ESN se rapprochent des "covered bonds" (obligations sécurisées), dans la mesure où ils offrent à leur détenteur un système de double recours, sur la banque qui a "originé" le titre et sur les actifs sous-jacents.

"La place de Paris a défini les caractéristiques des ESN selon des standards élevés de transparence, de simplicité et de sécurité, favorisant ainsi une titrisation de haute qualité", insiste la FBF. De fait, Les ESN s'inscrivent dans la titrisation dite "déconsolidante" promue par le gouverneur de la Banque de France Christian Noyer, qui consiste pour la banque à garder une partie du risque lié à la créance mise sur le marché. Ainsi, les créances titrisées vendredi restent gérées par les groupes bancaires ayant accordé les crédits et les titres émis ne sont pas découpés en tranches.

Favoriser le financement des entreprises

Sous la coordination de la Banque de France, la place financière de Paris travaillait depuis 2011 sur ce projet. L'objectif : faciliter l'accès des banques françaises à la liquidité, en leur permettant d'utiliser de nouveaux actifs - en l'occurrence, les prêts aux PME - comme collatéral sur le marché interbancaire et auprès de l'Eurosystème. Mais les discussions avec ce dernier sont encore en cours. Pour le moment, les banques françaises ne peuvent utiliser les ESN pour se refinancer qu'auprès de la Banque de France et d'autres banques privées.

 En tout état de cause, avec cette initiative, "la Banque de France fait d'une pierre deux coups car le fait de rendre les prêts aux PME plus facilement monétisables devrait inciter les banques à consentir davantage de crédits aux petites et moyennes entreprises", estime un banquier français. La FBF n'en doute pas, qui souligne que "la place de Paris se dote des instruments permettant de favoriser le financement des entreprises par une plus grande liquidité conférée aux créances, et donc de favoriser la croissance et l'emploi."

Christine Lejoux

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Commentaires 36
à écrit le 09/09/2014 à 11:48
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La titrisation c'est un peu comme au mistigri, le jeu consiste à le refiler le plus rapidement possible...Les banques sont très fortes à ce jeu! Il ne faut pas jouer avec elles... En plus elles trichent.

à écrit le 14/04/2014 à 9:31
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Très rigolo cet article ;)

à écrit le 13/04/2014 à 10:43
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La "bonne" titrisation, c'est comme la "bonne" finance "industrielle...

à écrit le 12/04/2014 à 16:12
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La titrisation n'est pas responsable de la crise des subprimes comme on le dit. Il s'agit d'une technique : par exemple l'assurance est une titrisation. Les responsables de la crises sont bien la création volontaire d'actifs pourris que la titrisatio...

à écrit le 12/04/2014 à 15:18
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La bonne titrisation: Ca existe? Pour les banquiers certainement, puisque ça leur permet de refiler des me...s dans un joli paquet cadeau, se débarrasser du mistigri et gagner la partie sous forme sonnante et trébuchante.

le 14/04/2014 à 8:53
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Si les banques françaises pouvaient se débrasser des prêts toxiques américains par la titrisation, why not? Combien cela a t-il déjà coûté aux contribuables français?

à écrit le 12/04/2014 à 12:25
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C'est là ou l'on se pose des questions sur les capacités des classes politiques qui se partagent le pouvoir depuis 50 ans .

à écrit le 12/04/2014 à 12:01
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On va nous inclure se genre de produits viciés dans nos placement bancaire sans que l'on en soit averti , c'est un poison qui est fait pour créer du vent et ramasser la l'argent honnêtement gagné .

à écrit le 12/04/2014 à 11:51
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La titrisation, c'est formidable, puisque çà dilue le risque en le diversifiant très rationnellement grâce à des modèles sophistiqués. Oui, mais : - on peut tout faire dire aux modèles, et vendre n'importe quoi avec, à n'importe qui. Vendre la bulle...

à écrit le 12/04/2014 à 10:51
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J'ai de la farine et de la fécule a vendre qui n'en veut ???????? Salut les maillons.

à écrit le 12/04/2014 à 10:36
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Au vu des commentaires, il y a de moins en moins de gens crédules. C'est bien.

à écrit le 12/04/2014 à 10:00
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Sachant qu'elle va pouvoir revendre très facilement sa créance à l'extérieur, une banque se montrera beaucoup moins sourcilleuse envers les PME pour leur accorder des prêts à taux très bas que si elle conservait 100 % du risque (les taux seraient alo...

à écrit le 12/04/2014 à 9:33
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Créer de la dette sur de la dette, c'est bien.

à écrit le 12/04/2014 à 9:00
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La plus grande escroquerie du siècle est en cours : la "titrisation" de la dette française sur les contrats d'assurance vie. Les pertes vont être massives.

à écrit le 12/04/2014 à 7:38
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présenter le coté jardin pour attirer le chaland ! le coté cour sera très surement plus loufoque car les profiteurs ( voleurs ) silencieux ne sont jamais bien loin . un jour nous lirons " son coté attractif a été détourné de sa fonction " .

à écrit le 12/04/2014 à 5:02
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C'est démentiel. Une fois de plus, par attrait de l'argent facile, on va "investir" dans des produits empoisonnés sur lesquels on a aucun contrôle, se les refiler jusqu'à temps de ne plus rien y comprendre. Sous prétexte de diversification, on ne ...

à écrit le 12/04/2014 à 1:04
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Il y a des milliers de morts sur les routes tous les ans. Interdisons les automobiles ? Non, c'est au régulateur de faire son travail, et surtout à chacun de se montrer responsable avec cet outil qu'est la voiture. Le pire, c'est que la finance est a...

à écrit le 12/04/2014 à 0:43
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on va créer une nouvelle bulle financière qui entretemps aura enrichi certains sans rien faire !

à écrit le 12/04/2014 à 0:16
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S'il y avait de bonnes crises, il y aurait de la bonne titrisation..... La titrisation n'a jamais apporté quoi que soit de bon. A part permettre au banques d'investissement de jouer au casino avec les autres banques la titrisation ne fais que nous p...

à écrit le 11/04/2014 à 22:27
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Là , si on m'interviewait , je dirais que Warren Buffet s'est planté 4 fois ces 5 dernières années. Warren , je te propose de faire un discount - 50 % sur tes conseils. Avec un avenant précisant que ledit discount sera de -70 % l'année suivante. A...

à écrit le 11/04/2014 à 22:21
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JP Morgan a morflé !!! Résultats trimestriels T1 - 19 %... On n'est pas près de voir disparaitre le THF. Et un nouveau Dark Pool vient de se créer.

à écrit le 11/04/2014 à 22:09
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Je suis le méchant du groupe , Madame Lejoux. Ma spé , c'est le Scalping... Congratulations for The Prize... ;-)

à écrit le 11/04/2014 à 22:01
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Les articles de Christine Lejoux...On se sent un peu chez nous !!! Got the Best Stock...!!!

à écrit le 11/04/2014 à 22:00
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Pour une fois qu'un article est relativement complet ..

à écrit le 11/04/2014 à 21:56
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Je suis G+... ;-)

à écrit le 11/04/2014 à 21:54
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Le short des technos...c'était bien...très très bien...Mais , maintenant , on passe reverse. On n'est jamais assez prudents... ;-)

le 11/04/2014 à 22:03
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Attention : Reverse ultra-sélectif !!! On n'est jamais assez prudent !!! Oui , je sais que je le dis tout le temps !!!

le 16/04/2014 à 17:39
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J'ai dit qu'il fallait passer Reverse et il fallait passer Reverse. Evidemment , je parle du Trend principal. Vous pouvez augmenter...graduellement vos expositions...sur les Béta+

à écrit le 11/04/2014 à 21:52
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Cool , j'ai pu exercer mon strike.

à écrit le 11/04/2014 à 21:40
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Il s'agit de titriser des créances aux PME et aux ETI. Tant qu'il n'y a pas création de produits dits synthétiques , incorporant des produits difficilement traçables comme les fameux subprimes , il n'y a aucun problème. Ceux qui critiquent : Pourqu...

le 12/04/2014 à 9:24
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Ton systeme fonctionne de mieux en mieux , regarde le monde ...

le 12/04/2014 à 14:09
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@University : votre éternel argument, c'est "vous n'y comprenez rien, bande d'incompétents", qui est la version financière du "circulez ! y'a rien à voir!", voire le "caltez, volailles!", et quelque chose qui vole tout aussi bas. Ce qui peut, finalem...

à écrit le 11/04/2014 à 20:20
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Il n'y a pas de bonne titrisation. C'est une honte de voir ça !

le 11/04/2014 à 20:25
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de plus les banques n'ont pas besoin de liquide, la BCE leur en prête à des taux imbattables et très (trop) attractifs. Et puis tous les observateurs le soulignent, les banques rechignent à prêter, les entreprises comme les particuliers n'arrivent pa...

le 11/04/2014 à 21:46
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Achetez-donc leurs actions , comme ça , elles n'auront plus besoin de titriser !!!

le 11/04/2014 à 23:04
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Manifestement, on a toujours pas compris et retenu la leçon. Et les financiers reculbutent les lapins crétins. Bravissimo. Peut-être une bonne guerre thermonucléaire est finalement nécessaire pour rôtir em une fois tous ces individus.

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