Et si les investisseurs étrangers étaient ceux qui croyaient le plus dans les start-up françaises ?

L’Afic organisait le 23 septembre un forum destiné à convaincre les investisseurs étrangers du potentiel de la France. Mais 24% des jeunes pousses françaises du numérique comptent déjà des fonds étrangers parmi leurs actionnaires, d’après EY.
Christine Lejoux
Les investisseurs américains sont particulièrement présents sur les plus gros tours de table des start up françaises. REUTERS.
Les investisseurs américains sont particulièrement présents sur les plus gros tours de table des start up françaises. REUTERS. (Crédits : Reuters)

Vanter l'attractivité de la France auprès d'investisseurs institutionnels étrangers, en pleine grève des pilotes d'Air France, voilà qui n'est a priori pas une sinécure. L'Afic (Association française des investisseurs pour la croissance) a pourtant fait salle comble, mardi 23 septembre, pour son forum destiné à convaincre les fonds de pension et autres "zinzins" européens d'investir dans les sociétés françaises de capital-investissement. C'est qu'après avoir boudé la France dans le sillage du Projet de loi de finances 2013, dont certaines dispositions fiscales avaient provoqué la révolte dite des Pigeons, les investisseurs étrangers sont de retour. La preuve, sur les 8,2 milliards d'euros levés l'an dernier par les fonds de capital-investissement français, 45% proviennent d'institutionnels étrangers, contre 30% en 2012, selon l'Afic.

 Des "zinzins" étrangers qui sont également très présents de façon directe au capital des start up hexagonales : près d'un quart (24%) des jeunes pousses françaises du secteur du numérique comptent des fonds de capital-risque étrangers parmi leurs actionnaires, d'après une étude publiée en juin par le cabinet d'audit EY (ex Ernst & Young). De fait, sur les dix plus importantes levées de fonds réalisées par des start up françaises de l'Internet entre le 1er janvier 2010 et le 30 juin 2012 [dernières données disponibles ; Ndlr], pas moins de six ont impliqué des investisseurs étrangers, d'après une étude de KPMG. Et en particulier des fonds de capital-risque américains, comme KKR et Access Industries.

 8 sociétés françaises parmi les 100 plus innovantes du monde

 Que viennent donc faire ces habitués de la Silicon Valley en France, un pays où la croissance économique ne devrait pas excéder 0,4% cette année, et où chaque mois apporte son record de chômeurs ? "Bien sûr, l'environnement macro-économique n'est guère positif en France, mais nous pouvons trouver de la croissance en investissant dans des start up déjà très présentes à l'international", explique Wendelin Thoenes, chez Allianz Capital. En effet, si les jeunes pousses françaises de l'industrie numérique ont vu en moyenne leur chiffre d'affaires grimper de 43%, en 2013, c'est grâce au quasi-doublement de leur activité réalisée à l'étranger, d'après EY.

 Surtout, "l'innovation constitue l'une des meilleures réponses à une conjoncture macro-économique maussade. Or la France a des arguments à faire valoir, en matière d'innovation", estime Christophe Bavière, chez Idinvest Partners. C'est bien l'avis des investisseurs étrangers : interrogés par EY sur les atouts qui font de la France un pays attractif, 40% d'entre eux mentionnent d'abord la capacité d'innovation, contre 30% l'an dernier. Il faut dire que sur les 100 sociétés considérées comme les plus innovantes au monde par le magazine Forbes, dans son classement 2013, huit sont françaises. Ce qui place la France en deuxième position, derrière les Etats-Unis et leurs 39 vedettes de l'innovation.

 Le capital-innovation a investi 642 millions d'euros seulement, en 2013

 Face à ce vivier de jeunes pousses innovantes, que fait donc le capital-risque (ou capital-innovation) français ? En 2013, il a investi 642 millions d'euros, un montant "très insuffisant, (qui) ne permet pas de faire face aux enjeux du financement de l'innovation en France", regrette l'Afic. Et d'insister : "A titre de comparaison, ce sont 21,3 milliards d'euros qui ont été investis par le capital-innovation aux Etats-Unis, soit 33 fois plus !" Rapporté au poids des économies respectives, le capital-risque pèse donc 5,7 fois moins en France qu'aux Etats-Unis. La conséquence, notamment, des nouvelles réglementations de Bâle III et de Solvabilité II, relatives au renforcement des fonds propres des banques et des assureurs, et qui restreignent la capacité de ces derniers à continuer à jouer leur rôle de pourvoyeurs traditionnels du capital-investissement français.

 A quoi s'ajoutent les coups de rabot portés ces dernières années aux incitations fiscales dont bénéficiaient les particuliers investissant dans des FCPI (fonds communs de placement dans l'innovation) et des FIP (fonds d'investissement de proximité). Un manque de ressources qui conduit le capital-risque français à ne plus être en mesure de financer les start up hexagonales, un comble. Aussi l'Afic et l'Association française de la gestion financière réclament-elles "le rétablissement d'une fiscalité incitative" dans ce domaine. Un débat bien français.

Christine Lejoux

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Commentaires 8
à écrit le 25/09/2014 à 12:59
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il y a des domaines qui sont plus important et plus concrets, et plus immédiats à exploiter pour les start -up que le numérique illusoire, Routefois, il faut aussi se poser( des questions pourquoi l'immense majorité des start-up va dans le mûr a...

à écrit le 25/09/2014 à 12:00
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Si la France consacrait son argent à l'investissement au lieu de le pomper dans des frais et des dettes, on n'en serait pas là. Les investisseurs étrangers payent leurs impôts ailleurs.

à écrit le 25/09/2014 à 9:46
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Facile pour la mafia financière spéculative d'investir quand l'argent ne leur a rien coûté, volé jour après jour, nanosecondes après nanosecondes. Le système tourne à vide, la croissance est en berne... durablement. Ces "investissements" dans les sta...

à écrit le 25/09/2014 à 9:31
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les étrangers croient plus en la France que les Français (PWC et Ey ont distingué la France pour l'innovation ou l'investissement industriel étranger, OCDE et ONU ont distingué la France pour le e-Government...). les grincheux et frileux français (c...

le 25/09/2014 à 9:42
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200 % ok. C'est ça qui nous tue.

à écrit le 25/09/2014 à 9:06
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Car l'administration française tue le dynamisme entreprenarial par la paperasserie et les impôts et taxes pour nourrir des fonctionnaires qui ne créent aucune richesse et ont largement participe à la paralysie économique française.

à écrit le 25/09/2014 à 8:14
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A mes amis qui sont dans la déprime (et qui sont plutôt légion) je leur recommande de lire La Tribune, tous les jours. Même que les titres ne s'avèrent pas tout à fait sur le tas, cela crée quand-même l'illusion de que tout va au mieux en France. Enc...

à écrit le 25/09/2014 à 7:42
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Quand les investisseurs institutionnels français n'achèteront plus de titres de dettes de l'Etat, ils pourront peut-être s'intéresser aux entreprises et à la vie économique du pays, plutôt qu'au financement de son administration...

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