Assurance-vie : l’AFER tourne la page d’Aviva

L’association, qui regroupe 760.000 adhérents, prend acte de la volonté de l’assureur britannique de céder sa filiale française. Il compte peser sur le choix du repreneur. A ce jour, quatre candidats se sont manifestés : le tandem Allianz et Athora, le mutualiste Macif, le fonds d'investissement Eurazeo et Generali. En attendant, l’association fixe à 1,7% le rendement net de son fonds en euros pour 2020. Un taux qui s’inscrit une fois de plus dans le haut de la fourchette du marché.
Le président de l'AFER, Gérard Bekerman, compte bien jouer un rôle clé dans le choix du repreneur de son partenaire Aviva France.
Le président de l'AFER, Gérard Bekerman, compte bien jouer un rôle clé dans le choix du repreneur de son partenaire Aviva France. (Crédits : @BGriveaux)

Une page se tourne dans l'histoire d'Aviva France et de son partenaire historique en France, depuis 1976, avec l'Association française d'épargne et de retraite (AFER). Son président, Gérard Bekerman, l'a reconnu bien volontiers lors de sa traditionnelle conférence de janvier pour dévoiler le taux servi, au titre de 2020, du fonds en euros. Ce dernier, sans surprise, se situe plutôt dans la fourchette haute du marché, à 1,7%, net de frais, grâce notamment à la reprise des marchés en fin d'année et à une reprise de 81 millions sur sa provision pour participation aux bénéfices (PPB).

Mais, une fois n'est pas coutume, le point de focalisation de la présentation était ailleurs : la position de l'AFER dans le processus de vente d'Aviva France, engagé cet été par sa maison-mère britannique, en plein recentrage stratégique.

Droit de consultation

« Nous avons compris qu'Aviva pouvait envisager la vente de sa filiale française et nous avons rappelé nos droits », a indiqué Gérard Bekerman. Qui précise : « selon une condition contractuelle, toute cession d'Aviva France requiert une consultation de l'AFER, destinée à protéger les intérêts des adhérents. Cette consultation est nécessaire - l'AFER est le premier client au monde d'Aviva et représente plus de la moitié de son chiffre d'affaires en France - et suffisante car AFER n'en demande pas plus » .

Donc pas de droit de veto mais un simple droit de consultation. Difficile cependant d'imaginer un candidat qui irait à l'encontre des intérêts de l'AFER et de ses adhérents, compte tenu de son poids (54,4 milliards d'euros d'encours) et de ses relais politiques (760.000 adhérents, ça compte). «L'AFER est un trésor public », se plaît à rappeler le président de l'association.

Le partenaire idéal

Gérard Bekerman est donc prêt à travailler avec un nouveau partenaire. D'autant que les relations entre Aviva France et l'AFER n'ont pas toujours été au beau fixe. « Notre partenariat a été dans l'ensemble convenable, mais il n'a pas été à la hauteur d'un véritable paritarisme comme nous l'avions expérimenté pendant plusieurs décennies. Et, parfois, au lieu d'un dialogue, ce sont deux monologues qui ont coexisté », glisse ainsi Gérard Bekerman.

« Nous sommes convaincus qu'une ère nouvelle pourra nous permettre d'aller de l'avant, sans doute avec un nouveau partenaire que nous souhaitons ouvert, intelligent dynamique, bâtisseur et donnant du temps au temps », soutient-il. En dessinant même les contours de « son » candidat idéal : « Il devrait être ouvert sur l'international, créateur de valeur et de richesse, solide financièrement, un coéquipier pour bâtir, dans l'innovation, un projet de développement dans la durée ». Pour aussitôt préciser : « notre position n'est pas d'être pour l'un ou pour l'autre, mais de défendre les intérêts de nos adhérents ».

Quatre candidats en lice

Une dernière précision qui n'a rien d'innocente. A ce jour, en effet, quatre candidats ont manifesté leur intérêt avec des offres de reprise non engageantes : le tandem formé par l'assureur Allianz, poids lourd de l'assurance et d'un nouveau venu sur le marché, Athora qui rachète en Europe des portefeuilles d'assurance-vie, le groupe mutualiste Macif qui vient de créer un nouveau groupe d'assurance avec Aésio, le fonds d'investissement Eurazeo, un candidat qui n'était pas forcément attendu et, enfin, Generali, sans doute avec des partenaires.

Alors que la candidature de Macif présentait toutes les vertus de l'offre franco-française, avec des valeurs mutualistes qui pouvaient séduire une association de loi 1901, et rassurer les salariés et agents généraux d'Aviva France, Gérard Bekerman semble marquer, bien qu'il s'en défende, une préférence pour le projet porté par Allianz et Athora, projet qu'il a pourtant vertement vilipendé cet été.

« Je me montre aujourd'hui ouvert (à cette offre, NDLR) alors que j'étais fermé hier car le projet que l'on m'avait présenté durant l'été, de manière sommaire, indiquait un lieu de résidence du repreneur aux Bermudes et une volonté de déréglementation au regard des instances européennes. Mais les choses ont changé en cinq mois et Athora est revenu avec un projet où une grande compagnie d'assurance, Allianz, serait probablement majoritaire au capital et où Athora aura un siège en France, avec l'engagement de respecter les salariés et avec un projet de développement pour l'AFER », se justifie Gérard Bekerman.

Les syndicats et les agents généraux en faveur de Macif

Un revirement de position qui n'est pas du goût de l'Intersyndicale Aviva UFF Epargne Actuelle, ni du syndicat des agents généraux d'Aviva France, qui n'ont pas caché leur préférence pour une reprise par Macif, notamment au nom de la préservation de l'emploi. « Le président de l'Afer prend le parti d'une solution qui nous semble bien éloignée des intérêts tant des adhérents que nous voyons au quotidien, que des réseaux de distributions, et des salariés du groupe », a ainsi dénoncé le syndicat des agents généraux SNAGA, qui estime que « la Macif est certainement le candidat à même de nous permettre de continuer à croître ».

La mutuelle avait récemment souligné son intérêt pour le dossier, notamment la « complémentarité » des métiers. Reste à savoir si le nouveau groupe aura les reins suffisamment solides pour financer cette acquisition, en majorité par endettement, alors que, selon l'Argus de l'assurance, elle aurait proposé un prix élevé de plus de 3 milliards d'euros, un montant supérieur aux fonds propres de la filiale.

Ces derniers ont d'ailleurs été revus à la baisse d'environ 280 millions d'euros, suite à un ajustement opéré lors des résultats au troisième trimestre. Or, pour maintenir des rendements élevés sur l'assurance-vie, il faut mieux avoir des excédents de fonds propres, d'autant que la PPB (269 millions d'euros) de l'AFER est faible par rapport aux standards du marché.

Reste que la compétition reste ouverte avec aucune négociation exclusive à ce jour. D'autres candidats pourraient même se manifester. Dans un communiqué de presse, Aviva Plc est restée sur sa réserve :« Aviva explore différentes options pour Aviva France et aucune décision n'a été prise à ce stade ». Tout en précisant que, si cela devenait nécessaire, le groupe « consultera activement toutes les parties prenantes, y compris l'AFER ».

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