Baisse d’impôts à double tranchant pour les banques américaines

Citigroup et Bank of America notamment devront déprécier massivement leurs milliards de crédits d’impôts hérités des pertes essuyées pendant la crise financière. Un fort impact comptable qui sera exceptionnel et compensé dès l’année suivante par des bénéfices gonflés par de moindres prélèvements.
Delphine Cuny
Gary Cohn, conseiller économique de Donald Trump, et Steve Mnuchin, le secrétaire au Trésor, tous deux d'anciens banquiers de Goldman Sachs, présentant la réforme fiscale du président américain mercredi à la Maison-Blanche.

Et si « la plus grande baisse d'impôts de l'histoire » annoncée par Donald Trump ne faisait pas que des heureux chez les grandes entreprises américaines, au moins à court terme ? Son principal conseiller économique, Gary Cohn, et Steve Mnuchin, le secrétaire au Trésor, tous deux d'anciens banquiers de Goldman Sachs, ont dévoilé mercredi le projet de ramener à 15% le taux d'impôt sur les sociétés aux Etats-Unis. Problème : les plus grandes banques américaines ont encore dans leurs comptes des dizaines de milliards de dollars de crédits d'impôts hérités des pertes colossales essuyées pendant la crise financière. Elles vont devoir en déprécier massivement la valeur.

Citigroup, par exemple, a quelque 46,7 milliards de dollars d'actifs nets d'impôts différés dans ses comptes de 2016 (voir dans le rapport annuel 2016 page 121), dont plus de 14 milliards à l'étranger qui ne sont donc pas concernés. Selon le Wall Street Journal, la quatrième banque américaine par les actifs pourrait devoir déprécier ses crédits d'impôts pour un montant compris entre 6 et 12 milliards. A comparer à un bénéfice net part du groupe de 14,9 milliards de dollars dégagé l'an dernier.

Fonds propres affectés

De son côté, Bank of America a dans son bilan 19,22 milliards d'actifs nets d'impôts différés (voir page 192 de son rapport annuel 2016). La deuxième banque américaine en termes d'actifs pourrait devoir les déprécier de l'ordre de 4 milliards de dollars, d'après les estimations du Wall Street Journal. Un impact comptable non négligeable qui viendra rogner les profits (de cette année a priori, sachant que BofA a généré 17,9 milliards de bénéfice net en 2016) mais qui affectera aussi la valeur nette comptable des banques, puisque ces crédits d'impôts figurent dans les fonds propres. Chez JP Morgan aussi, la première banque américaine, l'impact devrait être important sur ses 22 milliards d'actifs nets d'impôts différés (dont un quart à l'international).

Cependant, cet effet sera ponctuel, exceptionnel : la baisse du taux d'impôt sur les sociétés aura ensuite un impact évidemment positif sur les bénéfices, qui seront mécaniquement augmentés par le moindre prélèvement fiscal. C'est ce qui intéresse au premier chef les investisseurs. Or Bank of America et Citigroup font partie des dix plus gros contribuables de Corporate America, avec respectivement 7,1 milliards et 6,4 milliards de dollars d'impôts payés aux Etats-Unis (sur 12 mois glissants), JP Morgan étant numéro deux derrière Apple. Cependant, du fait de ces crédits d'impôts, ces entreprises ne paient pas le taux d'impôt fédéral officiel de 35% : JP Morgan par exemple affiche un taux effectif de 28,4%, BofA de 28,8% et Citi de 30%.

En France aussi, certaines entreprises, dont des banques telles que le Crédit Agricole, ont dû enregistrer une charge de dépréciation des impôts différés en raison de la baisse du taux d'IS à partir de 2020 décidée dans la dernière loi de finances. Et les cartes fiscales seront à nouveau rebattues après l'élection présidentielle...

Delphine Cuny

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