Vers une nouvelle année record sur le marché du "high yield"

Les annonces de la Banque centrale européenne et de la Réserve fédérale américaine ont dopé les émissions de dette à haut rendement. Désespérément à la recherche de rendement, les investisseurs sont de plus en plus nombreux à s'intéresser à ces titres. Au risque de sous-estimer les risques ?
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L'intérêt pour les émissions de dette à haut rendement ("high yield") ne se dément pas. D'un côté, les entreprises peinent à obtenir du financement auprès de leurs banques, elles-même de plus en plus contraintes par les nouvelles règles de Bâle III. De l'autre, les investisseurs cherchent désespérément du rendement, dans un univers de taux bas.

Vers de nouvelles émissions record en 2012 ?

Dans ces conditions, les volumes de dette considérée comme "spéculative" (c'est à dire notée Ba1/BB+ ou moins par les agences de notation financière) émis cette année pourraient bien approcher des niveaux record de l'année dernière, estime Moody's. En 2011, les entreprises européennes avaient levé 67 milliards de dollars de dette à haut rendement, contre 44 milliards cette année, à fin août. Mais ces quinze derniers jours, le marché "primaire" - celui sur lequel les entreprises placent leur dette - a été véritablement dopé par les bonnes nouvelles, qu'elles proviennent de la BCE (programme OMT), de la cour de Karlsruhe (accepte la ratification du MES), des Pays-Bas (élections) ou encore de la Fed (QE3).

Prudence des politiques financières et moindre risque de refinancement

"Dans un environnement de taux d'intérêt nominaux très faibles, les investisseurs en quête de rendement ont peu d'options à disposition pour capter un revenu courant élevé. Parmi les opportunités les plus attrayantes, on trouve le secteur mondial du haut rendement", constate Betsy Hofman, vice présidente et gérante de portefeuille chez Franklin Templeton Fixed Income Group dans une note de recherche. Les investisseurs expliquent généralement l'attrait des titres à haut rendement par la prudence des politiques financières menées par les entreprises ces dernières années. Autrement dit, bien que notées en catégorie "spéculative", elles seraient moins risquées. " De nombreuses sociétés cherchent à relever leurs coussins de liquidité et à se désendetter. Cette gestion financière généralement prudente et la croissance des bénéfices ont fait baisser le risque financier inhérent, au moins sur le court terme", explique Betsy Hofman. Leur risque de refinancement aurait également été réduit. "Les conditions favorables sur les marchés financiers ont permis à beaucoup d'entreprises d'émettre de la dette et d'étendre leur profil de maturité", poursuit la gérante.

Risque de remontée des taux

Cet engouement pour la dette émise par les entreprises les moins solides financièrement n'est pas sans risque. Les investisseurs sont en effet exposés à une remontée des taux des emprunts d'Etat, alors même que ces derniers sont tombés cet été à des plus bas niveaux historiques. "Au cours des dernières semaines, plusieurs nouvelles émissions, tant au sein de l'univers « investment grade » que « high yield », ont été placées sur le marché avec des coupons extrêmement faibles, impliquant des durations plus longues. Nous n'avons participé que de manière limitée à ces nouvelles émissions, dans la mesure où ces titres seront confrontés à des risques de duration accrus et pourraient essuyer d'importantes pertes « mark?to?market » en cas de correction des marchés des bons du Trésor ou du crédit", explique Eric Pictet, directeur général du bureau de Paris de Muzinich. Pour lui, "le risque de taux occupe une place de plus en plus importante dans les inquiétudes des investisseurs, dans la mesure où les taux sans risque se situent à des niveaux inégalés depuis la fin de la seconde guerre mondiale".

Risque de crédit

Quant au risque de crédit, à en croire les gérants, il reste maîtrisé. Les primes de risque ou « spreads » (différence de rendement avec des obligations sans risque) des obligations d'entreprises resteraient importants par rapport à leur moyenne de long terme et intègreraient un taux de défaut nettement supérieur aux taux de défaut historiques. Ainsi, "d'après les calculs de JP Morgan, à des niveaux de 674 points de base, les « spreads » du marché « high yield » impliquent un taux de défaut de 6 %. Nous anticipons des taux de défaut proches de 2 % en 2012 et 2013", explique Eric Pictet.

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