Fintech : pas de traitement de faveur insiste le gendarme financier

Les startups de la finance devront appliquer les mêmes règles que les acteurs établis, avec toutefois une certaine proportionnalité. Le régulateur français défend une approche moins favorable aux nouveaux entrants que son homologue britannique.
Delphine Cuny
Nous tenons, comme vous, à ce qu'il n'y ait pas de distorsion structurelle de concurrence par la réglementation entre les acteurs existants et les nouveaux entrants, a insisté François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France et président de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR).
"Nous tenons, comme vous, à ce qu'il n'y ait pas de distorsion structurelle de concurrence par la réglementation entre les acteurs existants et les nouveaux entrants", a insisté François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France et président de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). (Crédits : © Axel Schmidt / Reuters)

Accueillant, mais pas trop : le gendarme financier a voulu se montrer ouvert aux acteurs innovants sans donner l'impression de leur dérouler le tapis rouge, vendredi lors d'une conférence au Palais Brongniart consacrée aux Fintech, ces startups qui réinventent la finance, présentées comme "un challenge pour la régulation".

L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a voulu démontrer qu'elle s'était adaptée, modernisée, avec la création d'un Chief Digital Officer (directeur de la stratégie numérique) à la Banque de France, d'un pôle dédié aux Fintech (3 personnes) et d'une instance de dialogue avec le secteur en coordination avec l'Autorité des marchés financiers (AMF), le Forum Fintech. Dans le même temps, elle a insisté sur sa "très grande vigilance" et son approche assez stricte de la réglementation : pas de traitement de faveur pour les nouveaux entrants, auxquels elle appliquera tout de même une certaine proportionnalité dans les exigences (administratives ou de fonds propres).

"Face à l'émergence de la finance digitale, la réglementation doit répondre à un double impératif : s'adapter pour ne pas brider l'innovation, mais continuer à garantir un haut niveau de sécurité des transactions et de protection des consommateurs", a fait valoir le président de l'ACPR et gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau. "Nous voulons à la fois davantage d'innovation et davantage de sécurité."

Proportionnalité et neutralité

Il a tenu à rassurer les acteurs établis de la finance :

"Nous tenons, comme vous, à ce qu'il n'y ait pas de distorsion structurelle de concurrence par la réglementation entre les acteurs existants et les nouveaux entrants : oui à la proportionnalité des règles, mais non à leur iniquité."

La coordinatrice du pôle Fintech innovation de l'ACPR, Nathalie Beaudemoulin, a défendu cette approche, qu'elle considère "pragmatique" :

"On nous parle souvent de la "sandbox" britannique [bac à sable réglementaire où sont menées des expérimentations sans contrainte ou presque, Ndlr] et de l'opportunité de la mettre en place en France. Dans la "sandbox", l'autorité anglaise choisit l'innovation. Nous, à l'ACPR, nous recevons tous les projets, gratuitement, dans un principe de neutralité."

Ainsi, sur les 18 projets retenus par la FCA dans la "sandbox", 7 projets relèvent du paiement. Or, il existe une directive européenne sur les paiements qu'il semble inconcevable de ne pas respecter à l'ACPR.

Le directeur de la Division Fintech Innovation de l'AMF, Franck Guiader, a abondé dans son sens :

"La réglementation de l'AMF face à l'innovation repose soit sur des statuts adaptés [comme dans le crowdfunding, Ndlr] soit sur la proportionnalité. Sinon, il y a un risque de régimes juridiques à plusieurs vitesses. La "sandbox" revient à un régime pour les acteurs traditionnels, un régime pour les happy-few sélectionnés, et il reste les acteurs innovants qui ne sont ni l'un ni l'autre."

L'AMF propose à la Commission européenne une approche alternative qu'elle appelle "soundbox" (sound signifiant solide). Les Fintech, elles, continuent de rêver d'un plus grand allègement des contraintes. Nathalie Beaudemoulin a cependant fait valoir un bon argument pour ces startups qui doivent se créer un nom et une réputation :

"La réglementation est un facteur de confiance."

Delphine Cuny

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