Le FSI, complément ou concurrent du private equity ?

Certaines sociétés de capital-investissement se plaignent d'une distorsion de concurrence induite par le Fonds stratégique d'investissement. D'autres saluent la présence du FSI comme pourvoyeur du capital-investissement, à l'heure où banques et assureurs lèvent le pied sur leurs allocations au private equity.
Copyright Reuters

De quel oeil les sociétés de capital-investissement françaises voient-elles le FSI? Considèrent-elles le Fonds stratégique d'investissement comme un acteur complémentaire de leur activité, ou, au contraire, comme un rival qui empiète sur leurs plate-bande? Lancé en 2008, le fonds souverain à la française, détenu à 49% par l'Etat et à 41% par la Caisse des dépôts, a pour vocation de prendre des participations minoritaires dans des entreprises "dont les projets de croissance sont porteurs de compétitivité pour le pays" et ce, pour une durée de sept ans, en moyenne.

Un effet d'éviction des sociétés de private equity

"Le FSI avait élé lancé pour soutenir les champions industriels français en difficulté. Il est intervenu de façon perspicace dans le secteur automobile", reconnaissait le mois dernier Gilles Mougenot, président de la société de capital-investissement Argos Soditic, lors de la publication de son indice de valorisation des PME non cotées. "Mais aujourd'hui, avec la multiplication de ses bras, le FSI se substitue au private equity. L'Association française des investisseurs en capital (Afic) compte plus de 200 membres mais le FSI et les fonds qu'il crée forment un guichet auquel les PME songent spontanément à s'adresser. Ce qui crée une distorsion de concurrence et entraîne une éviction des sociétés de private equity", déplore le patron d'Argos Soditic. De fait, le FSI a créé plusieurs fonds, comme le Fonds de consolidation et de développement des entreprises (FCDE), destiné à financer le rebond et le développement de PME prometteuses, ou bien encore comme le Fonds de modernisation des équipementiers automobiles (FMEA), le Fonds Bois, etc. Autant de pourvoyeurs d'argent labellisés FSI auxquels les entreprises pensent immédiatement lorsqu'elles ont besoin de financements.

Des exigences de rendement moins strictes

Le sénateur UMP Jean-Pierre Fourcade avait mis en garde le FSI contre cet effet d'éviction, dans son rapport adopté en juin dernier par la Commission des finances du Sénat. Tout en reconnaissant que le FSI avait permis, en 2009, en pleine récession, "de pallier l'absence d'investisseurs dans un marché du capital-investissement très déprimé", il soulignait "qu'en jouant un rôle proche de celui des fonds privés, mais avec des exigences moins strictes en termes de taux de rendement interne, le FSI est susceptible d'exercer une forme de concurrence à l'égard des acteurs traditionnels du capital-investissement." Une concurrence d'autant plus aisée que, contrairement aux sociétés de capital-investissement, le FSI, financé par l'Etat, ne subit pas la raréfaction des investissements alloués au private equity par les banques et les assureurs, ces traditionnels pourvoyeurs du capital-investissement étant aujourd'hui en butte au durcissement des réglementations relatives à leurs fonds propres. Le sénateur Fourcade n'hésitait donc pas à conclure que "le FSI devrait s'abstenir d'investir s'il apparaissait qu'un investissement potentiel pouvait être financé dans de bonnes conditions par les seuls acteurs privés."

Le FSI finance le capital-investissement

Mais les choses ne sont pas si simples. Car, au-delà de ses investissements directs dans des entreprises, le FSI investit dans...des fonds de capital-investissement, au travers du programme FSI France Investissement. « Si, comme tout nouvel entrant, le FSI peut-être considéré comme un concurrent supplémentaire par les sociétés de capital-investissement, il présente actuellement, et notamment, l'avantage d'apporter de l'argent public en cette période de pénurie de levées de fonds, où les investisseurs institutionnels dans le non coté sont pénalisés par les contraintes liées à Bâle 3 et Solvabilité 2 [réglementations des fonds propres des banques et des assureurs ; Ndlr]. Il est de ce fait un acteur essentiel pour le capital-développement et principalement pour le capital risque", tempère Hervé Schricke, président de l'Afic. Bref, attention à ne pas scier l'une des branches sur lesquelles le private equity est assis.

 

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.