La high-tech snobe la Bourse, les biotechs en raffolent

Avec une douzaine d’opérations réalisées depuis 2013, la France est le numéro un européen des introductions en Bourse dans la santé et les biotechs, selon la banque Bryan Garnier. L’Hexagone ne totalise en revanche que 4 "IPO" dans la high-tech, dans la catégorie des opérations supérieures à 20 millions d'euros.
Christine Lejoux
L'activité des biotechs est si capitalistique que lever de l'argent implique de façon quasi automatique de passer par la Bourse.

L'année 2014 a vu le retour en force des introductions en Bourse en Europe. Les sociétés du Vieux Continent, et tout particulièrement les jeunes entreprises innovantes, ont levé un total de 51,7 milliards d'euros l'an dernier via des IPO (initial public offerings), un montant deux fois supérieur à celui de l'année précédente, selon les données de la banque d'investissement Bryan Garnier. En France, s'il y a un secteur d'activité qui plébiscite la Bourse pour le financement de l'innovation, c'est bien celui des biotechnologies et de la santé. Avec une douzaine d'introductions en Bourse réalisées depuis 2013, dont celles de Pixium Vision, Genticel ou encore SuperSonic Imagine, la France est le numéro un européen sur le front des IPO dans le secteur de la santé et des biotechs (pour les levées de fonds supérieures à 10 millions d'euros), devançant même d'une courte tête le Royaume-Uni avec ses 11 opérations.

Le bilan est en revanche beaucoup moins flatteur dans la high-tech (éditeurs de logiciels, groupes d'électronique, etc.), où, dans la catégorie des introductions en Bourse de plus de 20 millions d'euros, l'Hexagone ne totalise que quatre opérations depuis 2013, très loin, cette fois, derrière le Royaume-Uni et ses 26 IPO. "Le secteur technologique n'utilise pas suffisamment la Bourse pour se financer", avait ainsi regretté Eric Forest, président d'Enternext, lors du forum annuel de Paris Europlace, en juillet dernier. A tel point que cette filiale d'Euronext dédiée aux PME et aux ETI lancera cette année plusieurs initiatives destinées à dynamiser l'usage des marchés dans le financement du secteur technologique, à commencer par la création d'un label Tech.

La Bourse, un impératif pour le financement des biotechs

Si l'utilité de la Bourse dans le financement de l'innovation va moins de soi pour les sociétés high-tech que pour les biotechs, c'est d'abord parce que ces dernières "n'ont pas le choix", affirme Greg Revenu, "managing partner" chez Bryan Garnier. L'activité des biotechs nécessite en effet des investissements si lourds, en particulier lorsqu'elles sont déjà arrivées à un certain stade de maturité, que "lever de l'argent passe par la Bourse", complète Hervé Ronin, associé chez Bryan Garnier. Et quasi-exclusivement par la Bourse car il existe encore très peu de fonds de capital-risque européens spécialisés sur le "late stage venture", c'est-à-dire sur les financements compris entre 5 millions et 30 millions d'euros.

Dans la high-tech, en revanche, où les métiers sont généralement bien moins capitalistiques que dans les biotechs et où les débouchés commerciaux sont plus rapides, "beaucoup d'entreprises ont la capacité de trouver des financements auprès d'investisseurs privés", assure Greg Revenu. Et d'insister : "Dans la high-tech, une société exceptionnelle peut lever 100 millions d'euros dans le cadre d'un placement privé auprès de fonds de capital-risque."

Le mauvais souvenir de l'éclatement de la bulle Internet

Cela devrait devenir d'autant plus vrai que, si les fonds européens de "late stage venture" sont encore rares dans le domaine de la santé, ils commencent en revanche à se développer dans la high-tech, à l'image de Partech Growth, lancé fin janvier par la société française de capital-risque Partech Ventures et destiné à investir chaque année des tickets de 10 millions à 45 millions d'euros dans des start-up du secteur high-tech. "Certains acteurs du late stage venture ont une force de frappe très importante, qui les placent en compétition avec la Bourse", souligne Greg Revenu.

Une concurrence d'autant plus rude "qu'il est (par ailleurs) difficile de convaincre les actionnaires des sociétés high-tech qu'une introduction en Bourse peut-être plus intéressante pour le financement de l'entreprise que sa cession à des industriels ou à des fonds de capital-investissement", ajoute Greg Revenu. Il faut dire que l'éclatement de la bulle Internet, en 2000, demeure de sinistre mémoire dans le secteur high-tech, dont nombre d'acteurs demeurent vaccinés contre la Bourse, même quinze ans après.

Christine Lejoux

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