Crédit immobilier : la Banque de France dédramatise la chute du marché

A quelques jours de la prochaine réunion du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) qui doit se pencher sur un éventuel assouplissement des règles d’octroi de crédit immobilier, la sous-gouverneure de la Banque de France, Agnès Bénassy-Quéré, a présenté dans une note une vision bien moins pessimiste du marché du crédit immobilier que certains professionnels avancent auprès de Bercy. Selon l’économiste, le marché « se normalise » après des années exceptionnelles.
Le marché du crédit à l'habitat a atteint 12 milliards d'euros en avril, en net recul par rapport aux pics de l'ordre de 20 milliards d'euros par mois en 2021 et 2022.
Le marché du crédit à l'habitat a atteint 12 milliards d'euros en avril, en net recul par rapport aux pics de l'ordre de 20 milliards d'euros par mois en 2021 et 2022. (Crédits : DR)

Le message est clair : la baisse du marché du crédit immobilier relève d'une « normalisation après les exubérantes années de taux d'intérêt très bas », et non d'un effondrement du marché. Il est signé Agnès Bénassy-Quéré, sous-gouverneure de la Banque de France, par ailleurs économiste éminente et professeure des Universités.

La publication, ce jeudi, sur le blog de la Banque de France de ce long article sur le crédit immobilier, intitulé « la poule, l'œuf et le prix de l'œuf », ne doit rien au hasard : elle intervient dans un contexte de forte pression des professionnels du crédit et de l'immobilier sur les autorités pour assouplir les règles d'octroi imposées depuis 2022 par le Haut conseil de stabilité financière (HCSF), sous la supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), présidée par le....gouverneur de la Banque de France. Or, ce même Conseil, doit se réunir le 13 juin prochain pour arrêter sa position, sur un possible assouplissement.

Une flexibilité pas entièrement utilisée

Pour mémoire le HSCF plafonne le taux d'effort des ménages (charge du crédit sur revenu) à 35% du revenu disponible mais les prêteurs peuvent de déroger à cette règle à hauteur de 20% de la production. Une flexibilité qui n'est d'ailleurs pas entièrement utilisée par les banques (en moyenne 14% de la production). La dérogation doit être réservée à 80% aux acquéreurs de la résidence principale (et au moins 30 % aux primo-accédants) mais cette clientèle a de plus en plus de mal à réaliser leurs projets avec la montée des taux et la relative inertie des prix.

Parallèlement, les ménages multi-propriétaires, acquéreurs de résidence secondaire ou de logements locatifs, ne respectent généralement pas le taux d'effort malgré des revenus confortables. C'est sur ce segment que les professionnels du crédit souhaiteraient plus de souplesse. Alors que le monde de l'immobilier et du BTP sonne l'alerte, Bercy semble plutôt ouvert à des ajustements, notamment sur l'investissement locatif.

Ajustements techniques

Poliment, la Banque de France est également prête à concéder des « ajustements techniques », à l'instar de ce qu'elle avait déjà accepté avec la mensualisation, jusqu'en juillet, de l'actualisation du taux d'usure pour permettre aux banques d'ajuster plus vite leurs barèmes de crédit à l'évolution des taux. Comment, en effet, une banque peut-elle prêter à 3% à un ménage sur 20 ans quand l'Etat Français emprunte à 3% sur dix ans ? Certes, le crédit immobilier est un produit d'appel mais les banques ne sont plus prêtes à sacrifier leurs marges sur des durées très longues.

Reste que la Banque de France ne partage pas l'opinion d'un marché en voie d'effondrement. Déjà, en avril dernier, la Banque de France avait estimé que les règles du HCSF ne jouaient pas de rôle significatif dans le ralentissement du crédit. Aujourd'hui la sous-gouverneure multiplie les rappels statistiques.

Un, la production de crédit baisse fortement depuis le deuxième semestre 2022, mais elle reste à des niveaux nettement au-dessus de ceux observés durant la décennie 2005-2014, soit 12 milliards d'euros au mois d'avril. La France reste donc bien au-dessus de la production observée en Allemagne, en Italie ou en Espagne. Deux, l'économiste pense que le pouvoir d'achat immobilier, qui s'est fortement dégradé ces dernières années, la baisse des taux ne compensant pas la hausse des prix, devrait peu à peu se reconstituer avec le mouvement de baisse des prix qui semble s'amorcer.

Des ménages endettés

Enfin trois, et c'est sans doute le point qui inquiète le plus la Banque de France, la dette des ménages (65% du PIB) est la plus élevée des quatre principaux grands pays de la zone euro. La Banque de France le dit et le répète, les règles du HCSF ne vise qu'un objectif : éviter le surendettement des ménages.

*« Avec la hausse des taux d'intérêt, la tentation existe d'allonger de nouveau la durée des prêts ou d'alourdir les charges de remboursement », prévient Agnès Bénassy-Quéré, alors même que les contraintes du HCSF ne semble pas avoir évincé les primo-accédants ou les jeunes du marché. Ce que conteste le Professeur des Universités Michel Mouillard, conseiller scientifique de l'Observatoire du Crédit Logement/CSA qui dresse un bilan assez sombre de l'évolution du marché.

Quid alors de la crise du logement ? « Si le ressenti est clairement celui d'une pénurie (de logements, NDLR), c'est en partie en raison de l'importance du parc qui n'est pas dévolu à la résidence principale et parce que les nouveaux logements ne se situent pas suffisamment dans les zones où la demande est forte », avance la sous-gouverneure.

Lire aussiCrédit immobilier : Bercy réfléchit à un assouplissement des conditions d'octroi

Autrement dit, cela ne concerne pas le champ des règles d'octroi du crédit immobilier. « La normalisation du crédit à l'habitat pourrait finalement contribuer à une forme de rationalisation de l'offre de nouveaux logements en France en limitant le bourgeonnement de résidences secondaires et meublés touristiques, en sensibilisant les investisseurs au risque de vacance et en réduisant le prix du foncier », conclut l'économiste. Les débats s'annoncent vifs à la prochaine réunion du HSCF.

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Commentaires 9
à écrit le 11/06/2023 à 5:43
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Exact, fallait savoir faire de bonnes affaires. En Asie, beaucoup d'opportunites, fiables et resistantes. Faut plus de courage, vertu que le francais lambda helas ne possede pas. Il prefere le canape avec chips et kro.

le 11/06/2023 à 8:04
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"En Asie, beaucoup d'opportunites, fiables et resistantes. " Beaucoup de suicides et peu d'enfants également.

à écrit le 09/06/2023 à 16:46
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La Banque de FRANCE Hi, hi, hi..... On se souhaite bon appétit!!!!!!!

à écrit le 08/06/2023 à 19:37
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Je me souviens des mes parents qui avaient emprunté pour leur maison à 20% mais les prix de tout mais déjà des maisons étaient beaucoup plus bas également et ils vivaient très bien avec des salaires moyens.

le 09/06/2023 à 2:48
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Citoyen blase s'exprimait mieux. On ne comprend rien a votre message. Que voulez-vous dire ?

le 09/06/2023 à 8:38
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Ok le sentimental puisque tu insistes, ils avaient payé leur maison 200000 francs, une maison de 150 m2 carré proche de tous commerces, ce qui de nos jours ferait 30000 euros, avec 20% d'intérêt ça ne fait malgré tout que peu à rembourser au total. F...

le 09/06/2023 à 10:16
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C'est pourtant très clair. Il y a 50 ans, les taux d'intérêts étaient certes élevés. Mais l'immobilier coutait beaucoup moins cher. Un crédit de 100 000 euros à 20% coute moins cher au global qu'un crédit de 700 000 euros à 3%. En plus à l'époque, ...

le 11/06/2023 à 5:39
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Citoyen tu as mal compris. Je parlais de ta syntaxe. Tu es de mauvaise foi pour ne pas dire tordu. Que crois-tu donc que j'ignore les taux d'emprunts il y a 30/ 40 ans ? L'inflation a 12 voire 14%...j'ai achete mon premier appart a Cannes en 80, Reve...

le 11/06/2023 à 8:02
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"Citoyen tu as mal compris. Je parlais de ta syntaxe. Tu es de mauvaise foi pour ne pas dire tordu." De la bile, encore de la bile, toujours de la bile.

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