Les fintech ont encore du chemin à faire pour conquérir les Français

Sur la dizaine de services proposés par les fintech, le plus prisé des Français – l’agrégation de comptes bancaires – est utilisé par…9% seulement de la population, d’après un sondage mené par Deloitte et Harris Interactive.
Christine Lejoux
Le crowdfunding a beau être connu de 38% des sondés, ce qui en fait le segment des fintech le plus célèbre, il n'est utilisé que par 6% des Français interrogés par Deloitte et Harris Interactive.

Il y a loin de la frénésie d'investissements et du « buzz » médiatique suscités par les « fintech » à leur utilisation par monsieur et madame Tout-le-Monde. En l'espace de quatre ans, les fonds de capital-risque ont multiplié par sept leurs investissements dans ces startups spécialisées dans les technologies financières, à 14 milliards de dollars en 2015, à l'échelle mondiale, a indiqué Cédric Tessier, vice-président de l'association professionnelle France Fintech, jeudi 24 mars, lors d'une conférence de presse organisée avec le cabinet Deloitte. Des investissements qui devraient plus que décupler d'ici à 2020, pour atteindre 150 milliards de dollars, affirme Cédric Tessier. Cet appétit féroce des investisseurs pour les fintech - qui font profession de révolutionner le secteur bancaire avec des services plus simples, transparents, personnalisés et moins onéreux - tranche avec la connaissance et l'utilisation que le grand public en a, en France du moins.

En effet, sur la dizaine de services proposés par les fintech, le plus prisé des Français - l'agrégation de comptes bancaires, qui permet d'avoir une vue d'ensemble de ses comptes, même s'ils sont domiciliés dans plusieurs banques - l'est par...9% seulement des 2.000 personnes interrogés par Deloitte et Harris Interactive, dans le cadre d'un sondage dont les résultats ont été publiés le 24 mars. Que dire, alors, des scores des services « fintech » les moins courus... Le transfert d'argent via les réseaux sociaux est utilisé par 3% seulement des sondés, et ils ne sont que 2% à recourir à l'assurance « peer to peer » (assurance communautaire). Il faut dire que ces deux derniers services sont connus par moins de 20% des personnes interrogées. « La méconnaissance des fintech par le grand public représente l'un de nos principaux challenges », reconnaît Cédric Tessier.

Les Français manquent de confiance dans ces nouveaux entrants

Mais la notoriété ne fait pas tout : le crowdfunding a beau être connu de 38% des sondés, ce qui en fait le segment des fintech le plus célèbre, il n'est utilisé que par 6% des Français. Sans doute parce que le financement participatif, qui consiste à mettre en relation des porteurs de projet en quête d'argent et des épargnants à la recherche de rendements, relève moins d'un besoin de la vie quotidienne que l'agrégation de comptes bancaires ou l'assurance auto connectée. Cette dernière, qui permet par exemple aux bons conducteurs d'obtenir des ristournes sur leur cotisation d'assurance, est en effet le service qui suscite le plus d'intérêt chez les Français, ex-aequo avec l'agrégation de comptes bancaires et l'assurance habitation connectée (caméras, détecteurs de fumée, de fuites, etc.) : ces trois prestations de fintech intéressent 45% des sondés, dont un tiers environ se dit « plutôt intéressé », le solde avouant être « très intéressé. » Le crowdfunding, lui, intéresse 38% des Français interrogés, dont 7% seulement font montre d'un vif intérêt.

« Après l'absence de besoin, le manque de confiance envers les plateformes (de crowdfunding) est le frein le plus évoqué (par les Français), et conduit à une préférence pour un emprunt ou un placement auprès de leur établissement financier traditionnel », décrypte Deloitte. Tout comme « la peur du traçage, le sentiment d'intrusion, l'incertitude sur l'usage qui sera fait des données personnelles » expliquent que 8% seulement des Français se disent très intéressés par l'assurance santé connectée. « Il va falloir mener un travail de pédagogie très important pour convaincre les Français qu'il existe un intérêt à utiliser les services des fintech », admet Julien Maldonato, directeur de l'industrie financière chez Deloitte.

Un travail qui n'est pas seulement l'affaire des fintech, mais également des acteurs traditionnels de la finance, lesquels doivent composer avec ces nouveaux entrants, et des pouvoirs publics. « Le gouvernement a un intérêt économique et social à faire des fintech une filière d'excellence, celles-ci créant des emplois et favorisant le pouvoir d'achat », explicite Julien Maldonato. Centré sur les données personnelles et, en particulier sur leur protection, le projet de loi numérique, qui sera débattu au Sénat à partir du 26 avril, pourrait précisément aider les Français à poser un autre regard sur les fintech.

Christine Lejoux

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Commentaires 5
à écrit le 29/03/2016 à 12:56
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Quand je vois que par souci de sécurité je ne peux plus accéder à ma banque par Internet mes navigateurs ne faisant plus l'affaire? En précisant que je reçois par sms donnant un code d'accès! résultat quitter la banque ou changer de matériel. C'est b...

à écrit le 29/03/2016 à 12:09
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L'agrégation des comptes bancaires, ca fait longtemops que je la pratique .... Pas besoin de fintech, de services payants. Je suis mes comptes au plus serré avec Money! Quant aux ristournes sur les cotisations d'assurances, je pratique aussi, sans ê...

à écrit le 29/03/2016 à 11:51
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"Il existe un intérêt à utiliser les services des fintech "... pour ceux qui proposent ces services, , certainement pas pour ceux qui, en les souscrivant les paieront. Financièrement et dans leur vie privée par l'utilisation des données personnelles ...

à écrit le 29/03/2016 à 10:16
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"le manque de confiance envers les plateformes de crowdfunding", était déjà la principale difficulté à la création et à la croissance des "caisses financières" dans les années 1860. Ces caisses financières sont pourtant devenues les banques de dépôt...

à écrit le 29/03/2016 à 8:28
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Utiliser la monnaie pour générer de l'argent sans produire de richesse, cela n'a pas de sens!

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