Les « green bonds » prêts à rebondir en 2019

Les émissions d’obligations vertes ne devraient pas dépasser 160 milliards de dollars cette année, comme en 2017, dans un contexte de marchés peu porteur. Pourtant de nouveaux émetteurs arrivent et la demande des investisseurs reste forte.
Delphine Cuny
Au-delà des obligations vertes labellisées, l'univers des obligations « alignées sur le climat » en circulation est beaucoup plus vaste et atteint les 1.200 milliards de dollars selon Climate Bonds Initiative, et même 1.450 milliards si l'on inclut les obligations des agences et collectivités américaines appelées « muni bonds ». Il s'agit de la classe d'actifs la plus développée dans le domaine de la finance verte.
Au-delà des obligations vertes labellisées, l'univers des obligations « alignées sur le climat » en circulation est beaucoup plus vaste et atteint les 1.200 milliards de dollars selon Climate Bonds Initiative, et même 1.450 milliards si l'on inclut les obligations des agences et collectivités américaines appelées « muni bonds ». Il s'agit de la classe d'actifs la plus développée dans le domaine de la finance verte. (Crédits : La Tribune)

Le vert serait-il passé de mode sur les marchés ? Les émissions de « green bonds » ou obligations vertes, la classe d'actifs la plus développée dans le domaine de la finance verte, ont connu un coup d'arrêt cette année. Elles sont en baisse de 23% au troisième trimestre et devraient avoisiner les 160 milliards de dollars, comme l'an dernier. Dans le même temps, le mois de novembre a inscrit un nouveau record mensuel d'émissions (près de 24 milliards de dollars).

Ces emprunts émis sur les marchés spécifiquement pour financer des projets ayant un impact positif sur l'environnement (énergies renouvelables, réduction des émissions de CO2, etc) et qui sont assortis de contraintes de transparence à travers des rapports réguliers sur l'usage des fonds levés, avaient pourtant le potentiel d'atteindre 1.000 milliards de dollars à horizon 2020 selon la Climate Bonds Initiative (CBI). Cette organisation à but non lucratif britannique s'est fixé comme mission de mobiliser le gigantesque marché obligataire (100.000 milliards de dollars) pour le financement de solutions contre le changement climatique.

Le marché des « green bonds », qui ne pesait que quelques milliards par an en 2008-2009, a pourtant quadruplé depuis 2015, passant de 42 milliards à plus de 160 milliards de dollars l'an dernier, selon CBI. Des chiffres qui démontrent « qu'un volume croissant d'actifs tient compte d'objectifs environnementaux » se félicite le récent bilan de l'action climatique du secteur financier publié par l'association Climate Chance.

Près de 155 milliards de dollars de green bonds ont été émis cette année  au 12 décembre, selon CBI, dont la prévision annuelle de 210 milliards ne sera vraisemblablement pas atteinte : l'année risque de se terminer sur une stagnation.

Lire aussi : Qu'est-ce qu'un green bond ?

Une demande forte des investisseurs

L'agence de notation Moody's tablait même sur une croissance de 60% à 250 milliards de dollars, avant d'abaisser sa projection entre 175 et 200 milliards en août dernier. Ce ralentissement est lié en grande partie au contexte général du marché obligataire (les émissions sont en recul de 5% sur les neuf premiers mois) et des marchés financiers en général (avec plusieurs vagues massives de ventes d'actifs).

La demande pour ce type de produits financiers, qui restent rares, est forte et les opérations sont toujours largement sursouscrites. L'Irlande, qui a émis son premier green bond de 3 milliards d'euros en octobre, a attiré une demande presque quatre fois plus élevée (plus de 11 milliards d'euros).

Si l'on regarde l'ensemble des émissions obligataires, la part des « green bonds » a progressé et s'élève désormais à 2,8%, contre 2% l'an dernier, selon les statistiques de Dealogic. En revanche, le poids des obligations vertes dans le colossal marché obligataire mondial reste très faible, moins de 1%, avec 461 milliards de dollars de « green bonds » labellisés en circulation. L'ensemble de l'univers des obligations « alignées sur le climat » est toutefois plus vaste et dépasse les 1.450 milliards de dollars, en incluant les obligations des agences et collectivités américaines appelées « muni bonds » et les émetteurs tirant au minimum 75% de leurs revenus d'actifs « verts », selon Climate Bonds Initiative.

La taille encore réduite de ce marché reste un problème pour certains investisseurs : le patron du fonds de pension japonais, GPIF, le plus grand au monde, estime même que les green bonds sont un produit « perdant-perdant » du fait des fortes contraintes pour les émetteurs et de la faible liquidité pour les investisseurs.

green bonds 2018 mois par mois

[Emissions de green bonds mois par mois en 2018. Crédits : CBI]

Des profils de plus en plus variés


Le profil des émetteurs d'obligations vertes continue de se diversifier : les banques de développement, pionnières, ont été rejointes par les collectivités, les institutions financières, les groupes d'énergie, les Etats (CBI recense près de 500 émetteurs différents). La France détient toujours le record de la plus importante obligation verte souveraine jamais émise, avec plus de 14,5 milliards d'euros à l'issue d'une quatrième tranche émise en juin dernier. Mais d'autres pays se mettent en mouvement : l'Indonésie, premier exportateur de charbon au monde, a émis en février le premier « green sukuk » (respectant les lois islamiques) souverain pour 1,25 milliard de dollars. Le gouvernement des Pays-Bas est dans les starting-blocks pour 2019 : ce sera le premier émetteur noté « Triple A » à venir sur le marché.

L'aéroport d'Amsterdam Schipol a été le premier d'Europe à émettre « vert » (500 millions d'euros en octobre). La banque néerlandaise ING a émis début novembre pour 2,6 milliards d'euros d'obligations climat certifiées, la plus grosse opération d'une banque européenne à ce jour.

Le groupe Crédit Agricole, qui a retrouvé sa place de leader mondial des arrangeurs de green bonds, devant Bank of America Merrill Lynch et HSBC selon Dealogic (au 30 novembre 2018), a également émis le 28 novembre sa première propre obligation verte d'un milliard d'euros. Le groupe La Poste a aussi émis son green bond inaugural de 500 millions d'euros le 23 novembre, sursoucrit plus de 4 fois.  

Dans ce marché bouillonnant, les multinationales américaines (banques mises à part et quelques exceptions comme Apple) restent les grandes absentes...

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Classement Green Bonds Crédit Agricole

[Classement des premières banques arrangeuses de green bonds dans le monde en 2018 au 13 décembre. Crédits : Global Capital / Dealogic]

Delphine Cuny

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Commentaire 1
à écrit le 14/12/2018 à 11:17
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LE truc est à peine lancé que déjà on parle de rebond... Les perspectives sont mauvaises donc. "L’environnement, nouvelle frontière du capitalisme" https://blog.mondediplo.net/2017-10-13-L-environnement-nouvelle-frontiere-du-capitalisme

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