Qui aurait pensé que MoneyGram, pionnier d'un marché du transfert d'argent bouleversé par l'arrivée des Fintech, serait l'objet d'une bataille boursière ? Six semaines après l'annonce du rachat amical du numéro deux du marché, derrière Western Union, par le chinois Ant Financial, la plus grosse Fintech du monde, une entreprise peu connue du Kansas propose une contre-offre aux actionnaires de MoneyGram. Fournisseur de solutions de paiement électronique, coté sur le Nasdaq et capitalisant 4,3 milliards de dollars, Euronet Worldwide met 130 millions de plus (+15%) que la filiale du milliardaire Jack Ma, soit un peu plus d'un milliard de dollars en cash, sans compter la reprise de dette de 940 millions.
Malin, Euronet fait valoir que son projet d'acquisition trace une voie « claire et beaucoup plus certaine » vers un bouclage rapide car il n'aura pas besoin de passer devant le Comité pour l'investissement étranger aux Etats-Unis (CFIUS) et qu'il détient déjà des licences de transfert d'argent aux Etats-Unis et d'excellentes relations avec les régulateurs américains et étrangers. Insistant sur son « historique impeccable en matière de conformité », il joue la carte du patriotisme économique, du partenaire américain fiable et transparent, contre l'aventure sous pavillon chinois.
« Le traitement et la préservation de l'historique financier personnel de millions de clients américains sur dix ans par MoneyGram pourrait compliquer l'enquête du CFIUS et les mesures potentielles à prendre » fait valoir le cofondateur et Pdg d'Euronet, Michael Brown, dans sa lettre à la présidente du conseil de MoneyGram Pamela Patsley.
Sécurité juridique et prime
Un discours qui pourrait plaire au nouveau président américain. Dans son offre qui est à ce stade non engageante, le patron d'Euronet inclut aussi une indemnité de 69 millions de dollars en cas de blocage des autorités antitrust, soit « approximativement quatre fois plus que la clause de rupture CFIUS proposée par Ant Financial ».
[Comparaison des deux projets par Euronet]
Fondé en 1994 en Hongrie, Euronet s'est d'abord développé en Europe centrale comme un réseau de distributeurs automatiques de billets et n'a cessé de grandir par acquisitions, aux Etats-Unis et en Europe, dans le traitement des paiements, dans le transfert d'argent avec le numéro trois du marché, Ria, et plus récemment dans les solutions cloud avec Pure Commerce et le change avec HiFX. Il a aussi une activité de cartes prépayées, de paiement ou de minutes de téléphonie mobile, et de cartes cadeaux. Employant 5.600 salariés, le groupe a réalisé près de 2 milliards de dollars de chiffre d'affaires l'an dernier (+11%), dont 800 millions dans le transfert d'argent. Son réseau comprend 35.000 distributeurs automatiques et 163.000 points de contact de transfert d'argent dans 53 pays.
Euronet a déjà tenté de racheter MoneyGram en 2008 et en 2013. La cible n'a pas réagi pour l'instant, ni ses principaux actionnaires, les fonds Thomas H Lee Partners et Goldman Sachs. Ant Financial non plus : le Chinois sera-t-il contraint d'augmenter son offre ? L'action MoneyGram a bondi de près de 25% à Wall Street mardi, à 15,75 dollars, soit un peu plus que le prix proposé par son nouveau courtisan.
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