Pour créer sa start-up digitale, la France n'est pas (encore) le meilleur endroit

Dans quel pays du G20 est-il le plus facile de démarrer son business ? Qui parvient le mieux à éviter la fuite des talents à l'étranger ? Une étude du cabinet EY, présentée dans le cadre du G20 des entrepreneurs à Pékin, dresse le palmarès des pays les plus propices au lancement de sa start-up digitale. Alors que les Etats-Unis et le Canada offrent le cadre le plus favorable, la France peine à se démarquer.
Sarah Belhadi
Si les atouts de la France sont reconnus en matière de formations au numérique, les barrières réglementaires continuent d'être pénalisantes.
Si les atouts de la France sont reconnus en matière de formations au numérique, les barrières réglementaires continuent d'être pénalisantes. (Crédits : Reuters)

"Un bout de chemin a été parcouru mais il reste encore des choses à faire. Suivant les indicateurs, la France a entre 10 et 30 ans de retard sur la question", résume Jean-François Royer, associé du cabinet EY. Si la France s'améliore -elle occupe la 5ème place du premier baromètre dédié à l'entrepreneuriat digital- elle reste toujours à la traîne dans plusieurs domaines qui permettent de mettre en place un écosystème favorable.

Dans le même temps, le Canada et les Etats-Unis sont au coude-à-coude. L'étude de EY "Disrupting the disruptors", présentée à Pékin au G20 des entrepreneurs début septembre, a élaboré cinq piliers permettant de déterminer les pays les plus "business friendly" pour créer sa start-up numérique. Revue de détail.

- L'accès au financement :

Alors que le Canada se classe premier dans l'accès au financement, suivi par les Etats-Unis, le Japon et l'Australie, la France occupe seulement la 5ème place. "L'étude a pris en compte l'accès aux financements alternatifs, comme le crowdfunding. Si la France s'est améliorée, elle est encore loin du développement que connaît le Canada par exemple", observe Jean-François Royer de EY.

A noter toutefois, la création de Bpifrance fin 2012 qui accompagne depuis les start-up hexagonales. Une telle initiative a permis à la France de progresser en quelques années seulement, observe l'associé du cabinet de conseil EY.

 -La culture entrepreneuriale :

Le second critère pris en compte par ce classement est la notion de "culture entrepreneuriale".

"Elle tient compte de plusieurs indicateurs : la question de la propriété intellectuelle, de la perception de l'opportunité et de l'intérêt de démarrer un business, mais aussi la façon dont l'entrepreneuriat est perçu comme choix de carrière chez les 18-64 ans", détaille Jean-François Royer.

La France ne se classe que 10ème, tandis que les Etats-Unis, l'Allemagne et le Japon occupent les trois premières places.

Alors que le premier pilier vise à déterminer des critères objectifs en  fonction des pays, la notion de culture entrepreneuriale s'intéresse à la perception. "L'idée, c'est de mesurer l'image. En France, on constate qu'il y a encore des générations qui ont toujours une perception très négative de l'entreprise. Un de nos freins majeurs, c'est cette aversion que l'on éprouve face à la prise de risque. Toutefois, il y a aussi des points positifs en France comme la propriété intellectuelle qui nous permet de remonter dans le classement", observe Jean-François Royer.

Mais la marge de progression de l'Hexagone en la matière pourrait prendre plusieurs années.

"La culture entrepreneuriale est sans doute l'aspect le plus lent. Il faut du temps pour que les choses évoluent. Mais cela progresse : il y a encore 10 ans, certaines études montraient que 80% des parents conseillaient à leurs enfants de devenir fonctionnaires."

 -Le cadre juridique et fiscal

En France, le cadre réglementaire, jugé trop contraignant, continue d'être pénalisant pour le développement des entreprises. Si le Royaume-Uni se classe premier, suivi du Canada et des Etats-Unis, la France arrive seulement en dixième position.

"Cette thématique est récurrente mais le blocage reste énorme dans les esprits. La mobilisation autour de la loi Travail en est l'un des exemple. De plus, l'incertitude réglementaire qui accompagne parfois l'agenda politique constitue un frein pour établir un environnement favorable", note Jean-François Royer.

-La formation au digital et à l'entrepreneuriat

Les Etats-Unis, le Japon, l'Australie occupent les trois premières places suivis de la France et du Canada. L'Hexagone obtient un bon score dans le domaine de l'éducation entrepreneuriale "grâce à ses compétences dans le monde de la recherche, notamment scientifique".

Si les atouts de la France sont reconnus par le classement, elle doit toutefois développer davantage l'éducation entrepreneuriale dès le primaire et le secondaire, comme le font déjà le Royaume-Uni ou le Canada.

De plus, les formations dans l'enseignement supérieur doivent aussi s'adapter aux mutations de l'économie, prévient Jean-François Royer  :

 "Il serait toutefois nécessaire de développer des formations en management adapté à cette nouvelle économie digitale. La plupart des managers sont démunis face à ça. Les start-up ne peuvent plus se soumettre au modèle organisationnel traditionnel. Mais sur ce point, on en revient toujours au même constat. La nécessité de revoir une certaine organisation du travail et de s'attaquer à l'aspect réglementaire".

 -L'accompagnement de l'entrepreneuriat digital :

L'étude EY avance que l'économie digitale contribue à hauteur de 8% du PIB dans les pays du G20 mais l'accompagnement pour développer son entreprise digitale reste encore inégal.

Pour ce dernier point, l'étude a dressé un état des lieux des "clusters", c'est-à-dire des structures d'accompagnement existantes pour les start-up qui mêlent entreprises et écoles. Elle prend ainsi en compte plusieurs facteurs comme la qualité de la recherche ou encore l'accès à la technologie récente. Conclusion, la France est encore trop dispersée malgré ses atouts. "En quelques années, les entreprises sont nombreuses à avoir développé leur propre incubateur de start-up mais ces initiatives sont éparses. ll faudrait les regrouper". De plus, la France est pénalisée car elle a mis du temps à développer des programmes de mentorat et de coaching pour accompagner les jeunes entrepreneurs.

Résultat, la France se classe seulement sixième. Les Etats-Unis, le Royaume-Uni, l'Allemagne, le Canada, et le Japon occupent le haut du podium.

"Le Japon a depuis longtemps une forte culture d'adoption rapide des innovations digitales ce qui rend le marché attractif pour les entrepreneurs. Résultat, l'entrepreneuriat comme opportunité de carrière est valorisée par une grande partie de la population", observe Jean-François Royer.

>> DIAPORAMA : Les meilleurs pays pour créer sa startup digitale

Sarah Belhadi

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Commentaires 4
à écrit le 16/09/2016 à 10:25
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C'est vrai, cela marche plutôt bien ici, et je le dis alors que je ne réside pas en France, mais ma "petite boutique" française est plutôt performante... Bon il y a des charges sociales, mais c'est aussi le cas ailleurs, partout en Europe...

à écrit le 15/09/2016 à 22:10
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La France vient dépasser l'Allemagne en montant de levées de fond pour les startup et même la GB en nombre de levées de fond. Et cela ne fait que commencer.

à écrit le 15/09/2016 à 18:01
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Il est très facile de monter son entreprise en France. Le plus gros frein à la réussite des nouveaux entrepreneurs en France reste les charges sociales (RSI/URSSAF) 60% des revenus des indépendants. C'est de la folie !! et on ne s'en rend compte qu'à...

à écrit le 15/09/2016 à 16:45
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Voici une application astucieuse, née de la French Tech, permettant de créer ses propres bases de données depuis le web : http://www.hurryscrap.com

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