L'open data, une mine pour l'économie sociale et solidaire

On parle beaucoup du big data, cette explosion de la quantité de données produites par les internautes, qui fait rêver les acteurs privés. Mais beaucoup moins du mouvement open data, émergent en France, qui, en libérant des données publiques, pourrait donner un nouveau pouvoir au citoyen et consommateur. A condition que les acteurs de l'économie sociale et solidaire s'en saisissent.
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Le big data fait beaucoup parler de lui depuis quelques temps. Et pour cause. Cette avalanche de données numériques générées par la multiplication des vecteurs, l?explosion des équipements et des échanges entre les internautes du monde entier donnent le tournis. On estime que cette quantité double tous les 18 à 24 mois. Surtout, comme l?a titré La Tribune il y a quelques semaines, « Big data = mega business ». Habilement exploitées, ces données recèlent en effet de véritables mines pour leurs détenteurs.

Les pouvoirs publics eux-mêmes pourraient, en les traitant de façon optimale, réaliser de formidables économies tout en diminuant la fraude et en optimisant les rentrées fiscales.
Mais c?est plus souvent aux acteurs privés, notamment aux grands réseaux de distribution via leurs milliers de cartes de fidélités en circulation, que le big data profite. A en croire les experts, il pourrait d?ailleurs constituer la prochaine révolution marketing. Avec les risques de dérives que l?on imagine aisément, de ventes de données à des fins commerciales et d?atteinte à la vie privée.

Les perspectives de l?open data

Dans le même temps, un autre phénomène, plus discret notamment en France, prend de l?ampleur, qui pourrait au contraire redonner plus de pouvoir au citoyen et même au consommateur. L?open data, né aux Etats-Unis, consiste en effet à rendre publiques, librement accessibles et réutilisables par tous, des informations d?intérêt général (statistiques, horaires, mesures, cartes, dont sont détenteurs les acteurs publics ou privés), permettant ainsi de former et informer les citoyens sur de multiples sujets jusqu?ici réservés aux spécialistes (droit, finance?).

En France, l?Etat a lancé en 2011 sa plateforme nationale de données, et l?open data constitue depuis l?un des axes forts de la politique de modernisation de l?action publique. En février dernier, a été rendue publique la feuille de route de la mission Etalab, qui prévoit de soutenir l?accès des associations à ces données, et envisage d?étendre l?obligation d?ouverture des données à la sphère associative et aux organismes financés par l?argent public.

Mais pour l?heure, l?économie sociale et solidaire (ESS) française demeure frileuse par rapport à ce mouvement, qu?il s?agisse de l?alimenter par les volumes de données qualifiées qu?elle brasse, ou d?exploiter les nouvelles données auxquelles elle peut désormais accéder à des fins d?intérêt public. Pourtant, l?ESS paraît naturellement concernée, puisque ces données recouvrent essentiellement les sujets de la santé, l?éducation, l?environnement ou la mobilité qui constituent la raison d?être de nombre de ses acteurs.

Les premières initiatives au service des citoyens

De premières initiatives commencent néanmoins à voir le jour. Ainsi, Regards Citoyens a ouvert en 2009 le site nosdeputes.fr, qui "cherche à mettre en valeur l?activité parlementaire des députés de l?Assemblée nationale". Ce qui signifie aussi bien divulguer le taux d?absentéisme de certains députés, que diffuser plus largement les travaux de certains d?entre eux, peu connus du grand public. Un an plus tard, fort du succès de leur première initiative, les mêmes fondateurs lançaient nossenateurs.fr sur un principe similaire.

Regard Citoyen travaille par ailleurs avec une autre jeune pousse de l?Open Data appliquée à l?ESS : Open street map (OSM) a mis au point une carte du monde librement accessible et modifiable, qui permet de repérer et géolocaliser arrêts de bus, bâtiments publics, distributeurs automatiques, pharmacies, bornes de vélos? et toutes sortes de données d?intérêt général telles que l?accessibilité des bâtiments publics? Avec Regard Citoyen, la branche française planche sur un outil de visualisation de l?ensemble des circonscriptions législatives? une cartographie dont l?Etat et le ministère de l?Intérieur ont l?usage, mais qui est aujourd?hui la propriété d?une société privée.

Né en 2012, à l?initiative d?un informaticien français, Open Food Facts répertorie pour sa part l?ensemble des informations (ingrédients, données nutritionnelles, lieu de fabrication, additifs utilisés, etc.) concernant les produits alimentaires du monde entier. Le site "C?est fabriqué près de chez vous" permet de visualiser sur une carte OSM les lieux de production, de transformation et/ou d?emballage des produits alimentaires.

A n?en pas douter, les acteurs de l?ESS appréhenderont de mieux en mieux ce qu?ils peuvent retirer de l?open data et apprendront à exploiter de façon plus systématique ces données devenues accessibles. Un transfert d?information, et donc, de pouvoir, qui pourrait effrayer certains acteurs privés?

Ainsi, en février dernier, au moment de "l?affaire Findus", une carte du trajet physique et du trajet financier de la viande de cheval développées par Open Food Facts, reprise sur de nombreux sites, avait mis en évidence la multiplicité des intermédiaires.
A moins qu?ils n?y trouvent eux aussi leur compte, comme Apple qui utilise des données OSM pour certaines de ses applications, histoire de se libérer un peu de l?hégémonie de Google?
 

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Commentaires 3
à écrit le 22/04/2013 à 11:13
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Bon papier, Dominique ! Signalez l'absence de "E" à "SOCIÉTÉS CITÉS" (frame droit)

à écrit le 21/04/2013 à 11:17
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Dans le fatras de données numériques autant chercher une aiguille dans une botte de foin !

le 22/04/2013 à 1:16
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C'est pas pour rien que c'est un métier à part entière de les faire parler!

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