Pourquoi Airbus veut assembler des A320 aux Etats-Unis

Airbus s'apprête à annoncer le lancement d'une usine d'assemblage d'A320 à Mobile, en Alabama. Plus que d'espérer décrocher des commandes supplémentaires des compagnies américaines, ce projet, en créant de l'emploi aux États-Unis, pourrait faciliter d'éventuels contrats avec la Défense, et l'obtention d'un feu vert de Washington pour des acquisitions. Et bien sûr l'augmentation des cadences de production. En outre, une production en zone dollars permettrait de réduire l'exposition nette d'EADS aux variations de la monnaie américaine.
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A peine installés dans leurs nouvelles fonctions de président d'EADS et de PDG d'Airbus, Tom Enders et Fabrice Brégier frappent fort d'entrée de jeu. Selon la presse américaine, Airbus s'apprête en effet à annoncer l'implantation d'une chaîne d'assemblage d'A320 aux Etats-Unis, à Mobile dans l'Alabama. Ce sera probablement lundi, Airbus ayant confirmé la présence de Fabrice Brégier ce jour-là à Mobile. Trois ans après le lancement de la chaîne d'assemblage d'A320 de Tianjin, en Chine, Mobile sera le quatrième site d'assemblage de ces avions moyen-courrier pour l'avionneur européen avec les deux usines historiques de Toulouse et d'Hambourg. La production pourrait commencer dans trois quatre ans au rythme d'une centaine d'appareils par an. 

Les compagnies aériennes américaines commandent des avions en fonction de leurs intérêts

Quels sont les avantages pour Airbus? D'abord, ce nouveau site permettra à Airbus d'augmenter les cadences de production de l'A320 Neo, qui croule sous les commandes. Et d'assurer ainsi aux compagnies aériennes prêtes à s'engager sur cet appareil, des délais de livraisons beaucoup plus courts qu'aujourd'hui, où il n'y a plus que très peu de créneaux de livraisons jusqu'à au moins 2018.

La quasi-totalité des observateurs, y compris au sein d'EADS et d'Airbus, estiment qu'une telle usine faciliterait en outre les ventes auprès des compagnies aériennes américaines. Constestable. Car s'il est vrai pour la Chine, où Pékin -qui a un rôle central dans les commandes d'avions des compagnies aériennes chinoises- s'est engagé à commander des Airbus en contrepartie de l'installation de l'usine de Tianjin, cet argument est peu duplicable aux Etats-Unis, où les compagnies aériennes sont privées et achètent leurs avions en fonction de leur intérêt. «Quand Southwest, United et d'autres négocient des commandes d'avions, elles se moquent de leur nationalité», expliquent des bons connaisseurs du transport aérien et de l'aéronautique, y compris au sein de l'avionneur.

Ainsi plusieurs compagnies américianes disposent déjà d'appareils européens : US Airways en exploite près de 250, United environ 150  et Jetblue 120. Et American Airlines, un gros client de Boeing s'est engagé en juillet 2011 sur une énorme commande de 260 A320Neo (remotorisés) et d'A320 classiques, qui reste à confirmer depuis que la compagnie est en redressement judiciaire. Et s'il est vrai que les compagnies aériennes américaines ont plus de Boeing que d'Airbus dans leurs flottes long-courriers, cela traduit essentiellement le poids de l'histoire (Airbus est malgré ses trente ans d'histoire encore jeune et les compagnies américaines sont loin d'avoir achevé le renouvellement de leurs flottes, obsolètes et pour la plupart composées des monocouloirs. Il n'empêche, usine ou pas aux Etats-Unis, Airbus est bien placé pour placer son A320. Les compagnies américaines doivent prendre livraison de 4.000 moyen-courriers au cours des 20 prochaines années.

Créer de l'emploi aux Etats-Unis peut faciliter l'obtention de certains contrats dans la défense

En revanche, la création d'emplois aux Etats-Unis qui découlerait de cette nouvelle usine peut être un atout déterminant pour faciliter les discussions sur des contrats de défense pour l'ensemble des activités d'EADS, ou pour faciliter le feu vert de Washington en cas d'acquisitions d'entreprises américaines de défense ou de sécurité. En outre, une usine d'A320 aux Etats-Unis permettrait à Airbus de produire en zone dollars et de réduire ainsi son exposition nette en dollars (chiffre d'affaires moins les coûts dans la même devise), alors que les ventes s'effectuent en dollars pour des coûts majoritairement en euros. Une chaîne d'assemblage américaine permettrait ainsi d'avoir une chaîne des fournisseurs « plus américaine », avec des salaires payés en dollars. Une réduction de l'exposition nette d'EADS qui reste néanmoins difficile à chiffre tant que le volume de production d'A320 ne sera pas précisé.

Ce projet va évidemment déclencher des discussions enflammées avec les syndicats européens. "Nous n'avons jamais caché que notre stratégie était d'accroître notre implantation industrielle (...) aux Etats-Unis, qui représentent le plus grand marché au monde pour l'aéronautique et la défense et le resteront pendant de longues années", a souligné ce jeudi le président d'EADS, Tom Enders .Airbus avait prévu d'ouvrir une usine à Mobile pour y produire des avions ravitailleurs pour l'armée de l'air américaine, un contrat de 35 milliards de dollars que Boeing lui a arraché in extremis en 2011. "Nous y avons acquis beaucoup d'expérience et nous nous y sommes fait des appuis solides", a précisé Tom Enders.

 

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Commentaires 11
à écrit le 29/06/2012 à 16:24
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Il y a un autre point qui est moins évoqué : l'A320 va être abandonné pour l'A350 dont le quantitatif sera moindre. EADS délestre donc finement et avec raison ses effectifs européens en préparation de ce phénomène. Une gestion de prévision au lieu de...

le 29/06/2012 à 16:49
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Non, l'A320 est un mono-couloir court/moyen courrier, l'A350 un bi-couloir long courrier. Ils ne visent pas du tout les mêmes segments du marché. L'A350 remplacera à terme les A340 (dont la fabrication est arrêtée) et A330.

à écrit le 29/06/2012 à 9:58
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EADS - C'était lorsque l'? n'avait pas été déprécié par rapport au $ qu'il fallait l'entreprendre c'est trop tard maintenant reste plus qu'à imposer l'emploi exclusif d'un personnel Européen dans l'Alabama!

à écrit le 29/06/2012 à 9:43
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Tiens la Trubune réécrit ses articles ? J'ai commenté l'article d'hier sur le même sujet, justement en disant que la production en zone dollare était l'argument numéro 1. Merci de tenir compte des avis et suggestions de vos lecteurs...qui vous aident...

le 29/06/2012 à 10:11
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ça va les chevilles...

à écrit le 28/06/2012 à 23:37
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mais vu que les tarifs sont affichés en dollar, la production en zone dollar permet de limiter les risques de change ...!! et si ça permet d'augmenter la sous-traitance des entreprises françaises, tant mieux !!!

le 29/06/2012 à 10:15
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d'après ce que je sais, Airbus paye déjà l'essentiel de ses sous-traitants en dollars, en leur transférant le risque de change... ça ne change pas grand chose au final!

le 29/06/2012 à 21:46
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Non, c'est l'attrait des compagnies us pour le Neo qui justifie une chaîne aux US et non une FAL aux US qui va booster les ventes aux US. C'est quand même différent.

à écrit le 28/06/2012 à 23:29
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bien sûr que les compagnies US s'en fichent qu'Airbus assemble ses avions aux US. Comment des gens d'Airbus pensent que cela va aider les ventes. N'importe quoi.

le 29/06/2012 à 0:07
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Les compagnies UD avaient déjà commencé à acheter des airbus made in toulouse, la nationalité ne leur posait pas de problème. Le vrai objectif de cette création d"usine est de pouvoir produire en zone dollar des avions qui sont vendus en dollars. Mê...

le 29/06/2012 à 7:46
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dabord les Airbus c est europeen donc ils achetent des avions made in Hamburg. donc les allemands ont erux aussi leurs mots a dire donc c est les allemands qui possent a avoir une usine de montage au US ce qui est logique et qui vas buster les ventes...

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