Défense : pourquoi Renault Trucks Défense ne pourra pas s'offrir Nexter

Renault Trucks Défense ne devrait pas pouvoir se lancer dans une opération de rachat de Nexter, qui doit être le pivot de la consolidation des poudres et explosifs en France. AB Volvo ne veut pas devenir un fabricant d'armements mais rester seulement un intégrateur-ensemblier de véhicules... blindés. En revanche, la filiale française du suédois est très intéressé par le groupe finlandais Patria ainsi que par les activités plates-formes terrestres de Thales.
Copyright Reuters

Renault Trucks Défense (RTD) en rêve. Bien que la filiale du groupe suédois AB Volvo, qui vient de finaliser le rachat de Panhard en octobre, reste toujours très intéressée par un rapprochement avec le groupe public d'armement Nexter, elle doit pourtant compter avec les conditions de son actionnaire, qui pour le coup lui complique singulièrement la tâche. Car AB Volvo ne veut en aucun cas fabriquer des munitions, ce qui peut paraître paradoxal quand on est propriétaire des marques Renault Trucks Défense, Panhard et Acmat, qui ont développé chacune toute une série de familles de blindés. Le PDG de RTD, Gérard Amiel a confirmé que la vocation du groupe n'était pas de fabriquer de l'armement, un domaine "extrêmement spécifique" réservé aux spécialistes, et qu'il préférait rester sur son coeur de métier, la construction de véhicules.

Car, avec le rachat de Nexter, RTD mettrait aussi la main, outre les activités d'intégrateur de blindés lourds du constructeur du char Leclerc, sur son pôle munitions. Le groupe public fabrique toute une gamme de munitions du moyen au gros calibre, des composants et têtes militaires pour les missiliers ou les fabricants de torpilles. Un rapprochement avec Nexter ne pourrait se faire qu'à condition de la revente à terme de son activité de munitions, a d'ailleurs précisé le PDG de RTD, Gérard Amiel, qui estime que les deux groupes sont pourtant "complémentaires".

Une opération entre RTD et Nexter a échoué il y a deux ans

Le patron de RTD a rappelé que des discussions avaient achoppé il y a deux ans, précisément sur ce point. Il faut dire que le gouvernement précédent réfléchissait plus à un regroupement des activités munitions de Thales et de Nexter au sein du groupe d'armement terrestre que d'un mariage entre RTD et Nexter. En contrepartie, le groupe d'électronique devait prendre une participation comprise entre 10 % et 20 % du capital du groupe public, détenus à 100 % par l'Etat. Le rapprochement entre Nexter Munitions et TDA Armements devait créer un acteur réalisant un chiffre d'affaires combiné d'environ 250 millions d'euros. En outre, le ministère de la Défense réfléchit aujourd'hui à regrouper toutes les activités poudres et munitions au sein de Nexter. Ainsi, SNPE devrait céder ses activités de poudres et explosifs (900 salariés en 2011), dont Eurenco SA, au groupe public. Soit au total près de 208 millions d'euros de chiffre d'affaires qui viendront gonfler les comptes du groupe d'armement terrestre. Bref, on est loin d'une opération entre Nexter et RTD.

Pourtant les deux groupes se connaissent bien, même très bien. A tel point que les salariés basés dans la région parisienne des entreprises fréquentent le même restaurant d'entreprise à Versailles. Surtout, RTD et Nexter coopèrent depuis un an sur le programme de véhicule blindé multirôle (VBMR) destiné à remplacer l'actuel véhicule de l'avant blindé (VAB) dans l'armée française. Un programme gelé par le ministère en attendant la publication du livre blanc prévu début 2013. Du coup, RTD et Nexter ont mis en sommeil en juillet le plateau commun en vue de développer le VBMR. Gérard Amiel a expliqué qu'il ne s'attend pas à un appel d'offres sur ce programme d'ici au dernier trimestre 2013. Soit deux ans de retard sur le calendrier initial.

Le groupe finlandais Patria dans le viseur

Du coup, Renault Trucks Défense ne reste pas les bras ballants et a "plusieurs dossiers en cours d'examen". Il s'intéresse notamment à l'avenir du groupe finlandais Patria, dont EADS détient 26,8 % (le reste étant la propriété de l'Etat finlandais), à la seule condition de devenir majoritaire, a expliqué Gérard Amiel. "Nous avons des échanges avec Patria", a-t-il précisé. Il examine aussi le dossier des activités plates-formes terrestres de Thales, qui fabrique le Bushmaster, une famille de véhicules à grande mobilité et haute protection. Des activités héritées du rachat de la société australienne, ADI Limited. Bref, RTD a plusieurs fers au feu... mais souhaite aussi prendre son temps pour pouvoir intégrer Panhard, dont l'opération a été seulement bouclée fin octobre. La filiale de AB Volvo se fixe deux ans pour réussir cette intégration. "Les pouvoirs publics ont salué le rachat de Panhard par RTD", a indiqué Gérard Amiel.

Vers 700 millions d'euros de chiffre d'affaires ventes en 2015

Cette acquisition devrait aider RTD à atteindre son objectif de 700 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2015 (contre 253 millions en 2011)  avec une part à l'exportation portée à 50-60 % comparé à environ 10 % l'année dernière. En 2012, RTD a remporté de très jolis succès en Egypte et compte beaucoup sur le nouveau véhicule de transports de troupes VAB Mark 3, destinés à l'export et qui a déjà, selon le PDG de RTD, une dizaine de marques d'intérêt. Nous comptons en produire "250 exemplaires par an". "Nos trois marques réunies vont nous permettre de dépasser, dès cette année, les 400 millions d'euros de chiffre d'affaires et d'atteindre les 700 millions en 2015", a estimé Gérard Amiel. La filiale du suédois Volvo a acquis en juillet Panhard pour un montant de 62 millions d'euros.

Le groupe possédait déjà la société ACMAT (Ateliers de Constructions Mécaniques de l'Atlantique). RTD a réalisé en 2011 un chiffre d'affaires de 300 millions d'euros, dont 25 % dans les services (support, pièces de rechange, maintien en condition opérationnelle), Panhard 85 millions et ACMAT environ 30 millions. Le nouvel ensemble compte désormais plus d'un millier de salariés. Trois marques françaises qui fabriquent uniquement en France. Ce "Made in France" pourrait toutefois être revu avec un grand programme export, qui pourrait conduire RTD a installé une chaîne d'assemblage chez un pays client. "Nous avons plusieurs projets en cours pour une chaîne d'assemblage à l'étranger", a confirmé Gérard Amiel.

Adosser à un groupe civil

Gérard Amiel a expliqué la complémentarité des trois marques et justifié l'acquisition de la dernière venue, qui complète la gamme de véhicules du groupe. "Panhard renforce le groupe dans les véhicules légers de moins de cinq tonnes alors que RTD produit des véhicules lourds de combat, de transport de troupes ou de logistique et que ACMAT occupe le bas du segment avec d'autres véhicules légers de type ALTV (véhicule tactique léger) vendus principalement en Afrique", a-t-il expliqué.

Gérard Amiel a défendu le modèle économique du groupe AB Volvo. Il a insisté sur l'importance pour RTD d'être adossé au grand constructeur suédois, numéro deux mondial dans la fabrication des poids lourds derrière Mercedes, basé à Göteborg, pour rester compétitif face à la concurrence, en particulier des pays émergents. "C'est le business model du futur dans le domaine des véhicules militaires terrestres car il permet de bénéficier des investissements en recherche et développement et des effets d'échelle de l'industrie civile", a-t-il encore expliqué. RTD bénéficie notamment des composants (moteurs, boîtes de vitesse), de la technologie du groupe Volvo. "Je n'ai pas besoin de faire de la gymnastique avec mes fournisseurs quand ils arrêtent de produire un de leurs produits car RTD achète à sa maison-mère et peut s'engager sur le long terme sur les pièces de rechange", a-t-il fait valoir. Enfin, il devrait proposer des motorisations hybrides pour la prochaine génération de blindés de l'armée de terre directement dérivées de l'industrie automobile civile.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 3
à écrit le 15/11/2012 à 15:33
Signaler
Il me semble que la france et Bofors avaient déjà développé des obus intelligents, l'obus "bonus". Volvo a raison de ne pas mélanger les genres, ça ferait désordre plusieurs fabricants de munition dans un petit pays comme la suède.

à écrit le 15/11/2012 à 10:11
Signaler
le bandeau de pub M&M's reste en plein milieu de l'ecran. pas de coche pour le fermer . je suis sur sur IE8. C'est insupportable !

le 15/11/2012 à 14:57
Signaler
moi j'ai du mal a recevoir quelques chaines télé sur ma box mais je suis pas sur que nous soyons au bon endroit pour en parler

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.