Pourquoi Renault Trucks Défense s'intéresse à nouveau à Nexter

Le PDG de Renault Trucks Défense plaide pour un rapprochement avec le groupe public Nexter. L'opération est compliquée. Trop compliquée ?
Michel Cabirol
Lle projet de loi de programmation militaire repousse à 2018 la modernisation du parc des véhicules blindés de l'armée de terre

Renault Trucks Défense (RTD) en rêvait. Il a désormais l'autorisation de son actionnaire suédois, le groupe suédois Volvo, de discuter d'une opération avec Nexter, le groupe public d'armements terrestres. C'est un nouveau revirement à 180 degrés de la stratégie de la maison mère de RTD après l'échec des discussions en 2010 entre les deux groupes.

Alors que la direction du groupe Volvo s'opposait il y a moins d'un an à une opération sur Nexter, ce n'est plus désormais le cas. "Sans un rapprochement entre Nexter et Renault Trucks Défense (RTD), les perspectives de l'armement terrestre français pourraient être assez sombres", a lâché devant la commission de la Défense de l'assemblée nationale le PDG de RTD, Gérard Amiel. Ce dernier n'a pas évoqué publiquement cette opération à la légère sans l'accord expresse de son actionnaire suédois.

Volvo ne veut pas fabriquer des munitions, ce que fait Nexter

Pourtant, le groupe Volvo avait encore démenti en février dernier les propos de Christian Mons, l'ancien patron de Panhard, racheté en juillet 2012 par RTD et actuellement conseil spécial dans le groupe Volvo, sur un intérêt de la filiale suédoise sur Nexter. Pourquoi ce démenti ? Parce que Volvo ne veut pas fabriquer des munitions, ce que fait Nexter.

Un choix qui peut paraître paradoxal quand on est propriétaire des marques Renault Trucks Défense, Panhard et Acmat, et bien d'autres à l'international, qui ont chacune développé des familles de blindés. En novembre dernier, le PDG de RTD, Gérard Amiel avait confirmé que la vocation de son groupe n'était pas de fabriquer de l'armement, un domaine qu'il estimait "extrêmement spécifique" et donc réservé aux spécialistes. Gérard Amiel préférait alors rester sur son cœur de métier, la construction de véhicules.

La loi de programmation militaire a fait bouger les lignes

Or, depuis longtemps le président du Conseil des Industries de Défense Françaises (Cidef) Christian Mons, qui avait raison semble-t-il trop tôt, préconisait un rapprochement des trois acteurs (Nexter, RTD et Panhard), présents sur le marché français, qui se réduit d'année en année.

Mardi devant les députés, le PDG de RTD a donc plaidé pour un rapprochement avec Nexter, pour survivre à la "traversée du désert" que va imposer aux deux entreprises la Loi de programmation militaire (LPM) française, qui visiblement « fait bouger les lignes », selon un bon connaisseur du dossier. Cette LPM pourrait faire « un mort et un blessé grave », estime-t-il. D'où le nouvel intérêt de RTD pour Nexter, mais sans les munitions.

Une opération qui reste très complexe

Pas sûr que le gouvernement français regarde cette opération d'un bon œil. Pour deux raisons. Il pousse à la création d'un pôle munitions consistanrt autour de Nexter, qui va bientôt consolider la filiale de SNPE, Eurenco (250 millions de chiffre d'affaires en 2012).

Et surtout il a donné son feu vert à des négociations approfondies entre Nexter et l'allemand Krauss Maffei Weigmann (KMW) pour créer une joint-venture. Avec comme objectif de conclure d'ici à la fin de l'année, expliquait-on à La Tribune fin juillet au sein du ministère de la Défense. Ce qui semble aujourd'hui ambitieux. 

Des discussions avaient déjà eu lieu en 2010 ...et échoué

Enfin, faut-il rappeler que des discussions entre RTD et Nexter ont déjà échoué en 2010 sur la question des munitions. A l'époque, le gouvernement réfléchissait plus à un regroupement des activités munitions de Thales et de Nexter au sein du groupe public que d'un mariage entre RTD et Nexter. En contrepartie, le groupe d'électronique devait prendre une participation comprise entre 10 % et 20 % du capital de Nexter, détenus à 100 % par l'Etat.

Le rapprochement entre Nexter Munitions et TDA Armements devait créer un acteur réalisant un chiffre d'affaires combiné d'environ 250 millions d'euros. Bref, on est loin d'une opération entre Nexter et RTD.

Un espoir de rapprochement ?

Le fabricant du char Leclerc construit des blindés plus lourds que les véhicules de RTD et les deux ne sont "absolument pas concurrents", a estimé mardi Gérard Amiel. Les deux groupes coopèrent également sur plusieurs programmes dont le Véhicule blindé de combat d'infanterie (VBCI) et le canon autotracté Caesar. Et pourquoi pas pour le futur véhicule blindé multi-rôles (VBMR), le successeur des mythiques VAB (Véhicules de l'avant-blindé).

Mais le projet de LPM repousse à 2018 la modernisation du parc des véhicules blindés de l'armée de terre. Pour Gérard Amiel, cette date n'est pas réaliste et les industriels auront du mal à préserver l'emploi jusqu'aux premières livraisons. Si l'appel d'offres pour les transports de troupes et les véhicules de combat est lancé en 2014, "on penche plutôt pour l'après 2020" pour les livraisons, a-t-il expliqué. "Nous avons devant nous cinq années blanches, une vraie traversée du désert", a-t-il dit, ajoutant : "il y a un risque très fort sur la pérennité de nos emplois en France".

Le président du Cidef a brandi le spectre de la disparition de 20.000 emplois dans le secteur, principalement dans les PME, lors de l'université de la Défense la semaine dernière.

Michel Cabirol

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Commentaires 7
à écrit le 19/09/2013 à 4:38
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Vers un nouveau pôle industriel européen voilà une bonne nouvelle mais le politique est au milieu et pas le plus connaisseur en matière industrielle le médiocre fonctionnaire de l'assemblés nationale là est le vrai pb. Laissons les deux industriels g...

à écrit le 18/09/2013 à 22:38
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ils ont produit des camions-malaxeurs à béton, des camions ravitailleurs, des camions à plateau, des camions à benne basculante, des chargeurs sur pneus, etc. l'entreprise est la production de tracteurs pour le commerce international avec des config...

à écrit le 18/09/2013 à 22:06
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Enfin, faut-il rappeler que toute sa production se concentre sur les camions, les bus, les autocars, les minibus et les véhicules militaires.

à écrit le 18/09/2013 à 21:49
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20 ans que la France à laissé de coté une vrai politique industriel à la faveur de l immobilier , un scandale !

à écrit le 18/09/2013 à 19:31
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Dommage que renault truck soit dans les mains de volvo sans renault, comment l'état a-t-il pu laissé faire ça si on savait que renault truck était à ce point stratégique et sachant aussi que l'état est actionnaire de renault !

le 18/09/2013 à 21:49
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Au début des années 2000, Renault a vendu sa division camion à Volvo contre 21% de Volvo. La division Francaise de Renault a racheté successivement ACMAT et Panhard (et Nexter n'a pas bougé à l'époque) devant un fabricant de véhicule blindé léger. Re...

le 18/09/2013 à 23:04
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Le fait que RTD appartienne à Volvo, est une très grande force.

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