Défense : trois nouveaux contrats export dans l'escarcelle de MBDA

Le missilier européen a engrangé une nouvelle commande en Arabie Saoudite d'un peu plus de 150 millions d'euros. MBDA va signer d'ici peu un contrat export en Malaisie d'un peu moins de 100 millions d'euros. Enfin, les corvettes du Vietnam s'équiperont de missiles MBDA.
Michel Cabirol
Le missile de défense aérien SAMP/T de MBDA, un des fers de lance à l'export

Pour MBDA, la bataille de l'export est devenue une question de survie non pas pour le groupe en tant que tel mais pour rester un acteur global sur l'ensemble de la gamme missile. Car, comme le confirme le PDG du missilier européen (37,5 % BAE Systems, 37,5 % EADS et 25 % l'italien Finmeccanica) Antoine Bouvier, "l'équilibre" de MBDA "dépend des exportations". "Lorsque j'ai en face de moi les personnels, les cadres et les organisations syndicales, lorsque je présente au CCE (comité central d'entreprise, ndlr) la situation de la charge et leur explique que notre équilibre dépend des exportations, croyez bien que tous les responsables de l'entreprise sont profondément affectés et impliqués", a-t-il expliqué aux députés de la commission défense de l'Assemblée nationale.

Trois contrats, certes modestes, vont redonner un peu le sourire à Antoine Bouvier. Et conforter surtout le travail de fond des équipes commerciales du missilier à l'export. Pour trois raisons. D'une part parce que MBDA s'est battu comme un chien pour les obtenir dans deux pays référents (Arabie Saoudite et Malaisie) et dans un nouveau pays pour l'industrie d'armement française (Vietnam).

Enfin, ce sont trois contrats qui vont entraîner de nouvelles tranches de commandes à venir. En Arabie Saoudite, MBDA va équiper de missiles sol-air VL Mica la Garde nationale, l'armée privée du roi commandée par le prince Mitaeb bin Abdullah, selon des sources concordantes. Ce contrat, qui s'élève à un peu plus de 150 millions d'euros, va permettre de remplacer le parc de missiles Mistral, dont le fournisseur était déjà MBDA. A terme, le missilier table sur plus de 500 millions d'euros de commandes au total.

MBDA gagne en Malaisie et... au Vietnam

MBDA est en attente d'une notification (LOA, ou Letter of Approval) d'un contrat portant sur les installations de tir de missiles sur les six corvettes de type Gowind, dont le design a été vendu par DCNS. Le montant de cette commande est évalué à un peu moins de 100 millions d'euros. Mais qui dit installations de tir dit commandes futures de missiles. MBDA devrait ainsi vendre des missiles surface-air VL Mica, et l'anti-navire, Exocet block 3. La future commande est estimée entre 300 et 400 millions d'euros. Une belle victoire face au concurrent américain Raytheon qui présentait le ESSM (Evolved Sea Sparrow Missile).

Selon nos informations, MBDA va également équiper avec du VL Mica et de l'Exocet les deux corvettes néerlandaises du chantier naval Damen achetées par le Vietnam (+ deux en option). Un nouveau très joli coup pour MBDA.

Outre ces trois contrats, MBDA, qui n'annonce jamais la signature de ces contrats à l'export en raison de la discrétion de ces clients, a engrangé, selon La Tribune, quelques beaux contrats, qui iront grossir les prises de commandes de 2013. Et peut-être même dépassé le record de 2012 (1,5 milliard d'euros). Surtout si le missilier parvient à décrocher enfin un des mégacontrats sur lequel il est en compétition, notamment grâce aux avions de combat (Rafale notamment, mais aussi Eurofighter et Gripen, voire Tornado).

L'Arabie Saoudite, bon client du missilier

Des commandes qui viennent d'Arabie Saoudite, dont une via BAE Systems, qui a signé un contrat évalué à 3 à 4 milliards de livres avec Ryad pour l'armement de ses vieux avions de combat Tornado. Le groupe britannique a choisi MBDA, qui fournira à l'armée de l'air saoudienne le missile air-sol britannique le Dual-Mode Brimstone, fabriqué pour la Royal Air Force. En outre, MBDA fournira à l'armée de l'air saoudienne un lot supplémentaire de missiles de croisière Storm Shadow. Soit environ une commande évaluée pour MBDA à 500 millions d'euros.

Enfin, MBDA participera au contrat d'Etat à Etat (LEX ou Life Extension Sawari 1) de plus d'un milliard d'euros portant sur la modernisation de quatre frégates de classe Al Medinah et de deux pétroliers-ravitailleurs de la classe Boraida mis en service en 1985-1986 (contrat Sawari I). MBDA va équiper les pétroliers de son nouveau système surface-air à très courte portée de MBDA Simbad-RC (un peu plus de 40 millions d'euros), deuxième client de ce nouveau produit, qui n'équipe même pas l'armée française, et notamment les BPC.

Singapour et l'Inde choisissent MBDA

Singapour, client très exigeant mais référent, a choisi MBDA. C'est une très bonne nouvelle pour le groupe. La cité Etat  va prochainement investir dans des missiles Aster 30 pour remplacer son actuel équipement américain vieillissant, a annoncé mi-septembre le ministre de la Défense singapourien, Dr Ng Eng Hen. Il n'a révélé ni le coût du système, ni le nombre de missiles, ni la date précise à laquelle Singapour fera cet investissement.

L'Inde a également sélectionné MBDA. Selon un communiqué publié lors de la visite de François Hollande en février dernier du Premier ministre indien, Dr Manmohan Singh's, New Delhi a annoncé avoir "conclu des négociations sur le missile SRSAM (Short Range Surface to Air Missile, un missile sol-air de nouvelle génération), qui, une fois approuvé par le gouvernement, sera co-développé et co-produit en Inde". Un contrat de l'ordre de 6 milliards de dollars (4,5 milliards d'euros), selon l'agence de presse indienne PTI.

MBDA attend depuis des années ce très beau contrat, qui devrait gonfler, selon nos informations, son carnet de commandes à hauteur de 1,8 milliard d'euros, en vue de co-développer et co-fabriquer avec Bharat Dynamics Limited ce missile sol-air de nouvelle génération.

Trois gros échecs

MBDA a pourtant connu trois gros échecs même s'il  n'en a pas à rougir, les raisons n'étant pas imputable au missilier. L'un à Oman au printemps dernier, où il était pourtant donné comme favori. Le sultanat va finalement acquérir le système de défense aérienne américain de Raytheon SLAMRAAM pour un montant de 2,1 milliard de dollars (1,6 milliard d'euros). Oman, qui n'a pas encore signé ce contrat, était pourtant sur le point de choisir le missilier européen MBDA mais a dû changer son fusil d'épaule sous la pression de l'administration américain.

"Le contrat avec Oman, que nous avons perdu, a expliqué Antoine Bouvier aux députés, s'élevait à un milliard d'euros, soit deux années de notre chiffre d'affaire en France : croyez bien que l'ensemble du personnel de l'entreprise a accusé le coup ! Mais il est de la responsabilité des dirigeants de surmonter le plus rapidement possible les déceptions pour aller de l'avant".

C'est le cas aussi en Turquie même si les deux concurrents américains et européens tentent de faire revenir la Turquie sur son choix fin septembre de prendre un groupe chinois. Pourtant membre de l'OTAN, Ankara a choisi CPMIEC pour la fourniture d'un système de défense aérienne stratégique. Un contrat évalué à 4 milliards de dollars. Ce qui a constitué une énorme gifle pour les américains Raytheon et Lockheed Martin ainsi que les français MBDA et Thales.

Enfin, Paris a préféré Thales à MBDA pour fournir à l'Arabie saoudite un nouveau système de défense aérien, un contrat estimé au total à environ 4 milliards d'euros. Le groupe d'électronique propose une modernisation du parc saoudien à base de Crotale NG.

Un carnet de commandes en baisse depuis 2009

Signe inquiétant, le carnet de commandes de MBDA baisse inexorablement depuis 2009. Fin 2012, il est même passé pour la première fois depuis la création de MBDA en 2001 sous la barre symbolique des 10 milliards d'euros (9,8 milliards). Soit un peu plus de trois ans d'activité - pour un chiffre d'affaires de 3 milliards d'euros en 2012 stable par rapport à 2001 (3 milliards). En 2009, le carnet s'élevait à 12 milliards, déjà en net retrait par rapport à 2003 (14,8 milliards).

En 2013, MBDA vise au moins trois milliards d'euros de prises de commandes, a prudemment estimé Franck le Rebeller. Antoine Bouvier insiste pour atteindre un ratio chiffre d'affaires, prises de commandes supérieur à 1. Il faut compenser 2011 et 2012 , années où les prises de commandes ont été inférieures au chiffre d'affaires, a-t-il expliqué. C'était aussi le cas en 2010.

Michel Cabirol

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