"DCNS doit rapidement tourner la page des pertes" (Hervé Guillou, PDG de DCNS)

DCNS veut rapidement être, dès 2015, à nouveau profitable pour tourner la page des très mauvais comptes de 2014. Le groupe naval a enregistré ses premières pertes depuis 2001 (336 millions d'euros).
Michel Cabirol
Les corvettes Gowind de DCNS ont eu beaucoup de succès en 2014
Les corvettes Gowind de DCNS ont eu beaucoup de succès en 2014

Pour le PDG de DCNS, le plus dur commence. Après avoir passé, dès son arrivée à la tête du groupe naval, à la paille de fer les comptes 2014 plombés par certains programmes mal maîtrisés - réacteur expérimental Jules Horowitz et sous-marins Barracuda notamment -, Hervé Guillou veut maintenant "tourner la page", comme il l'explique dans une interview accordée à La Tribune. Car les comptes 2014 sont très mauvais, conformément aux prévisions de DCNS, avec une perte nette de 336,1 millions d'euros (contre un résultat net de 114,7 millions en 2013) en raison d'un montant de provisions non communiquées. La première perte depuis la période 1997-2001, quand la Direction des Constructions Navales (devenu DCNS) était régulièrement dans le rouge. Le chiffre d'affaires est aussi en baisse à 3,06 milliards (contre 3,3 milliards en 2013).

Comment tourner la page? Pour gagner le pari de retrouver rapidement de la profitabilité dès 2015, le PDG de DCNS a recruté "du sang neuf" - Marie-Pierre de Bailliencourt (directeur général adjoint), Frank Le Rebeller (directeur général adjoint en charge des finances et du juridique) et Olivier de la Bourdonnaye (direction industrielle), sans précise-t-il, avoir lancé "une chasse aux sorcières" afin de garder "les compétences techniques des anciens". Hervé Guillou veut notamment "poursuivre la transformation industrielle de DCNS", qu'il considère comme une pépite technologique. Avec notamment la volonté "d'améliorer la maîtrise des programmes" sous l'impulsion de Pierre Legros, directeur de la nouvelle direction des programmes, et d'Olivier de la Bourdonnaye, ancien patron du programme Ariane 6.

Le PDG de DCNS compte également poursuivre des investissements dans le domaine du CMS (Combat Management Systems), un "secteur fondamental" pour le groupe et pour la France. "C'est un devoir sacré" en vue de "préserver la base industrielle et technologique de défense (BITD) française", explique-t-il. Un point de friction avec son actionnaire privé Thales (35%), qui entretient lui-aussi des compétences aux Pays-Bas à Hengelo (Thales Nederland), sur certains marchés à l'export, à l'image du contrat de six corvettes Gowind gagné en Malaisie.

"Trois hubs" industriels à l'international

Hervé Guillou croit beaucoup à l'internationalisation de DCNS, dont 33% des prises de commandes ont été réalisées à l'export en 2014 (3,6 milliards contre 2,2 milliards en 2013, soit une hausse de 59%).  Notamment grâce au très beau contrat réalisé en Egypte (quatre corvettes de type Gowind vendues pour 1 milliard d'euros). DCNS a réalisé 32,7 % de son chiffre d'affaires à l'international. Mais, a-t-il constaté, le groupe "a pris sa place à l'export mais n'en a jamais profité jusqu'ici", car DCNS n'est "pas assez déployé industriellement". Une stratégie qui permettra de rivaliser face à ses trois concurrents européens, qui ont une base export plus élargie : l'allemand ThyssenKrupp Marine Systems (15 clients), le néerlandais Damen (25) et l'italien Fincantieri (20).

Le PDG de DCNS souhaite donc créer "trois hubs" industriels à l'international - Malaisie, Brésil et Arabie Saoudite (spécialisé dans le maintien en condition opérationnelle - à partir desquels DCNS pourrait exporter et profiter de la croissance de ces trois régions : Asie du Sud-Est, Amérique latine et Moyen-Orient. Trois pays où le groupe naval a déjà réussi de très jolis coups commerciaux : sous-marins Scorpène et corvettes Gowind en Malaisie et au Brésil et frégates en Arabie Saoudite. Il souhaite donc profiter des partenariats déjà mis en place avec des partenaires locaux pour mieux structurer une organisation industrielle.

Enfin, s'agissant d'une éventuelle consolidation en Europe, Hervé Guillou rappelle que sa "porte est ouverte". Mais pour le coup, l'une s'est refermée plutôt brutalement, le constructeur de sous-marins suédois Kockums, propriété de Saab, après avoir divorcé de TKMS, s'est récemment rapproché de Damen. "Je m'interroge effectivement", regrette-t-il. Il estime par ailleurs que les Allemands ne sont "pas encore prêts" à discuter de rapprochements.

"Ma porte est ouverte s'il y en Europe des acteurs, qui veulent discuter de consolidation avec DCNS", souligne-t-il.

Vers un tri dans les énergies marines renouvelables

En 2014, DCNS a réussi sa percée dans les énergies marine renouvelables. Notamment dans le domaine des hydroliennes où DCNS a obtenu plusieurs succès significatifs. EDF a passé commande de deux nouvelles hydroliennes de 16 mètres pour équiper la ferme expérimentale de Paimpol-Bréhat (Côtes d'Armor) et a été sélectionné par l'Ademe pour l'installation d'une ferme pré-commerciale de sept hydroliennes dans le Raz Blanchard.

En outre, le groupe a été choisi par le ministère de l'Energie de Nouvelle-Ecosse (Canada) pour une ferme expérimentale de 4 MW dans la baie de Fundy. Ce qui fait dire à Hervé Guillou, "favorablement impressionné par OpenHydro", la filiale irlandaise de DCNS, qu'il y a une "vraie route industrielle" pour "un des leaders mondiaux" dans ce domaine. "Nous sommes au stade de la production", souligne-t-il. Il estime que le groupe devra investir une centaine de millions d'euros après en avoir investi une centaine.

Sur les éoliennes en mer, Hervé Guillou rappelle que DCNS, qui apporte ses compétences sur la maîtrise de l'élément marin (flotteur, stabilité en mer...), restera derrière Alstom avec qui il a signé un partenariat. Les deux industriels ont d'ailleurs un accord avec la région Bretagne pour faire avancer le projet de site pilote éolien flottant de Groix.

DCNS poursuit également son aventure dans l'énergie thermique des mers (ETM), une technologie moins mature où des verrous technologiques restent encore à lever. Mais le groupe en partenariat avec Akua Energy porte un projet en Martinique dans le cadre d'un financement de 70 millions d'euros environ du fonds européen NER 300.

Enfin, DCNS et Enel Green Power ont été retenus pour mettre en place au Chili un centre de recherche et d'innovations sur l'énergie marine, notamment sur l'hydrolien et l'énergie des vagues.

Michel Cabirol

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Commentaires 5
à écrit le 25/02/2015 à 12:37
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Il faut DOUBLER le Budget des ArméesLe budget de l'équipement des Armées a fondu de moitié en 30 ans, alors que les dangers sont plus grands et plus dispersés. La France de Jospin-Aubry ( 2 anti armées viscéraux) a remis à neuf par DCNS Brest, le Por...

le 25/02/2015 à 16:01
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Un porte-avions est une dépense absolument inutile ! Au mieux une telle dépense pourrait être faite en commun avec les autres pays européens ! Le premier avoir sacrifié le budget des armées et Nicolas Sarkozy il est étonnant que vous ne l'ayez pas s...

le 25/02/2015 à 19:03
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Etonnant non .Bizarre non. Car Nicolas Sarkozy et ses deux Ministres de La Défense, n'ont pas assuré ce domaine comme Hollande et Le Drian : Le Drian, le meilleur Ministre de la Défense avec Pierre Messmer (9ans) Un P.A dans les conflits actuels di...

à écrit le 25/02/2015 à 10:55
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cause toujours tu les intéresses énormément mossieur l'ingénieur général de l'armement Cot cot

à écrit le 25/02/2015 à 6:46
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Il y a bien trop long temps que cette entreprise ne vie que des commande d'état.... La voilure de notre marine commencent a ce réduire, ils leur faut trouver d'autre déboucher.... Côté Marine militaire nous avons un vrais savoir faire dans le nucleai...

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