Aéronautique : la digitalisation, un atout français

Le PDG de Thales Patrice Caine explique pourquoi la digitalisation est une chance pour la France et l'Europe.

La révolution numérique est partout et l'industrie aéronautique civile et militaire n'échappe pas à ce tsunami technologique. Pour Patrice Caine, PDG du groupe Thales (64.000 employés dans 56 pays, 15 milliards d'euros de chiffre d'affaires), "la France et l'Europe possèdent énormément d'atouts pour jouer un rôle de premier plan". Il cite l'écosystème qui se met en place avec le pôle de compétitivité Cap Digital, l'Institut de Recherche Technologique SystemX, le pôle intelligence artificielle (IA) de Saclay et des acteurs académiques de premier rang comme l'INRIA, le CEA, l'Université Pierre et Marie Curie ou le CNRS. Sans oublier ces figures emblématiques que sont Yan Le Cun (Monsieur IA chez Facebook) ou Jean-Marie Hullot, inspirateur de l'iPhone.

"La France possède de grands industriels intégrateurs de technologies, mais peu de groupes digitaux par nature, comme Thales avec ses 25.000 personnes en R&D dont 18.000 pour les systèmes à logiciels prépondérants (1)", regrette Patrice Caine.

Le laboratoire de Palaiseau, où les équipes de Thales et du CNRS travaillent en commun sur les nano neurones et les nano synapses en est l'illustration. "L'IA suscite des investissements très importants qui ont déjà produit des applications concrètes comme la reconnaissance faciale, Shazam, Waze et d'autres bientôt dans l'aéronautique, où les compagnies aériennes possèdent beaucoup de données sur leurs clients", analyse Patrice Caine. Thales a par exemple développé un système d'IA pour permettre au contrôle aérien de replanifier les plans de vol en temps réel, et un autre pour augmenter la reconnaissance automatique de cible dans le domaine militaire.

Faire rêver les jeunes talents

Mais ces applications d'intelligence artificielle ne vont-elles pas tuer des milliers d'emplois, comme l'annoncent plusieurs études alarmistes ?

"Pour éviter ça, il nous faut une vision et une volonté politique, une filière forte avec des locomotives comme le GIFAS (Groupement des Industries Françaises Aéronautiques et Spatiales) et le CORAC (Conseil pour la Recherche Aéronautique Civile), et un financement de la puissance publique. Thales a un milliard dans le digital au cours des trois dernières années mais ce n'est pas suffisant. La Chine est devenu le premier pays sur la recherche en intelligence artificielle", estime le PDG de Thales.

Et aussi les rémunérer, sachant que, selon le patron de Thales, "un très bon data scientist ou spécialiste IA est embauché aux États-Unis avec un salaire de 1 à 2 millions de dollars ! Impossible de nous aligner. Mais on peut leur offrir des aventures industrielles ou entrepreneuriales et les faire rêver comme le fait Elon Musk (créateur de Tesla et SpaceX Ndlr)".

Le numérique modifie également le business même des industriels. Thales va vendre de moins en moins de matériels et de plus en plus de services à la carte (SaaS ou software as a service). Pour accompagner cette évolution, le groupe a créé une Digital Academy à laquelle il va consacrer 150 millions d'euros sur trois ans pour former des équipes pluridisciplinaires en IA, cyber, IoT (Internet des objets) ainsi qu'un incubateur de startups.

"Nous allons aussi les chercher dans des incubateurs externes. Nous serons par exemple l'industriel parrain sur la cyber sécurité à Station F, le plus grand incubateur du monde qui va bientôt ouvrir à Paris. Et Thales est numéro trois en termes d'attractivité derrière Google et Airbus, avec une marque peu connue dans le grand public", se félicite le PDG du groupe français, qui a racheté la startup américaine Guavus, spécialisée dans le big data au service des opérateurs télécoms capable de traiter les données en temps réel avec une précision de 99,99999 %.

"Nous allons les laisser se développer dans leur univers initial, puis nous introduirons sur cette plateforme des applis verticales destinées à nos cinq marchés l'aéronautique, le spatial, le transport terrestre, la défense et la sécurité ", conclut Patrice Caine.

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(1) Tout système dont la dimension logicielle influence considérablement la conception, la construction, le déploiement et l'évolution du système dans son ensemble

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Commentaires 3
à écrit le 29/06/2017 à 11:28
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Le digital, c'est ce qui a rapport avec les doigts. Par exemple les empruntes digitales. Le numérique, c'est ce qui a rapport avec la représentation des informations par des moyens numériques et leur traitement par des procédés numériques. En un mot...

le 29/06/2017 à 16:27
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empreintes digitales. sinon +1.

à écrit le 28/06/2017 à 17:01
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"Impossible de nous aligner." A traduire par : nous ne voulons pas payer les compétences des personnes que nous voudrions recruter à leur juste valeur.

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